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Dédommagement en cas de retard: quid des pays tiers?

Publié le 01 août 2008 par Duncan
CJCE, Arrêt du 10 juillet 2008, Aff. C-173/03, Schenkel.
Emirates_airlines La période est calme, l'activité de la Cour réduite. Bientôt les vacances (et pour moi aussi)...
Bref, l'occasion de revenir sur un arrêt non commenté à l'époque mais d'un grand intérêt à l'heure des départs en vacances.
La règlementation communautaire prévoit certains dédommagements en cas de retard ou d'annulation de vol (voir le règlement 261/2004). Mais cette règlementation est-elle applicable en cas de retard d'un vol retour d'un pays tiers? C'est l'enjeu de l'affaire Schenkel. M. Schenkel, citoyen allemand, a acheté des billets aller et retour en Allemagne en direction de Manille via Dubai avec la compagnie Emirates Airlines. L'aller se passe bien mais le vol retour, prévu le 12 mars, est annulé. Il partira finalement de Manille le 14. Il réclame une indemnité de 600€ (sur base des articles 5 et 7 du règlement), ce que la compagnie refuse. Selon elle, elle n'est pas un "transporteur communautaire" et n'est donc pas soumise à la règlementation.
La question posée à la Cour est donc en substance la suivante: l’article 3, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 261/2004, doit-il être interprété en ce sens qu’il s’applique à la situation d’un voyage aller-retour dans laquelle les passagers initialement partis d’un aéroport situé sur le territoire d’un État membre soumis aux dispositions du traité regagnent cet aéroport sur un vol au départ d’un aéroport situé dans un pays tiers?
La Cour va interprété la notion de "vol" présente à l'article 3 de la version allemande du règlement (ce qui n'est pas le cas dans toutes les versions linguistiques qui utilisent parfois un autre terme approchant).
La Cour note que le règlement n'offre pas de définition de cette notion, c'est donc à la Cour qu'il convient d'en établir une en s'inspirant de l'économie générale de la législation européenne.La Cour note qu'il "ressort de l’ensemble de ce paragraphe 1 [de l'article 3] que ledit règlement s’applique aux situations dans lesquelles les passagers empruntent un vol soit au départ d’un aéroport situé sur le territoire d’un État membre [point a)], soit au départ d’un aéroport situé dans un pays tiers et à destination d’un aéroport situé sur le territoire d’un État membre qu’à la condition que le transporteur aérien qui réalise le vol soit un transporteur communautaire [point b)]" (point 30).
Or, comme nous l'indiquions, Emirates Airlines Emirates ne dispose pas d’une licence octroyée par un État membre au titre de l’article 2, sous c), du règlement (CEE) n° 2407/92 du Conseil, du 23 juillet 1992, concernant les licences des transporteurs aérien et n'est donc pas un "transporteur communautaire". Bref, la seconde option présentée dans le paragraphe précédent est fermée.
Toutefois, M. Schenkel est parti d'un aéroport communautaire, Düsseldorf, la première option demeure ouverte. Mais le vol retour, depuis Manille, peut-il être considéré comme faisant partie du même vol, ce qui lui ouvrirait un droit à indemnisation? Un vol aller-retour est-il un "vol" ou deux "vols"? Assez logiquement, la Cour va considérer que la seconde solution doit prévaloir.
En effet, un vol suppose à la fois un départ initial et une destination finale, lieux qui ne peuvent pas être, dans l'économie du règlement, le même endroit (article 2, h définit la notion de destination finale comme celle qui figure sur le billet, ou la destination du dernier vol en cas de correspondances. In casu, Manille). Du reste, le règlement fait lui-même un distinction entre la notion de "voyage" et la notion de "vol", à l'article 8, ce qui signifie que ces deux notions ne se recouvrent donc pas. La Cour va également considérer qu'interpréter la notion de "vol" comme englobant l'aller et le retour reviendrait à rompre l'égalité de traitement des passagers (Elle donne un exemple assez embrouillé aux points 38 et s.).
"À la lumière de l’ensemble de ces éléments, il convient d’interpréter la notion de «vol» au sens du règlement n° 261/2004 de telle manière qu’il consiste, en substance, en une opération de transport aérien, étant ainsi, d’une certaine manière, une «unité» de ce transport, réalisée par un transporteur aérien qui fixe son itinéraire" (point 40).
Dès lors, le règlement "doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas à la situation d’un voyage aller-retour dans laquelle les passagers initialement partis d’un aéroport situé sur le territoire d’un État membre soumis aux dispositions du traité regagnent cet aéroport sur un vol au départ d’un aéroport situé dans un pays tiers. La circonstance que le vol aller et le vol retour fassent l’objet d’une réservation unique est sans incidence sur l’interprétation de cette disposition" (point 53).

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