L'ange bleu, film de Josef von Sternberg

L’ange bleu est le nom du cabaret où se produit Lola Lola (Marlene Dietrich). Les jeunes qui étudient Shakespeare au Gymnasium (le lycée) de la ville viennent la voir le soir et elle les reçoit volontiers dans sa loge. Le Professeur Rath - ce mot signifie conseil - (Emil Jannings) décide d’intervenir pour les punir de se complaire dans ce dévergondage.

Je pense que je n’aurais pas reçu ce film de la même façon il y a quelques années. L’image de Marlene Dietrich en bas et porte-jarretelles m’aurait sans doute conduit à la voir comme une femme fatale, à l’instar de celle qu’on trouve dans La femme et le Pantin (le roman de Pierre Louÿs et les films qui l’ont suivi). Aujourd’hui, je ne le vois pas de cette façon.

Lola s’amuse, certes, mais ce n’est que le Professeur qui succombe. Les jeunes, eux, s’amusent aussi. Elle ne lui promet rien. Il ignore tout de l’amour, de la vie. D’ailleurs, l’oiseau dans sa cage est mort au début du film. Il endosse une attitude moralisatrice au-delà de son rôle d’enseignant et sa morale ne l’aide pas à vivre. C’est, au fond, son ignorance qui le mène à la déchéance. Ce que disent les femmes dans ce film est à écouter avec attention et le clown silencieux qui traverse la loge dans un sens puis dans l'autre introduit du mystère et annonce la chute.

Le film est aussi un des premiers films parlants en Allemagne et cela se voit dans le jeu des comédiens. Emil Jannings est assez puissant dans son rôle, passant de ce personnage suffisant, imbu de son petit pouvoir et de sa notoriété, au pauvre clown objet de mépris ; le moment du maquillage annonce le tragique. Il joue comme un acteur de film muet, dans une forme d’excès d’expression. Marlene Dietrich, elle, joue son rôle avec naturel, elle donne l’impression d’être elle-même à l’écran : elle est déjà dans le cinéma de l’avenir, et c’est ce qui l’amènera à Hollywood.

J'ai vu ce film sur une proposition de MK2 Curiosity.