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“Sur un quai en Normandie”: un portrait exquis du journaliste en imposteur dans lequel Carrére transcende les conventions de la dénonciation sociale

Publié le 19 février 2022 par Mycamer

Comme son confrère Michel Houllebecq l’avait déjà fait librement en adaptant son propre roman avec ‘La possibilité d’une île’ (2008), ce n’était qu’une question de temps avant que l’écrivain Emmanuel Carrère s’intéresser au cinéma. En effet, ce ‘Sur un quai en Normandie’ est précédé du documentaire ‘Retour à Kotelnich’ (2003) et d’une adaptation de son court roman ‘La Moustache’, ‘La moustache’ (2005), avec Vincent Lindon, qui fait pas Ils ont eu une première en Espagne.

De même, Carrère s’est toujours intéressé à l’écriture cinématographique, comme en témoigne sa participation à des séries telles que ‘Les Revenants’ ou ‘Collection Fred Vargas’, même si ‘En un dock de Normandie’ (dans l’original français, le titre correspond au nom du quai, Ouistreham) est son projet le plus ambitieux Jusqu’à maintenant.

L’histoire est basée sur le roman à succès ‘El Quai de Ouistreham’, dans lequel le journaliste Florence Aubenas effectue un processus de « journalisme gonzo » authentique, en relation directe avec les écrits de Tom Wolfe, Terry Southern et, bien sûr, Hunter S. Thompson, qui correspond à la création du terme, infiltrant un groupe de nettoyeurs sur le quai de Ouistreham mener une analyse des conditions d’emploi précaire et transformer leurs expériences et leurs conclusions en un roman d’une situation aussi générationnelle qu’universelle.

Au-delà de l’engagement social avec un grand Binoche

Intéressée par un projet qui, depuis sa parution, a déjà connu plusieurs adaptations théâtrales et radiophoniques, la comédienne Juliette Binoche considérait que l’écrivain, actuel représentant maximal de l’autofiction narrative et auteur d’œuvres aussi louangées et controversées que ‘L’adversaire’, ‘De la vie des autres’, ‘Limonov’ ou le récent ‘Yoga’ serait la personne idéale pour l’emmener à le grand écran.

Lors de son premier acte, Carrère suit clairement le livre de style de cinéastes tels que Ken Loach, Stephen Frears ou Mike Leigh, ou dans son pays, les frères Dardenne et Robert Guédiguian. Le réalisateur, qui signe le scénario avec Hélène Devinkjoue avec le spectateur en ne découvrant la véritable identité de son protagoniste que bien avant dans l’action, montrant que “Un quai en Normandie” n’est pas qu’un film compromis de plus et que son véritable intérêt réside dans le conflit interne de son personnage central et dans son rôle d’infiltrée et d’imposteuse.

Cela rapproche le résultat du corpus de l’œuvre de Carrère (on n’est pas si loin, par exemple, de ‘El adversario’, l’un de ses romans les plus célèbres, ou de documentaires comme ‘Ich Bin Enric Marco’ de Santiago Fillol et Lucas Bermal ; ni de ‘Perfect’ de James Bridges) et aux films des cinéastes les plus inclassables et hétérodoxes, comme Oliver Assayas. En tout cas, le film résiste au classement et cela joue en sa faveur, notamment dans la seconde moitié de son métrage.

Il est remarquable que le réalisateur soit attiré non seulement par la voix et le point de vue de son protagoniste, mais surtout le sentiment de communauté des travailleuses, ce qui rapproche son œuvre de classiques tels que « Le sel de la terre » (Herbert J. Biberman, 1954) ou « Riz amer » (Giuseppe de Santis, 1949). Le regard féminin rappelle aussi des titres récents du cinéma latino-américain, mineurs mais estimables, comme le brésilien ‘The Second Mother’, le chilien ‘La Nana’ ou le mexicain ‘La camarista’. Pourtant, le regard particulier de son réalisateur finit par l’emporter sur tout moule de simple dénonciation sociale.

‘Sur un quai en Normandie’ : l’impossible recherche de la vérité

Il convient de noter le travail de Juliette Binoche au l’un des meilleurs rôles de sa récente carrière. Le film, c’est aussi ses gestes, ses regards, ses nuances délicates et dosées. Remarquables sont les compositions du reste du casting, indispensables pour donner crédibilité et complicité aux scènes de groupe.

Cannes 2021 : les 16 meilleurs films d'une édition de haut niveau, marquée par la nécessité d'un retour triomphal sous l'ombre du COVID-19

<img alt="Cannes 2021 : les 16 meilleurs films d'une édition de haut niveau, marquée par la nécessité d'un retour triomphal sous l'ombre du COVID-19" src="https://i0.wp.com/then24.com/wp-content/uploads/2021/12/1640216116_854_Las-18-mejores-peliculas-de-2021.jpeg?w=1200&ssl=1" data-recalc-dims="1" />

Carrère conclut le film par un double épilogue marqué par la ambiguïté: d’une part, il justifie l’existence du journalisme social et la figure de l’infiltré comme imposteur, mais aussi, dans la scène finale, interroge sa nature humaine, comme si le film lui-même doutait de sa pertinence même et de son honnêteté , chose aussi impudente qu’inhabituelle dans ce type de cinéma, toujours empreint d’une certaine supériorité morale.

Que personne ne s’attende à obtenir une réponse claire et un message définitif et apaisant de ‘En un dock de Normandía’; plutôt une réflexion sur un événement de vie marqué par l’incertitude, le déracinement et, en somme, recherche impossible de la vérité absolue. Tout cela se reflète dans ses images de manière choquante et transparente.

