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Grand Paris Express : un florilège d’innovations

Publié le 29 août 2022 par Fabrice Rault @fabrice_rault

Lancé en 2010 pour répondre aux défis urbains du XXIe siècle, le Grand Paris Express (GPE) est un véritable laboratoire où les parties prenantes donnent libre cours à leurs capacités d'innovation pour concevoir la ville de demain et ses mobilités.

Avec 200 kilomètres de réseau et 68 gares qui seront autant de pôles d'activité et de vie, le GPE est le plus grand projet d'aménagement d'Europe. Sa finalité est vaste : renforcer la place de Paris comme métropole de rang mondial, désenclaver les territoires, réduire les inégalités, tout en intégrant progrès technique et développement durable. Pour ce faire, les acteurs impliqués font assaut de solutions nouvelles, en utilisant le GPE comme un " laboratoire ", cherchant les réponses techniques les plus pertinentes tout en réduisant l'impact sur l'environnement et la consommation des ressources.

Développement durable, énergies, numérique, art : une approche universelle.

La Société du Grand Paris (SGP), organisme public en charge du projet, a fait de l'innovation un levier pour inciter toutes les parties prenantes à concevoir la mégapole de demain dans une perspective de transition écologique. Le futur réseau met donc à l'épreuve les entreprises impliquées pour conjuguer urbanisme et respect de l'environnement dans la version finale du Grand Paris, attendu aux environs de 2030[1]. Comme l'explique Jean-François Monteils, président de la SGP[2], " Ce qui va rester, pour les gens, ce sont les gares et les quartiers qui les entoureront, la façon dont ils seront organisés, comment les transports se répartiront autour, comment l'intermodalité sera organisée. "

C'est pour cette raison que plusieurs des futures gares s'inscrivent dans une démarche nationale d'EcoQuartier, portée par le ministère de la Transition Ecologique et Solidaire et le ministère de la Cohésion des Territoires, se fixant des objectifs environnementaux exemplaires et particulièrement exigeants (utilisation de matériaux biosourcés, faible consommation énergétique, végétalisation pour créer des îlots de fraîcheur[3]). Certains des acteurs dans la construction du supermétro n'en sont d'ailleurs pas à leur coup d'essai en termes de " laboratoire vert " et construction d'EcoQuartier. Avec la création de La Vallée à Chatenay-Malabry, véritable ferme urbaine, la société Eiffage a mis en œuvre " un mode constructif innovant ", avec des actions pour le déploiement dans l'agriculture urbaine et l'accompagnement des agriculteurs vers de nouvelles solutions énergétiques, le tout dans une démarche " écologique de circuit-court et labellisé[4] ", qui veut aller au-delà de la seule réduction d'impact des travaux sur les milieux naturels. Une priorité également au sein de la SGP qui met en place des " mesures de compensation écologique " pour les parties émergées du métro francilien, telles que la création de nouvelles mares, autour desquels pourront prospérer[5] des amphibiens, des insectes et des oiseaux, ou encore la campagne de reboisement sur la ligne 15 Sud, permettant la plantation de 16 800 arbres[6].

Toujours dans l'idée de combiner ville future et développement durable, le Grand Paris de demain réduira au maximum les énergies fossiles, et recourra à l'énergie électrique, dans une perspective d'exploitation optimisée des ressources, une approche partagée d'ailleurs avec la Ville de Paris. Cette dernière a en effet attribué fin 2021 un contrat de 10 ans à l'opérateur Cielis[7], JV d'EDF et Eiffage, dans l'objectif notamment de réduire de 30% la consommation électrique liée à l'éclairage public, tout en revalorisant les espaces urbains.

Pour leur part, les architectes du GPE s'inscrivent dans une logique similaire, par le recours à l'éclairage naturel pour amener la lumière extérieure à l'intérieur des gares, ou en privilégiant le recours aux LED, qui consomment 90% d'énergie en moins que les ampoules classiques. L'architecte de la future gare Gustave-Roussy, Dominique Perrault, projette sur le réseau du GPE une vision de " traversée futuriste, cosmique et lumineuse[8] " : une gare profonde de 48 mètres connectant le monde du dessus au monde du dessous qui permettra aux utilisateurs d'être en contact avec l'air ambiant et la lumière extérieure dès leur sortie des rames du métro.

