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La suite que personne n'attendait...nanar, ou pas nanar ?

Par Damien Barthel

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Spoilers !

Encore une fois, un film venant tout juste (le 20 janvier dernier) d'être rediffusé est à l'honneur sur le blog. Si vous m'aviez demandé, il y à 10 ans, si j'avais l'intention d'aborder ce film ici, j'aurais répondu un non si tonnant et vibrant qu'on l'aurait sans doute entendu de la face cachée de la Lune. Mais que voulez-vous, à force de voir et revoir certains films qui, pourtant, ne mériteraient vraiment pas tant d'honneurs (je revois ce film à chaque diffusion TV, ne l'ayant pas en DVD, et il passe relativement souvent depuis que la TNT existe ; avant, c'était plus espacé), on se prend à s'attacher à eux, d'une certaine manière. J'ai vraiment hésité, comme pour Tremblement De Terre récemment, à classer ce film dans les nanars. Je ne l'ai pas fait pour le film catastrophe avec Heston, mais c'était de justesse. Je le fais avec ce film de guerre, et là aussi, c'est de justesse. Disons que je devrais créer une catégorie 'nanars polémique', comme sur Nanarland, et dans laquelle je rangerais les films que je sais ne pas être très bons, des films à la limite du nanar, sans en être vraiment. Et des films que j'aime beaucoup malgré leurs évidents défauts. Car des défauts, ce film, par exemple, en possède quelques uns, des sévères. 

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Mais allez, je l'aime bien, ce film, tout de même ! Sorti en 1978, il s'appelle L'Ouragan Vient De Navarone (Force 10 From Navarone en VO) et est réalisé par Guy Hamilton, réalisateur britannique connu essentiellement pour avoir signé quatre James Bond (dont deux des meilleurs, Goldfinger et Vivre Et Laisser Mourir), mais aussi La Bataille D'Angleterre, Meurtre Au Soleil et Le Miroir Se Brisa (deux adaptations d'Agatha Christie). Le film est une adaptation du roman du même nom, signé Alistair McLean, et est aussi une sorte de suite des Canons De Navarone (aussi une adaptation d'un roman du même auteur, le film date de 1961). Je dis une sorte de suite car en dehors du fait que les deux personnages principaux sont les mêmes, et d'un prologue qui résume le premier film, il n'y à rien à voir dans les intrigues des deux volets. Vous pouvez voir ce film sans avoir vu le précédent, et tout piger tout de même. Il est bien entendu préférable de voir Les Canons De Navarone tout de même, ne serait-ce que pour une seule raison : ce film de Jack Lee Thompson, avec Gregory Peck, David Niven et Anthony Quinn, est un des meilleurs putains de films de guerre de son époque, un grand spectacle remarquable qui fut à sa sortie un triomphe au box-office. 

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Ce qui ne fut pas le cas de la "suite" réalisée par Hamilton. A sa sortie, L'Ouragan Vient De Navarone, malgré son affiche alléchante (j'y reviens), sera un échec commercial et critique, un four monstrueux. Le film ne deviendra culte que par la suite, et a été depuis assez réhabilité. Pas totalement réhabilité, mais disons que le film est bien plus apprécié désormais qu'à sa sortie. Il faut dire qu'il y à de quoi satisfaire les amateurs de bons divertissements du dimanche soir : le casting est, comme je l'ai dit, réussi, et on y trouve du suspense et de l'action à gogo, et des scènes vraiment réussies. Niveau casting, on a Robert Shaw (qui mourra six mois après la fin du tournage, et je crois, juste après la sortie britannique du film) qui reprend le rôle tenu par Gregory Peck dans le premier film ; Edward Fox, qui reprend celui tenu par David Niven dans le premier film (Peck et Niven étaient trop âgés pour reprendre leurs rôles ; l'action de ce second volet se situe quelques mois après celle du premier volet, mais 17 ans séparent les deux films !) ; Harrison Ford qui, à l'époque, sortait du succès de La Guerre Des Etoiles ; Carl Weathers, célèbre à l'époque pour son rôle dans Rocky ; Barbara Bach - alias Mme Ringo Starr - et Richard Kiel, qui tous deux ont joué dans L'Espion Qui M'Aimait (un des meilleurs James Bond, et le plus récent à l'époque) ; et Franco Nero, connu pour avoir joué Django dans le western spaghetti du même nom, dans les années 60. On notera aussi Michael Byrne dans le rôle d'un officier nazi ; dans Indiana Jones Et La Dernière Croisade (1989), ce même acteur jouera un rôle identique d'officier nazi, toujours face à Harrison Ford ! Notons aussi que Shaw a joué dans un James Bond, Bons Baisers De Russie, et Edward Fox aussi (le non-officiel Jamais Plus Jamais).

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L'action de ce film se passe en 1943. Mallory (Shaw) et Miller (Fox), héros de l'opération Navarone, sont réquisitionnés par leur Etat-Major pour une nouvelle mission : débusquer et mettre définitivement hors d'état de nuire un espion travaillant, en Yougoslavie, pour les nazis, en se faisant passer pour un capitaine de la résistance locale, Lescovar. Sous ce nom d'emprunt se cache en réalité Nicolaï, un homme qui, au cours de leur précédente mission, les a trahi. Afin de mener à bien leur mission, ils devront incorporer un groupe de soldats chargés d'une mission secrète en Yougoslavie, la Force 10, menée par le jeune colonel américain Barnsby (Ford), qui n'est pas très content de devoir se coltiner ces deux Britanniques qui risquent fort de ralentir sa propre mission. Mais Barnsby n'a pas le choix. Le groupe doit décoller de la base alliée de Termoli, en Italie, et compte tenu que les précédentes missions parties de cette base ont été la cible de trahisons, Barnsby décide que le groupe partira discrètement, en loucedé. Au moment d'embarquer dans l'avion, ils sont pris à partie par des MP's qui étaient chargés de ramener un militaire déserteur. Une bagarre rangée survient, les MP's sont neutralisés. Le déserteur, un infirmier militaire du nom de Weaver (Weathers), monte à bord de l'avion, de son propre chef, sans demander la permission. 

