Voyant son bilan laminé par la crise, le président encourage les manifestations intérieures contre le confinement, tout en pointant la responsabilité de la Chine.
Deux semaines après que Donald Trump a publiquement invité la population états-unienne à « libérer » leur État confiné, des manifestants, dont certains ostensiblement armés, ont investi le Capitole américain du Michigan, où les parlementaires étaient réunis, à la veille du 1er mai.
Une scène surréaliste mais parfaitement « légale », selon la police locale, qui s’est exprimée sur la chaîne NBC News, et qui illustre la montée en tension aux États-Unis du débat sur le déconfinement, que Donald Trump tente grossièrement d’instrumentaliser : il y a une quinzaine de jours, l’actuel locataire de la Maison-Blanche avait soutenu les manifestations bravant les mesures de confinement en appelant sur Twitter à « libérer » trois États gouvernés par les démocrates, à savoir le Michigan, le Minnesota ou encore la Virginie. « Sauvez votre formidable deuxième amendement (celui qui autorise tout citoyen à porter une arme – NDLR). Il est assiégé ! » encourageait alors Donald Trump, qui rejette avec constance le poids de l’effondrement économique et de la hausse drastique du chômage sur les autorités locales démocrates, lesquelles dirigent effectivement les États de Virginie, du Minnesota et du Michigan. Dans ce dernier État, la Chambre des représentants, à majorité républicaine, a rejeté le 1er mai la prolongation de l’état d’urgence ordonnée par la gouverneure démocrate et autorisé des poursuites judiciaires pour « abus de pouvoir ».
Joe Biden serait largement vainqueur en Pennsylvanie
En clair, c’est bien une bataille politique plutôt que sanitaire qui fait rage, sur fond de sondages particulièrement défavorables pour Donald Trump, notamment dans cette « Rust Belt » (la ceinture de la rouille), soit les ex-États industriels frappés par la crise économique et les politiques de délocalisation, lesquels avaient massivement contribué à la victoire du milliardaire affilié aux républicains en 2016. Le dernier sondage Harper Polling donne ainsi le démocrate Joe Biden largement vainqueur en Pennsylvanie, avec 49 % des intentions de vote, contre 43 % pour Donald Trump. Sans surprise, l’impact colossal de la crise du coronavirus a largement compromis le principal argument de campagne de ce dernier pour sa réélection, soit la bonne santé économique et sociale des États-Unis. Le nez rivé sur les sondages, Donald Trump tente de contrecarrer une donnée fondamentalement négative quant à ses chances d’être reconduit à la Maison-Blanche : les gouverneurs locaux sont massivement plébiscités par les Américains pour faire face à la crise, à plus de 70 % en moyenne, quand le taux de confiance vis-à-vis de l’État fédéral culmine à environ 40 %…
Au cœur de l’épidémie, la Maison-Blanche multiplie les arguments complotistes
Au cœur de cette bataille pour gagner le cœur d’une opinion publique frappée de plein fouet par la crise économique, Donald Trump joue la carte d’un double bouc émissaire, l’un intérieur, soit les gouverneurs démocrates censés entraver la reprise économique, l’autre extérieur, avec la Chine en ligne de mire. Le jour même des manifestations pro-Trump, armes à la main à l’intérieur du Capitole du Michigan, le président des États-Unis assurait envisager des taxes punitives contre Pékin après avoir acquis la confirmation que le coronavirus proviendrait d’un laboratoire chinois, insinuant clairement le caractère « fabriqué » du Covid-19.
Une hypothèse pourtant balayée par la plupart des scientifiques dans le monde ayant étudié les origines de la pandémie qui secoue la planète, et en premier lieu les États-Unis.
04 mai 2020 (Jeff Kowalsky/AFP)