Comme son confrère Michel Houllebecq l’avait déjà fait librement en adaptant son propre roman avec ‘La possibilité d’une île’ (2008), ce n’était qu’une question de temps avant que l’écrivain Emmanuel Carrère s’intéresser au cinéma. En effet, ce ‘Sur un quai en Normandie’ est précédé du documentaire ‘Retour à Kotelnich’ (2003) et d’une adaptation de son court roman ‘La Moustache’, ‘La moustache’ (2005), avec Vincent Lindon, qui fait pas Ils ont eu une première en Espagne.

De même, Carrère s’est toujours intéressé à l’écriture cinématographique, comme en témoigne sa participation à des séries telles que ‘Les Revenants’ ou ‘Collection Fred Vargas’, même si ‘En un dock de Normandie’ (dans l’original français, le titre correspond au nom du quai, Ouistreham) est son projet le plus ambitieux Jusqu’à maintenant.

L’histoire est basée sur le roman à succès ‘El Quai de Ouistreham’, dans lequel le journaliste Florence Aubenas effectue un processus de « journalisme gonzo » authentique, en relation directe avec les écrits de Tom Wolfe, Terry Southern et, bien sûr, Hunter S. Thompson, qui correspond à la création du terme, infiltrant un groupe de nettoyeurs sur le quai de Ouistreham mener une analyse des conditions d’emploi précaire et transformer leurs expériences et leurs conclusions en un roman d’une situation aussi générationnelle qu’universelle.

Au-delà de l’engagement social avec un grand Binoche

Intéressée par un projet qui, depuis sa parution, a déjà connu plusieurs adaptations théâtrales et radiophoniques, la comédienne Juliette Binoche considérait que l’écrivain, actuel représentant maximal de l’autofiction narrative et auteur d’œuvres aussi louangées et controversées que ‘L’adversaire’, ‘De la vie des autres’, ‘Limonov’ ou le récent ‘Yoga’ serait la personne idéale pour l’emmener à le grand écran.

Lors de son premier acte, Carrère suit clairement le livre de style de cinéastes tels que Ken Loach, Stephen Frears ou Mike Leigh, ou dans son pays, les frères Dardenne et Robert Guédiguian. Le réalisateur, qui signe le scénario avec Hélène Devinkjoue avec le spectateur en ne découvrant la véritable identité de son protagoniste que bien avant dans l’action, montrant que “Un quai en Normandie” n’est pas qu’un film compromis de plus et que son véritable intérêt réside dans le conflit interne de son personnage central et dans son rôle d’infiltrée et d’imposteuse.

Cela rapproche le résultat du corpus de l’œuvre de Carrère (on n’est pas si loin, par exemple, de ‘El adversario’, l’un de ses romans les plus célèbres, ou de documentaires comme ‘Ich Bin Enric Marco’ de Santiago Fillol et Lucas Bermal ; ni de ‘Perfect’ de James Bridges) et aux films des cinéastes les plus inclassables et hétérodoxes, comme Oliver Assayas. En tout cas, le film résiste au classement et cela joue en sa faveur, notamment dans la seconde moitié de son métrage.

Il est remarquable que le réalisateur soit attiré non seulement par la voix et le point de vue de son protagoniste, mais surtout le sentiment de communauté des travailleuses, ce qui rapproche son œuvre de classiques tels que « Le sel de la terre » (Herbert J. Biberman, 1954) ou « Riz amer » (Giuseppe de Santis, 1949). Le regard féminin rappelle aussi des titres récents du cinéma latino-américain, mineurs mais estimables, comme le brésilien ‘The Second Mother’, le chilien ‘La Nana’ ou le mexicain ‘La camarista’. Pourtant, le regard particulier de son réalisateur finit par l’emporter sur tout moule de simple dénonciation sociale.

‘Sur un quai en Normandie’ : l’impossible recherche de la vérité

Il convient de noter le travail de Juliette Binoche au l’un des meilleurs rôles de sa récente carrière. Le film, c’est aussi ses gestes, ses regards, ses nuances délicates et dosées. Remarquables sont les compositions du reste du casting, indispensables pour donner crédibilité et complicité aux scènes de groupe.

Cannes 2021 : les 16 meilleurs films d'une édition de haut niveau, marquée par la nécessité d'un retour triomphal sous l'ombre du COVID-19

<img alt="Cannes 2021 : les 16 meilleurs films d'une édition de haut niveau, marquée par la nécessité d'un retour triomphal sous l'ombre du COVID-19" src="https://i0.wp.com/then24.com/wp-content/uploads/2021/12/1640216116_854_Las-18-mejores-peliculas-de-2021.jpeg?w=1200&ssl=1" data-recalc-dims="1" />

Carrère conclut le film par un double épilogue marqué par la ambiguïté: d’une part, il justifie l’existence du journalisme social et la figure de l’infiltré comme imposteur, mais aussi, dans la scène finale, interroge sa nature humaine, comme si le film lui-même doutait de sa pertinence même et de son honnêteté , chose aussi impudente qu’inhabituelle dans ce type de cinéma, toujours empreint d’une certaine supériorité morale.

Que personne ne s’attende à obtenir une réponse claire et un message définitif et apaisant de ‘En un dock de Normandía’; plutôt une réflexion sur un événement de vie marqué par l’incertitude, le déracinement et, en somme, recherche impossible de la vérité absolue. Tout cela se reflète dans ses images de manière choquante et transparente.

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