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Sissi à Madère en 1860 — La quinta Vigia — Cinq illustrations

Publié le 09 avril 2022 par Luc-Henri Roger @munichandco

L'ancienne quinta Vigia a été construite au début des années 1840 par le marchand britannique Richard Davies. Elle fut louée à l'impératrice Elisabeth d'Autriche du 29 novembre 1860 au 28 avril 1861. Sissi est ensuite revenue à Madère entre le 23 décembre 1893 et le 4 ou le 18 février 1894, mais en séjournant au Reid's Palace Hotel.

Voici une traduction de la description de la vigia dans le guide Madeira, Its Scenery, and how to See it (Stanford, 1882)

La "Vigia", construite et aménagée par M. Richard Davies, est une belle résidence, entièrement meublée, située sur les falaises surplombant le rocher Loo, au milieu d'un beau jardin. L'actuelle impératrice d'Autriche y a passé l'hiver de 1860. La maison est grande, confortable et pittoresque. Les trois salles de réception du rez-de-chaussée s'ouvrent sur une véranda dont les piliers en treillis sont couverts de lianes exotiques d'une grande beauté, qui poussent et fleurissent avec une abondante luxuriance - l' Allamanda Schottii, avec ses grandes cloches dorées ; le Rhyncospermum jasminoides, avec son nuage exquis de fleurs étoilées blanches semblables à des fées, le Combritum pourpre aux riches teintes, le Tecoma jasminoides, les magnifiques Bougainvilliers et d'innombrables autres. Les chambres à coucher sont nombreuses, grandes et très confortablement meublées. Une salle de billard se trouve dans le jardin et un grand mirante sur la falaise offre une vue magnifique sur toute la baie, le Brazen Head et les Desertas. L' Araucaria excelsa, planté pour la première fois à Vigia, a été introduit par M. William F. M. Copeland. Ce palmier et un palmier-chou ont atteint une grande taille en quelques années seulement. Ce jardin regorge d'arbres et de plantes de tous les climats.

Dans un article intitulé Elisabeth d'Autriche. Étude historique et psychiatrique publié dans le journal de psychiatrie appliquée L'Hygiène mentale (4 avril 1934), le Dr Folly d'Auxerre décrit le premier séjour de l'impératrice à Madère de la manière suivante :

[...] De nouveaux nuages s'amoncellent sur la maison de Hasbourg. C'est la guerre d'Italie qui éclate, suivie des défaites de Magenta et de Solférino. François-Joseph perd la Lombardie, la plus riche de ses provinces. Il est accablé par la catastrophe; il devient sombre, ombrageux et méfiant. Il se voit déçu et trompé par son entourage. Une opposition très vive se forme contre l'incapacité des dirigeants : diplomates, généraux, intendants et de la bureaucratie. Au lieu de s'ouvrir à sa femme, qui eût été son plus sûr refuge, François-Joseph rentre en lui-même ; il ne veut pas avouer les erreurs commises, et à part quelques personnalités, rien n'est changé dans l'empire. Rien ne sera changé non plus dans l'existence de l'impératrice. Entre les époux, le désaccord s'envenime et Elisabeth s'y épuise rapidement. Elle retombe dans une nouvelle crise de dépression. On craint un début de tuberculose ; d'autres pensent à une affection gynécologique. Mais le moral de la souveraine est encore plus touché que le physique. Cette fois, le désenchantement est complet. L'empereur a perdu tout prestige aux yeux de sa femme. Il lui apparaît médiocre, inerte, irrésolu, incapable de de secouer la tyrannie maternelle, amoindri et comme empêtré dans son rôle de souverain. Il a perdu désormais, et d'une façon définitive, l'amour de sa femme et celle-ci se sépare de lui.

Sur le vaisseau qui l'emmène à Madère, Elisabeth se reprend. Elle est arrachée à son milieu déprimant, où on l'avait réduite au silence, à l'isolement, la traitant en enfant, ne voulant pas la prendre au sérieux. Son mari, par ordre de sa mère, devait toujours rester " l'empereur ", même à l'égard de sa femme. Il la tenait donc constamment à une distance courtoise, sans un seul épanchement de confiance et d'intimité. On devine ce qu'une femme vibrante et sensible comme Elisabeth a pu souffrir de l'attitude de son mari et de son entourage.

Sous l'influence du climat merveilleux de Madère, elle ressuscite comme par enchantement. Elle fait de longues promenades en voiture, ou s'isole, dans un bosquet de mimosas, attenant à sa villa, avec ses auteurs préférés : Dante, Shakespeare, J.-J. Rousseau, Byron, Shelley, Keats, Schopenhauer, George Sand, Lamartine, Leopardi, Henri Heine, qu'elle lit dans le texte; car elle parle couramment cinq langues. Elle se complaît dans la lecture de ces écrivains qui ont fortement exprimé l'incurable misère de la destinée humaine, l'attrait décevant du monde invisible, la tragique énigme de la souffrance et de la mort, le néant des grandeurs sociales, la beauté des libres énergies, les droits imprescriptibles et sacrés de la conscience individuelle, enfin, l'obligation qui prime toutes les autres, celle de la sincérité à l'égard de soi-même.

Elle engage une correspondance active avec son cousin, Louis de Bavière, et reçoit, pendant son séjour la visite de sa sœur Hélène, princesse de Tour et Taxis, qui F apaise et la réconforte. La vie réserve bien des mécomptes, et les choses ne sont jamais ce qu'on les avait rêvées, lui dit sagement Hélène. Elle écoute avec calme les conseils de sa sœur.

Au bout de six mois, la cure de soleil, de repos et de liberté a fait son œuvre. Elle est rétablie et rentre à Vienne, qui lui fait une réception chaleureuse. [...]

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Sissi à Madère en 1860 — La quinta Vigia — Cinq illustrations

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