Richard Wagner et le champagne. Anecdotes (1)

Hipp hipp hourah ! (détail) par Peder Severin Krøyer — photo by UFA66

Le Ménestrel du 17 août 1902 rapportait l'anecdote suivante :
— La revue musicale illustrée Die Musik vient de faire paraître, dans un fascicule publié à l'occasion, des représentations de Bayreuth, plusieurs documents fort intéressants et inédits concernant Richard Wagner. Nous y trouvons deux compositions que le maître a écrites pour s'amuser. L'une est adressée à M. Rebel, propriétaire de la maison que Wagner habita en 1863 et 1864 à Penzing, près Vienne et qui est située rue Hadik, n° 72. Elle est écrite au verso d'une traite de 525 francs payable à vue et tirée par une grande maison de Champagne de Reims sur « Monsieur Richard Wagner », le 18 juin 1864. Le Champagne était arrivé à Penzing pendant l'absence du maître qui était déjà à Munich, et M. Rebel s'était chargé de payer les frais importants de douane et de transport. Wagner le remercie en écrivant le récitatif suivant sur deux portées :
A M. REBEL. — SOUVENIR. Recitativo secco. Avec en plus, encore cent dix florins, douane et transport— cela fait, disons-le, un bon pourboire.
RICHARD WAGNER.
Les premiers mots « avec en plus » indiquent que Wagner avait déjà payé la somme principale de 525 francs ; les frais de 110 florins, soit 275 francs, augmentaient le prix du Champagne si considérablement que Wagner pouvait bien risquer le jeu de mots relatif au « bon pourboire ». Ajoutons que les paroles sont mises en musique avec soin ; la déclamation est parfaite avec une petite pointe comique. Le malheureux Champagne d'une des meilleures marques de Reims aurait fait jeter les hauts cris en Allemagne si on en avait eu connaissance avant l'apothéose de 1876.
Combien d'encre n'a-t-on pas versé sur les caleçons en soie et les robes de chambre en satin dont on a découvert l'existence dans une petite correspondance du maître avec une couturière viennoise !