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Fela : the popular black president

Par Josephanganda
Fela : the popular black president

MUSICIEN CONTESTATAIRE, LIBERTAIRE ET POLYGAME.....

Lors d’une des fréquentes perquisitions de la Police à son domicile, Fela demanda à l’officier de lui permettre d’examiner l’herbe trouvée dans sa maison avant mise sous scellé. Il se jeta dessus, la mâcha, l’avala et but en rasade le whisky confisqué. Et ce fut ainsi qu’il mit la Police, cette fois-là, dans l’impossibilité de disposer des preuves pour le compromettre.

Pour les autorités et le régime en place au Nigeria, Fela était « un voyou », « un fumeur de chanvre indien », « un fauteur de troubles ». Les détenteurs du pouvoir voulaient le taire par tous les moyens et cherchaient à trouver des preuves, au besoin, les fabriquer pour parvenir à les condamner pour possession de drogue, de détournement des mineures et de trafic de devises.

Mais pour la population, et particulièrement celle de sa république de Kalakuta, Fela était le président noir, le grand prêtre, l’interprète et le roi de la musique noire, le vrai opposant, l’éveilleur de conscience et le défenseur de l’intérêt du peuple du Nigeria. Bref, l’homme du peuple, le chanteur le plus populaire au Nigeria.

En réalité, Fela, chanteur contestataire et libertaire, dérangeait le régime militaire sanguinaire et impitoyable. On sait le sort réservé aux opposants : pendaison de l’écrivain Ken Saro Wiwa et l’exil pour Sole Soyinka, Prix Nobel de Littérature.

Son engagement musical et social tient à l’histoire de sa famille et à sa trajectoire de chanteur itinérant.

Son arrière grand-père, traditionaliste, était anti-colonialiste. Mais son grand-père Canon J.J. Ransome Kuti devint Pasteur et Musicologue yoruba dans l’Eglise Protestante. Son père I.O. Ransome Kuti, également Pasteur, s’orienta dans l’enseignement et rendit de bons et loyaux services en qualité de Directeur. Madame Funmilayo Anikulapo Kuti, mère de Fela et amie du panafricaniste Kwame N’Krumah, admiratrice de Mao, était une véritable passionaria. Cette professeure, féministe, lutta dans les années 50 pour le droit de vote des femmes.

Fela était issu de la classe moyenne nigériane progressiste.

Il fit ses études de musique au Trinity College of Music de Londres et il en sortit diplômé. Pendant son séjour à Londres, il fut séduit par les jazzmen afro-américains Duke Ellington, Countie Basie, Charlie Parker, Coltrane pour ne citer que ceux-là. Ce fut à Londres qu’il créa avec son copain Wole Bucknor le groupe musical dénommé Koola Lobitos. Encore à Londres, il rencontra Remi Tayor, sa première future épouse.

Au retour au Nigéria, il réédita son groupe, fit du Highlife Jazz et récolta les succès.

En tournée aux Etats-Unis en 1969, Fela fut choqué par le capitalisme américain et les conditions de vie des noirs. Il fit connaissance de Sandra Smith, une militante proche de Malcom X et de Black Panthers, qui le convainquit de la nécessité de lutter contre le capitalisme américain partout dans le monde et de revenir aux racines de la musique africaine. Cette passionaria lui fit lire les ouvrages de Marcus Garvey, de Malcom X et de Kwamé N’Krumah.

De retour en 1970, Fela devint un autre homme. Il fit entourer sa concession d’une grille et proclama sa république de Kalakuta, école idéologique et carrefour de résistants négro-africains( Il y accueillit notamment Stockey Carmikael, leader de Black Panthers Party et ex-époux de Myriam Makeba, les leaders de l’ANC, Parti de Nelson Mandela) . Et il changea le nom de son groupe et créa un autre style de musique dit Afro-beat que ses fans finirent par comprendre et adopter puisqu’il véhiculait un message social et politique. Il déclencha une opposition contre les détenteurs du pouvoir le qualifiant de « Vagabonds in Power ». Et les Policiers qui avaient – lors de l’épreuve de force du 18 février 1977 - incendié sa république, défénestré sa mère, violé ses danseuses, il les traita de « Zombies ». Cette descente policière tragique fut la réaction du régime qui essuya le refus de Fela de prendre part au Festival Africain des Arts et de la Culture (FESTAC), considérant l’événement comme une aubaine médiatique pour régime corrompu.

Il utilisa la musique comme une arme contre la dictature et il sut recourir aux moyens légaux, appel aux avocats pour déjouer les manœuvres du pouvoir, pour obtenir les acquittements, les dédommagements. Il avait une légion d’intellectuels et de spécialistes aguerris dans son entourage.

Fela qui se baptisa « Anikulapo », nom qui signifie « Celui qui porte la mort dans sa gibecière », mourut le 3 août 1997, à l’âge de 58 ans, laissant derrière lui « The black président », film réalisé par le poète Ekow Oduro, son peuple en révolte et conscient du pillage de son pétrole, 60 disques , 28 veuves et une réputation : celle d’un chanteur contestataire, libertaire et polygame – peut-être ce dernier mot serait-il faible pour qualifier l’état de son harem……

Joseph Anganda

Animateur radio


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