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L'avion, victime d'une attaque de la Luftwaffe, est touché. L'équipage saute en parachute et atterrit, non loin de leur destination. Ils vont être capturés par une bande de soldats Tchetniks (des soldats civils Yougoslaves historiquement chargés de repousser les Allemands) à la solde des nazis, et dirigés par l'imposant Drazak (Kiel), qui se sont au début fait passer pour les résistants que la Force 10 doit rejoindre. Par une ruse assez improbable, Mallory et Barnsby parviennent à s'échapper du camp, en partie grâce à une Tchetnik, Maritza (Barbara Bach), et gagnent, tandis que les autres sont toujours prisonniers des Tchetniks et des nazis, le camp des résistants, dirigés par Petrovic (Alan Badel). Mallory, qui apprend que Maritza est la fille de Petrovic et qu'elle est infiltrée dans le camp adverse, reconnaît Nicolaï en Lescovar (Nero), mais alors qu'il le confond, Petrovic lui apprend que le vrai Nicolaï, effectivement un espion, a été reperé et exécuté par les résistants. Mallory, Barnsby et Lescovar partent récupérer les autres au camp des Tchetniks, afin d'essayer de sauver ce qui peut l'être de la mission de la Force 10 : faire sauter un pont pour empêcher le déferlement de l'armée allemande. Mais Mallory semble avoir une bien meilleure idée pour que la mission s'accomplisse, le dynamitage du pont semblant en effet des plus impossible à effectuer...

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Les acteurs sont franchement bons (Shaw n'était apparemment pas à l'aise durant le tournage, mais ça ne se ressent pas ; Ford a apparemment eu des soucis avec le réalisateur sur sa manière de jouer et garde un mauvais souvenir du film, mais là aussi, ça ne se ressent pas), avec une réserve pour Carl Weathers dont le personnage est aussi horripilant que foncièrement inutile : un déserteur très susceptible (il ne supporte pas, et c'est bien normal, de se faire traiter de nègre), vrai cheveu sur la soupe pour le reste de l'équipe car il s'est incrusté sans demander leur avis, et en plus, à un moment donné, il se paie le luxe de gueuler qu'il n'a rien demandé et qu'il en a marre de risquer sa peau pour un truc comme ça. Une scène ridicule, embarrassante même, et surtout, totalement inutile et invraisemblable. A ce moment précis, le film flirte franchement avec le nanar d'action. Sans parler de certains effets spéciaux (une décapitation, par câble dressé sur la route, d'un Allemand, qui sent bon son mannequin en cire) et d'un final qui font assez limite. Parlons-en, du final (et au fait, j'ai prévenu, comme toujours, qu'il y à des spoilers dans l'article, alors si vous ne voulez pas savoir ce qui se passe à la fin, sautez un paragraphe) : la Force 10 veut faire sauter, de l'intérieur, un barrage situé à quelques centaines de mètres du fameux pont, afin que le déferlement de l'eau fasse saper les fondations du pont et le fasse s'écrouler (ce qui arrive en effet). Mais je suis sceptique sur le fait qu'en aussi peu de temps, l'eau fasse s'écrouler, de la sorte, le pont. C'est clair qu'une telle chose est possible, l'eau est un élément que l'on dit être le seul à ne pas pouvoir empêcher ou contrôler humainement, mais en aussi peu de temps (car dans l'action du film, c'est l'affaire, apparemment, de quelques minutes), ça me semble improbable. Mais c'est du cinéma, après tout !

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La réalisation est solide parfois, moyenne dans d'autres, et grosso modo, sans surprise, et le scénario (qui apparemment est très éloigné du roman de McLean) est correct, et on passe vraiment un bon moment devant ce film tout sauf réussi, il faut bien l'avouer, mais qui permet de divertir durant une soirée. Cependant, entre des personnages caricaturaux (le déserteur de couleur susceptible et irascible, qui semble aussi être un peu neuneu parfois ; le chef Tchetnik joué par Kiel, qui surjoue un peu ; Edward Fox, amusant mais parfois un peu trop léger, dans le rôle de Miller, un fou de l'explosif), de séquences un peu gênantes (celle du pétage de plombs de Weathers ; celle de l'ordonnance de l'officier nazi, obnubilé par le règlement au point de se faire tuer comme un con ; celle où Mallory, devant Lescovar, affirme que ce dernier est un espion qu'il doit et veut tuer, et au cours de laquelle ce dernier se contente de rire, incident terminé, l'air de dire oh toi alors, tu me fais bien rigoler). Sans parler du départ assez improbable de la Force 10 de la base de Termoli, au début, comme des voleurs. L'Ouragan Vient De Navarone (un titre français qui joue sur le titre original, Force 10, mais est au final assez racoleur et maladroit) n'est peut-être pas un nanar, tout compte fait (ni un navet), juste une série B de guerre honnête, et pas honteuse, mais il est pour moi à la limite du nanar tout de même. Je sais que le classer dans cette catégorie est limite, sans doute maladroit (comme le film), surtout que je le vois plus comme un plaisir coupable. Mais c'est un film que, malgré ses défauts, j'apprécie toujours autant de revoir. 


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