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Alors Carcasse, de Mariette Navarro (éd. Cheyne), lu par Denis Lavant

Publié le 02 mai 2021 par Onarretetout

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Mariette Navarro a publié ce livre en 2011, Denis Lavant déjà en avait fait une lecture. Dix ans plus tard, à la Bibliothèque municipale de Lyon, pour l’anniversaire (40 ans) des éditions Cheyne, Denis Lavant revient à ce texte. Un pupitre, les feuilles sur le pupitre, et l’acteur dont dépassent la tête, au début coiffée d’un bonnet et d’un chapeau, les épaules, les bras et les mains de part et d’autre sur l’écran où je le vois. 

« Plusieurs aussi sont là au beau milieu de leur époque mais Carcasse particulièrement est au seuil ». Ces premiers mots situent exactement le temps, qui ne change pas. Non pas que tout soit arrêté, mais qu’il est impossible que Carcasse franchisse le seuil, entre dans cette époque où « plusieurs » s’agitent, « tracent des mouvements », vont là-bas. Carcasse ne laisse pas d’empreinte puisqu’il reste sur le seuil. Il cherche à comprendre. Mais c’est en dedans de lui que cela se passe. « Tout est troué » : les yeux, le gauche et le droit, les oreilles (ça entre par l’une et ça sort par l’autre), le nez et la bouche  par où l’air entre, gonflant les poumons. « Et l’air de son époque brûle et ne lui apprend rien ». Mais qui est donc Carcasse ? sinon cette voix qui naît des feuilles où les mots sont écrits et les franchit. Est-ce là le seuil ? Vous imaginez Carcasse, et les pensées qui lui viennent, à moins qu’il se trompe. C’est un corps fait de mots, os, peau, organes, pieds, et fluides, un corps avec une frontière et une cartographie, corps qui peut être roc. Peut être aussi montagne, volcan, et devenir caillou. Devenir fossile pour « laisser ici au moins un peu de soi ». ou « sable pour les plages à venir ». 

« Un jour de promenade quelqu’un seulement sentira un frisson sur sa peau ou entendra un grondement sourd ».

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J’avais entendu Denis Lavant dans un enregistrement dire le poème de Baudelaire, Une charogne, où « le ciel regardait la carcasse superbe / Comme une fleur s’épanouir ». Cette fois, Carcasse est la vie même, « surface maximale déployée contre le vent », « repère en immobilité ». Mais c’est la même voix, reconnaissable, qui porte si puissamment les textes. Et les feuilles tombent l’une après l’autre.


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