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Tous les arbres au-dessous, d'Antoine Jaquier

Publié le 16 janvier 2023 par Francisrichard @francisrichard
Tous les arbres au-dessous, d'Antoine Jaquier

L'effondrement a eu lieu. Autrement dit la civilisation occidentale et la civilisation tout court se sont effondrées. Les collapsologues tels que Pablo Servigne avaient donc raison:

Trop orgueilleux pour plier, le système a rompu.

Salvatore s'est sauvé, dans les Vosges. Par précaution, il avait fait l'acquisition d'une ferme, à dix bornes de la première habitation, pour survivre au cas où l'effondrement se produirait.

Seul longtemps, il croit avoir trouvé la paix au milieu de la nature, que l'on n'observe jamais assez, tandis qu'elle ne se prive pas de le faire. C'est sans compter avec les deux petits.

Il y a d'abord eu Mira, la muette, muette jusqu'à un certain point de l'histoire, et garçon apparent, avant qu'il ne reconnaisse son erreur et qu'il ne finisse par apprivoiser l'intruse. 

Car si Mira, au début, ne cause pas, elle s'avère pragmatique, prédatrice et sans remords. Tout ce qui manque à Salvatore pour survivre, malgré les livres pratiques qu'il a emportés.

Certes Salvatore a aussi emporté avec lui des armes, on ne sait jamais. Mais, justement, Mira la furtive lui en dérobe une. Alors, une fois retrouvée, il lui apprend à s'en servir.

Après, il y a eu Alix, c'est-à-dire Al, l'androgyne, qui ne se déplace jamais sans sa vache, Lassi, et que Mira, la guerrière, a obligé à la suivre violemment, sous la menace de l'arme.

Salvatore a déjà pris Mira pour un garçon avant de comprendre sa méprise. Cette fois, il reste prudent. Car, si Al ressemble davantage à une fille qu'à un gars, il est détrompé.

Al est de genre indéterminé. Dans ce cas-là, dans ce futur proche, en dépit de ceux qui, aujourd'hui, y trouvent un non-sens, l'emploi du pronom iel et de ses dérivés s'impose.

Le trio n'est pas seul au monde. Ils doivent se défendre contre des dissidents et des rescapés de milices, venus de l'Est. Mira n'est pas tendre avec eux, qui ont enlevé son frère.

Pour retrouver cet enfant, les trois accomplissent un voyage hallucinant, grâce à la Plante, qui leur fait voir la vie souterraine du monde et les fait accéder au fond au grand tout:

Dans ce monde à l'envers, je comprenais bien que mon espèce n'était ni plus ni moins un parasite ou une mycose s'attaquant aux orteils d'un colosse.

Tous les arbres au-dessous donne du crédit aux fantasmes de l'époque. Si l'homme veut s'en sortir, de genre masculin, féminin ou les deux à la fois, il doit se fondre dans le biotope.

Hors de cette fusion, ou confusion, il n'y aurait point de salut. Cette pensée magique, qu'Antoine Jaquier décrit très bien, se traduit par cette volonté d'accueil de Salvatore:

Le Paradis, c'est les autres.

Francis Richard

Tous les arbres au-dessous, Antoine Jaquier, 272 pages, Au Diable Vauvert

Livre précédent chez Au Diable Vauvert:

Simili Love (2019)

Livre précédent à La Grande Ourse:

Légère et court vêtue (2017)

Livres précédents, à L'Âge d'Homme:

Avec les chiens (2015)

Ils sont tous morts (2013)


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