Pour terminer avec le secteur énergétique, la tendance est à optimiser les logiques de recyclage et de circuit court. Ainsi, pour alimenter les futurs trains du réseau, il est envisagé de récupérer environ 30% de l'énergie lors du freinage des convois.

Villes et métro connectés, le GPE offrira à ses utilisateurs une infrastructure numérique unique en Europe qui se déploiera sur l'ensemble du réseau, notamment avec des rames équipées de réseaux cellulaires mobile et wifi grâce au déploiement de la fibre optique dans tout le réseau du GPE[9]. " Plus de 175.000 kilomètres de fibre optique seront disponibles sous les nouvelles lignes de métro dès leur ouverture. Le réseau ainsi enterré permettra d'offrir des services d'une grande fiabilité ", a annoncé la SGP dans un communiqué [10]. Ce réseau fibre sera accompagné de mini data centers, semi-enterrés le long du futur métro. Enfin, plus innovant encore, la SGP prévoit d'intégrer des serres chauffées autour de ces data centers, pour valoriser les calories perdues et recycler la chaleur rejetée dans l'atmosphère[11].

La performance des acteurs impliqués sur le terrain

Mais le Grand Paris 2035 est encore en construction, et c'est bien pour l'instant aux acteurs œuvrant au quotidien à la construction du réseau qu'incombe l'effort de répondre à des problématiques de tous les jours, de la gestion des déchets aux nuisances sonores en passant par les émissions nocives, là aussi en testant des solutions nouvelles.

Le défi est énorme : en 10 ans, le GPE générera en effet 45 millions de tonnes de déblais[12]. Or la SGP a l'ambition de promouvoir l'économie circulaire et la valorisation des matériaux à hauteur de 70% de leur volume global. Pour ce faire, elle fait appel à des start-ups telles que Hesus[13], qui propose des services de valorisation des terres excavées et intervient sur la quasi-totalité des lots du GPE. " Hesus va trouver, en fonction de la pollution de ces terres, différents centres de valorisation ou même des chantiers ", explique Emmanuel Cazeneuve, PDG de la société. La solution proposée permet d'assurer en temps réel le suivi des déblais, précisant notamment " les origines, la qualité et les destinations finales " de ceux-ci sur chaque lot et de veiller au respect des règlementations[14].

Côté émissions nocives, avec la masse de camions mobilisés, la prochaine étape est de transformer intégralement leur motorisation : " Sur la Ligne 16, nous avons proposé (...) d'investir dans une flotte de camions qui roulent au gaz (...). Notre but ici est de réduire notre empreinte carbone, pour éviter d'avoir recours aux camions diesel habituels ", détaille Pascal Hamet, directeur du projet du lot 1 de la Ligne 16 chez Eiffage Infrastructure[15]. L'entreprise, précurseur dans le domaine du transport bas carbone, avait également mis en place un partenariat avec le Commissariat à l'énergie atomique, pour " développer des camions électriques avec pile à combustible ", comme le détaillait dans un communiqué Alain Bertoni[16], directeur du matériel d'Eiffage Génie Civil. C'est chose faite depuis un peu moins d'un an ! En lien avec le constructeur Volvo, Eiffage à mis en service des véhicules 100% électriques sur le chantier du GPE, notamment le premier camion électrique européen en BTP[17]. Un coup double donc puisque cette innovation conjugue réduction des nuisances sonores et élimination des gaz d'échappement.

On peut encore citer cette pièce maitresse des chantiers que sont les tunneliers, qui assurent simultanément le creusement, l'évacuation des déblais, et la pose des voussoirs qui constituent le tunnel[18] lui-même. Véritables usines mobiles de 1500 tonnes, ils matérialisent la progression des 200 kilomètres de ligne nouvelle, chacun étant taillé sur mesure en fonction des caractéristiques des sous-sols qu'il doit traverser. Là aussi, la dimension environnementale est au cœur du dispositif, par exemple avec le béton fibré utilisé pour les voussoirs (les " anneaux " constituant le tunnel lui-même) du lot 1 de la ligne 16, procédé depuis généralisé à l'ensemble du chantier, avec un bilan environnemental de l'ordre de 50% inférieur à celui d'un béton traditionnel. Pour les futurs marchés de génie civil à venir, la SGP envisage d'ailleurs de nouvelles clauses environnementales pour que 100% de béton bas-carbone soit utilisé, contre 70% actuellement.

