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Armance

Par Madame Charlotte

Armance Auteur : Stendhal
Titre original : Armance ou Quelques scènes d’un salon en 1827
1ère édition : 1818
Ma note : Armance

Résumé :
Octave et Armance ont à peine vingt ans sous la Restauration. Charles X règne et le ministère Villèle prépare une loi, votée en 1825, qui doit indemniser en partie les aristocrates émigrés et spoliés par la Révolution. Aristocrate et polytechnicien, Octave devient un bon parti, mais il rêve plutôt de se rendre utile ou de servir une cause héroïque. Il aime Mozart et la chimie, il suit passionnément avec Armance la guerre d’indépendance des Grecs contre les Turcs. Elle n’est d’abord qu’une parente pauvre, réduite au rôle de demoiselle de compagnie. Ils partagent une très haute idée de l’amour. Leur passion naît parmi les intrigues de haute et basse politique et se heurte au “fatal secret” dont Octave diffère l’impossible aveu.Premier roman, Armance est un chef-d’oeuvre discret, subtil, qui ouvre au lecteur bénévole le coeur même du Tendre stendhalien.

Mon avis :

Que dire d’Armance, roman de Stendhal publié en 1827 ? Tout d’abord qu’il s’agit d’une œuvre obscure, reposant sur un secret : un secret qu’on ne manque pas de découvrir en lisant les quelques pages consacrée à ce roman, qu’elles soient virtuelles ou non. Cette réponse au secret, cette première clé du roman, je l’ai donc découverte durant ma lecture - il était difficile d’y échapper. Mais quand j’ai lu ça et là que l’intérêt premier de ce livre résidait justement dans cet unique mystère et qu’il disparaissait une fois le secret découvert, je n’ai pas été d’accord … Tout simplement parce que coller sur le personnage l’étiquette d’”Impuissance” ne suffit pas tout à fait à rendre intelligibles son attitude et ses états d’âme. Ce n’est pourtant pas ce que laisse entendre une lettre à Mérimée datée du 23 Décembre 1826 qui suit de très le roman dans mon édition. Mais, comme dirait un mot de la préface qui me semble pertinent à propos de cette lettre :

“Stendhal y ramène son livre à un problème physiologique. Seulement, voilà, avec Stendhal, il faut se méfier. La seule façon sérieuse de le prendre, c’est de ne pas prendre au sérieux tout ce qu’il dit.”

Autant d’éléments qui viennent confirmer que le mot d’impuissance, de problème physiologique et sexuel n’épuisent en aucun cas la richesse du texte. Ce qui est intéressant chez Octave de Malivert, c’est son trouble intérieur, sa volonté de se cacher et d’échapper aux regards, son désir de déguisement. Au delà de tout ça, c’est surtout son rapport à la connaissance et à la philosophie. Jeune homme solitaire et étranger au monde qui l’entoure, il décide de se tourner vers l’étude de soi et l’introspection. Le problème est qu’il s’y enferme et tourne en rond, sans finalement réussir à se connaitre puisqu’après s’être interdit les jouissances de l’amour, il tombe amoureux - sans presque s’en rendre compte - d’Armance, sa cousine. Malgré les portes fermées à clé, malgré son repli sur lui-même, sa froideur et sa feinte indifférence à l’égard des autres. Pendant un moment, Octave tient bon, refusant de donner d’autre nom que celui d’”amitié” à sa relation avec Armance. Lui, il rêve d’un grand salon désert tapissé de grands miroirs, d’incognito, s’enferme à clé pour lire des journaux. Au final, l’attitude du personnage est plus qu’ambigüe : tout en revendiquant la lecture des matérialistes, en défendant la raison et la logique, Octave demeure impuissant, et dans un sens plus large cette fois-ci. Impuissant à comprendre et à contenir ses passions, qu’il déguise autant qu’il peut et qu’il refuse de nommer ; impuissant à se connaître véritablement, et cela parce qu’il refuse de s’ouvrir. Pourtant, l’espoir était présent, dans le roman, dans la figure d’Armance. Elle est tout à la fois une interlocutrice privilégiée avec qui il est possible, enfin, de bâtir de vrais dialogues, confidente à même de le comprendre ; objet de désir ; repoussoir. Elle peut, elle aussi, représenter autrui avec son regard qui juge … A la fin du livre, Octave choisira la fuite, plutôt que d’avouer son fatal secret, après bien des doutes et après avoir été abusé par une fausse lettre d’Armance.

Au final, je peux dire que j’apprécie davantage Armance rétrospectivement, maintenant que j’en ai terminé la lecture. En effet, j’ai terminé ce roman - pourtant très court !- assez difficilement. Pourtant, je ne regrette aucunement de l’avoir choisi ; c’est en y réfléchissant ensuite que je lui ai donné un sens. On sent que l’écriture de Stendhal est en pleine mutation : elle me semble en effet plus classique, moins incisive que dans Le Rouge et le Noir ou La Chartreuse de Parme, mais de temps à autres, on voit apparaître des piques, des allusions ou des motifs propres à l’univers stendhalien. Les notes de mon édition apportant des commentaires écrits en marge par l’auteur lui-même, montrent un travail en train de se faire : l’auteur cherche en effet l’obscurité, glisse des allusions codées, joue avec les épigraphes. Seulement, on peut penser que Stendhal, en jonglant avec tous ces procédés, a fini, dans Armance, par être un peu trop mystérieux … Et le lecteur peut facilement se perdre dans ce récit. Ce fut néanmoins une lecture particulièrement intéressante, ce roman préfigurant par de nombreux éléments les œuvres romanesques majeures du même auteur.
Invitation au décryptage, pour les amateurs.

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