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Richard Berry et l’immonde

Publié le 04 février 2021 par Sylvainrakotoarison

" Je démens de toutes mes forces et sans ambiguïté ces accusations immondes. Je n'ai jamais eu de relations déplacées ou incestueuses avec Coline, ni avec aucun de mes enfants. " (Richard Berry, Instagram le 2 février 2021).
Richard Berry et l’immonde
Confortant ce démenti, celui de Jeane Manson, dans un communiqué de presse le 3 février 2021 : " Monsieur Berry vient de dénoncer ces accusations invraisemblables. Je m'associe pleinement à son démenti, je réfute et je conteste avec force l'existence de ces faits. (...) Je suis sidérée et profondément blessée d'être prise à partie dans un règlement de comptes familial. ".
De quelles accusations ? De sa fille aînée Coline, aujourd'hui de 45 ans : " C'est cette enfant qui était embrassée par son père sur la bouche avec la langue, (...) celle qui a dû participer à ses jeux sexuels. " (Instagram).
En quelques phrases, le décor est planté, mais il ne s'agit pas d'une pièce de théâtre, il s'agit d'une réalité, une réalité brûlante d'une famille en berne. Le parquet de Paris a confirmé ce mercredi 3 février 2021 qu'une enquête préliminaire confiée à la brigade de protection des mineurs a été ouverte le 25 janvier 2021 contre l'acteur Richard Berry pour "des faits de viols et agressions sexuelles sur mineur de 15 ans par ascendant et corruption de mineur" après la plainte de sa fille Coline.
Richard Berry, qui a eu 70 ans le 31 juillet dernier, est un acteur de cinéma, également un réalisateur, et un comédien de théâtre (élève d'Antoine Vitez, il fut sept ans pensionnaire à la Comédie-Française). J'ai souvent apprécié ses prestations dans nombre de films. Sa réputation élogieuse ne m'a jamais paru usurpée.
La "famille Berry" est une grande famille de la scène. Une de ses filles est actrice (Joséphine Berry), une belle-sœur grande actrice (Josiane Balasko), et aussi une nièce, fille de celle-ci (Marilou Berry). La mère de Coline, comédienne, a été sociétaire de la Comédie-Française (Catherine Hiegel). Les deux demi-sœurs de Coline ont également une mère actrice (respectivement Jessica Forde et Pascale Louange). À elles toutes, il faut rajouter l'actrice Jeane Manson, mise en cause, qui fut l'épouse de Richard Berry entre 1984 et 1986.
Terminons, pour présenter succinctement l'acteur, que Richard Berry est également connu pour sa générosité envers sa sœur à qui il a donné un rein. Il s'est ainsi beaucoup investi dans le soutien à la recherche sur les pathologies rénales.
Le tableau serait donc idyllique sans cette accusation particulièrement grave de sa fille aînée. Coline a expliqué qu'elle venait de déposer une plainte contre son père. Depuis la publication du livre de Camille Kouchner, très à charge contre le politologue Olivier Duhamel, la parole s'est délivrée sur Internet à propos de ce qui restait encore un véritable tabou, l'inceste. Très vite, la mère de Coline, Catherine Hiegel, et la cousine de Coline, Marilou Berry, lui ont apporté leur soutien. Tandis que Jeane Manson, qui est également accusée par Coline d'avoir participé à des "jeux sexuels", soutient Richard Berry dans son démenti.
Richard Berry et l’immonde
Ce dernier a assuré que sa fille avait commencé à l'accuser il y a sept ans, au moment où la dernière demi-sœur était en "préparation". Coline était aussi enceinte et n'aurait pas supporté d'avoir bientôt une sœur de l'âge de sa fille. Selon l'acteur, sa fille aurait changé souvent de version dans ses accusations jusqu'à cette plainte.
Je ne connais pas la vérité intime ni ultime mais il y a un évident drame familial : ou Richard Berry a réellement commis les actes dénoncés par sa fille et c'est dégueulasse, ou ce sont des accusations fausses contre un père, provenant non plus d'une enfant mais d'une adulte de 45 ans apparemment en totale conscience de ses actes, et c'est tout autant dégueulasse. L'immonde dans un sens ou dans l'autre.
Dans ces histoires, il faut toujours se méfier quand il ne reste plus que la parole de l'un ou de l'autre, sans preuve, sans fait concret et établi. Les accusations fausses lors du procès d'Outreau ont de quoi faire réfléchir sur ce qu'est la justice. Une justice qui, dans tous les cas, ne doit pas être médiatique, mais dans tous les cas aussi, dès lors que l'affaire arrive sur le front public, la réputation est là, soit définitivement entachée, soit sérieusement mise en doute.
