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Les cinq poèmes de Nezâmi (1140-1220)

Par Fabien Francoperse


Les cinq poèmes de Nezâmi (1140-1220)

Les cinq poèmes de Nezâmî sont l'une des plus célèbres œuvres de la littérature médiévale persane. A la fois recueil de poèmes, de textes issus du folklore et ouvrage philosophique, ils ont été recopiés, enrichis, ornés maintes et maintes fois au cours des siècles grâce à des calligraphies, des enluminures et des peintures miniatures. L'un des textes les plus célèbres de ce recueil est l'histoire de Khosrow et Chirine, racontant la vie tumultueuse d'un souverain perse du VII ième siècle, amoureux d'une belle princesse, fille de la reine d'Arménie ; en quelque sorte le Roméo et Juliette perse. Ce livre serait à l'origine du conte des milles et une nuits.

Il est étonnant de voir qu'en pleine période médiévale persane, durant laquelle l'homme avait droit de vie et de mort sur sa ou (ses) femme(s), Nezâmî rend l'amour sacré, prône dans ses poèmes l'érotisme à égalité de consentement et de contentement.

A l'aube, quand le roi s'éveilla, il vit à ses côtés ce dattier sans épine qu'était Chirine.

En voyant sa jeune mariée son âme s'épanouit et, aussitôt il enfourna ce bon pain qu'était Chirine.

Les baisers de sa belle épouse, pareils à un vin velouté, le libérèrent vite de la torpeur.

Epanouie comme un bouquet de roses, Chirine lui déversa de ses lèvres le vin du bonheur.

Elle mit ses tresses noires autour de son cou et pressa ses deux seins de grenade sur sa poitrine.

Comme la violette à l'oreille de l'anémone, il ne faut plus attendre, lui murmura Chirine.

Lorsque le nuage dévoila toute la beauté de la lune, on vit le roi perdre toute patience.

Oui, contempler la beauté égare la raison, comme le vin de Chine fit perdre à Mani conscience.

Ivre de vin et d'amour, le roi se mit à piller cette province qu'était sa bouche sucrée.

Jamais, le roi n'avait bu plus doux vin matinal, ni goûté plus béni matinée.

Il commença, d'abord à cueillir ses fleurs, espérant ouvrir le sourire de sa rose.

Puis, il entonna pour elle son chant d'amour, s'invitant à goûter aux fruits de sa fraîcheur éclose.

Il se délecta du pommier de son menton, du jasmin de sa joue tout en caressant la grenade de ses seins.

Au cours de ses ébats, tantôt la colombe échappait au faucon, tantôt elle se posait en son sein.

Parfois, grisée par ce jeu délicieux, la douce colombe venait s'abriter sur sa forte poitrine.

Dans cette joute de la biche et du lion, le roi prit enfin le dessus sur Chirine.

Et surprenant la gardienne du trésor, de son rubis il déflora Chirine et le sceau de sa cornaline.

Ainsi, de son cœur il délivra la peine, et de l'hymen de cette rose chassa enfin la poussière.

... Ronsard et Du Bellay peuvent aller se rhabiller !


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