Lieux de vie et de travail, espaces de mobilités, d'interactions et de réconciliation entre la ville et la nature, dans le GPE tout est occasion d'innovations pour les parties prenantes. Compte tenu de l'ampleur et de la notoriété des réalisations, les performances des entreprises impliquées devraient constituer pour elles une carte de visite particulièrement séduisante dans la conquête de nouveaux marchés.

[1] https://www.ville-montrouge.fr/1526-embarquez-pour-le-grand-paris-express-en-2025.htm?msclkid=d0cdf9b0af3611ec91197d77de5703d6

[2] https://www.lejournaldugrandparis.fr/j-f-monteils-la-sgp-a-mis-en-place-des-dispositifs-inedits-dans-le-fonctionnement-de-laction-publique-en-france/

[3] https://www.gpmetropole-infos.fr/grand-paris-express-quatre-finalistes-pour-lecoquartier-de-cachan/?msclkid=73c48fc3af3711ecb012a20aaa738e76

[4] https://www.batiactu.com/edito/eiffage-livre-plus-haute-tour-structure-bois-france-62117.php?msclkid=13eb7664aa0611eca92844f09b433640

[5] https://www.societedugrandparis.fr/gpe/actualite/limpact-sur-la-biodiversite-lart-de-la-mesure-3335

[6] https://lesjoyeuxrecycleurs.com/recyclage-a-paris/le-projet-du-grand-paris-une-future-ville-durable/

[7] https://www.lemoniteur.fr/article/citelum-et-eiffage-remportent-le-marche-pour-l-eclairage-de-paris.2173572

[8] https://bitume.media/bati/grand-paris-express-dominique-perrault-ivan-navarro-en-tandem-pour-la-future-gare-villejuif-institut-gustave-roussy?msclkid=6b907c21ac4211ec9084638b0dcceae2

[9] https://www.excelforma.fr/les-choix-du-grand-paris-express-pour-offrir-aux-voyageurs-un-acces-fluide-et-constant-a-internet/?msclkid=164a17bdab5f11ec941bbbafa1140e6f

[10] https://www.lefigaro.fr/flash-eco/fibre-optique-la-ratp-remporte-un-contrat-de-500-millions-d-euros-pour-le-grand-paris-express-20210924

[11] https://www.lemoniteur.fr/article/des-serres-chauffees-par-des-data-centers-le-long-du-futur-metro.504329

[12] https://grandparisdurable.org/2020/04/21/grand-paris-express-la-gestion-des-deblais-au-coeur-des-chantiers/?msclkid=c72ef2a1aa0311ec980133dfc3a7dceb

[13] https://www.batiweb.com/actualites/developpement-durable/logistique-et-valorisation-hesus-accompagne-les-entreprises-dans-la-gestion-de-leurs-deblais-de-chantier-34775?msclkid=51f1a4f5aa9c11ec852b3c29b98d4a46

[14] https://www.batiweb.com/actualites/developpement-durable/logistique-et-valorisation-hesus-accompagne-les-entreprises-dans-la-gestion-de-leurs-deblais-de-chantier-34775?msclkid=f6db61adab7111ec8b21e866e7717540

[15] https://www.sensemaking.fr/Une-histoire-d-ingenieurs-dans-les-entrailles-de-l-Ile-de-France_a439.html?msclkid=d13a38cdaa0011ecb361a656ab9cde36

[16] https://www.franceroutes.fr/actualites/des-volvo-fh-gaz-pour-le-grand-paris-express/?msclkid=67455925ab8a11ecb24c463466351787

[17] https://www.societedugrandparis.fr/gpe/actualite/le-premier-camion-electrique-europeen-en-btp-est-sur-le-grand-paris-express-3233?msclkid=3f81070cab8f11ecb37ca685f3812467

[18] https://www.societedugrandparis.fr/chantier/tunnelier#:~:text=Ces%20engins%20impressionnants%20progressent%20%C3%A0,constituent%20le%20rev%C3%AAtement%20du%20tunnel.


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