Il y a deux grandes différences (voire trois) avec les accusations portées contre Olivier Duhamel le mois dernier.
D'une part, Olivier Duhamel a adopté un silence total, s'est retiré de toutes ses fonctions et essaie de se faire tout petit. L'absence de démenti serait-elle un signe d'aveu ? Peut-être mais je n'en sais rien. C'est très significatif que pour Richard Berry, il y a tout de suite eu des dénégations. Formelles et complètes, pas même une erreur d'interprétation, mais la revendication de l'absence totale des faits reprochés. Au même titre que le silence ne signifie pas aveu, le démenti ne signifie pas forcément innocence.
D'autre part, malgré les risques de prescription, Coline Berry a déposé une plainte au contraire de Camille Kouchner. Cette dernière, convaincue que les faits étaient prescrits, ne voulait de toute façon pas assumer la lourdeur d'une procédure judiciaire mais juste sortir publiquement ce qu'elle avait sur le cœur pendant ces décennies de malaise collectif.
La troisième différence entre les deux situations, enfin, c'est que Camille Kouchner n'a été qu'un témoin par procuration et pas une victime (mais en ce sens, elle est aussi une victime). La véritable victime, au contraire, ne voulait plus en parler, voulait l'enfouir au fond de la mémoire et tourner la page. Il a cependant déposé une plainte récemment.
Les réseaux sociaux sont sans état d'âme et la curée va arriver, lynchage ou soutien. Du père ou de la fille. Il y aura des pour, il y aura des contre. La justice aura du mal à juger, et elle ne jugera pas sur la réalité, plus sur le rapport entre une réalité établie (difficilement "établissable" ou "établissible") et les textes législatifs de l'époque.
Sans nul doute que les militantes qui veulent défendre la parole libérée vont soutenir la fille, sans savoir plus que moi la réalité des faits, elles le feront parce qu'elles croiront que leur soutien à Coline (dont je ne remets nullement en cause la véracité des accusations, je n'en sais absolument rien) équivaut au soutien à leur cause, à savoir, libérer toutes ces femmes, ou plus largement (car pour l'affaire Olivier Duhamel, il ne s'agissait justement pas d'une femme), libérer toutes ces victimes de l'inceste, et plus généralement du viol sur mineur, de pouvoir s'exprimer, et aller jusqu'au bout, c'est-à-dire, jusqu'à la plainte judiciaire. Mais si Richard Berry était reconnu innocent, un tel soutien serait contreproductif à leur cause.
Il est nécessaire que la justice s'en mêle : jamais une tribune publique, un plateau de télévision, quelques colonnes dans la presse écrite, un message laconique dans un réseau social ne seront capables de faire la part du vrai et du faux de manière neutre et dépassionnée. Et même pas sûr que la justice soit capable de le faire trente à trente-cinq ans plus tard.
Il est dit qu'il n'existe que très rarement de fausses accusations, surtout si elles sont publiques, car la personne qui dénonce se met autant en danger que la personne accusée. Néanmoins, être dans une sorte de lutte à mort, pas la mort physique, bien heureusement, mais la mort médiatique, c'est-à-dire celle de la réputation, ultime atout d'un personnage public dans son métier, surtout entre père et fille, a de quoi questionner sur le devenir de la société.
On aurait tendance à dire trop naïvement : que les coupables soient condamnés et que les innocents soient mis hors de cause ! C'est malheureusement trop facile. Le pire, c'est que peut-être que les deux croient avoir intimement raison. Au-delà de la pertinence des souvenirs, de la rumination d'une fille contre son père, il y a ce fait indiscutable : l'immonde est là, quelque part, dans cette relation père-fille qui, hélas, fera l'objet d'incessantes discussions, du café du commerce jusqu'aux chaires les plus honorables de psychologie, au-delà des doutes terribles qui continueront à planer encore longtemps sur toute la famille.
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (03 février 2021)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
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Richard Berry et l’immonde
https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20210203-richard-berry.html
https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/richard-berry-et-l-immonde-230709
http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2021/02/03/38795835.html


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