Les gouvernements sont notoirement à la traîne en matière de politique technologique. Mais l’accord de sécurité AUKUS entre l’Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis est une opportunité pour ces partenaires partageant les mêmes idées d’être les premiers acteurs non seulement de la technologie quantique, mais aussi de la politique quantique.
Les experts prévoient que les technologies quantiques évolutives arriveront d’ici cinq à 10 ans et qu’elles seront très perturbatrices pour le secteur commercial et la sécurité nationale. Les partenaires AUKUS travaillent déjà en collaboration sur la mise à l’échelle de l’innovation et de la mise en œuvre de la technologie quantique, mais il existe un besoin parallèle de développer des normes pour traiter les implications réglementaires, éthiques, de renseignement, commerciales et juridiques potentielles des nouvelles technologies quantiques.
Prenons, par exemple, comment ces nouvelles technologies pourraient transformer le traitement informatique quotidien. L’informatique quantique permettra de résoudre très rapidement des problèmes complexes, ce qui transformera le travail effectué dans divers secteurs, tels que la recherche médicale, la sécurité alimentaire et le changement climatique.
Les ordinateurs quantiques sont différents des ordinateurs conventionnels à bien des égards, mais, surtout, ils stockent et interprètent les données en bits quantiques, ou « qubits », plutôt qu’en « bits ». Les bits sont les uns et les zéros qui s’enchaînent séquentiellement pour diriger les processus d’un ordinateur. Par comparaison, les qubits peuvent exister sous forme de uns et de zéros simultanément, ou dans un état de suspension, ce qui leur permet d’effectuer de nombreux calculs en même temps. Le résultat est une puissance de traitement exponentiellement supérieure. Comme le lauréat du prix Nobel Bill Phillips une fois observé, les ordinateurs quantiques sont “plus fondamentalement différents de la technologie actuelle que l’ordinateur numérique ne l’est du boulier”.
Parce que les technologies quantiques évolutives sont à nos portes, le monde doit se préparer à leur arrivée, mais encore une fois, nous nous retrouvons en retard. Comme un rapport ASPI 2021, Une stratégie australienne pour la révolution quantiquea souligné, si un ordinateur quantique est développé sans modifier les normes de cryptage qui sous-tendent Internet, ce sera catastrophique pour la sécurité du réseau car l’infrastructure de sécurité existante sera redondante.
La probabilité que les ordinateurs quantiques soient capables de casser un cryptage même très résistant est particulièrement préoccupante. Cela rendrait vulnérable tout le cryptage à clé publique utilisé dans le monde aujourd’hui pour la messagerie numérique et les transactions sécurisées telles que les services bancaires en ligne. Anne Neuberger, conseillère adjointe à la sécurité nationale américaine pour la cyber et les technologies émergentes, a appelé l’informatique quantique une “menace nucléaire pour la cybersécurité”.
L’accord AUKUS est unique car il propose un engagement technologique pratique entre les secteurs public et privé des États-Unis, de l’Australie et du Royaume-Uni sur le développement des technologies quantiques. La technologie quantique est l’une des huit capacités avancées décrit dans le cadre du deuxième pilier de l’accord AUKUS, qui se concentre sur l’acquisition de capacités avancées.
Le Arrangement quantique AUKUS annoncé l’année dernière se concentrera initialement sur les technologies quantiques pour le positionnement, la navigation et la synchronisation par le biais d’essais et d’expérimentations sur une période de trois ans. Les modalités pratiques de l’accord devraient être rendues publiques plus tard ce mois-ci dans le cadre de l’annonce des voies AUKUS, qui décrira comment les objectifs de l’accord seront atteints, notamment en ce qui concerne l’acquisition par l’Australie de sous-marins à propulsion nucléaire.
Bien que nous ne sachions pas encore si le développement de normes pour les technologies quantiques sera, ou est déjà, intégré aux activités d’AUKUS, la question alimente une plus grande préoccupation selon laquelle pour qu’AUKUS réussisse, une transparence accrue est nécessaire autour des activités du Pilier 2 groupes. Les entités du secteur privé – dont le capital privé alimente une grande partie du développement précoce de cette technologie révolutionnaire – engagées dans ce travail doivent comprendre ce que les partenaires AUKUS essaient de réaliser et où le reste de l’écosystème peut être prêt à soutenir.
De nombreuses technologies quantiques auront des applications à la fois militaires et commerciales. Sans une communication ouverte entre les secteurs public et privé, il sera difficile de s’assurer que des garanties normatives sont développées et intégrées dans le processus de conception – et éventuellement la distribution – de ces technologies transformatrices.
De manière cruciale, parallèlement aux aspects pratiques de collaboration du Pilier 2, les partenaires AUKUS devraient capitaliser sur l’opportunité d’examiner les implications potentielles des technologies quantiques et travailler avec le secteur privé pour se préparer aux opportunités et aux défis qui se présenteront. Les coûts et les risques de ne pas le faire sont importants. La première est que le domaine technologique critique peut être cédé à des acteurs étatiques susceptibles de faire passer leurs intérêts avant la sécurité de la communauté internationale.
Dans le même temps, cependant, des normes mutuellement convenues n’empêcheront pas les abus des technologies quantiques. Pourtant, sans un sentiment d’urgence et sans se concentrer sur les implications politiques, les partenaires d’AUKUS perdront l’occasion de façonner les normes selon lesquelles le reste du monde utilisera cette technologie.
À l’ère actuelle de la concurrence stratégique, une compréhension partagée des choses à faire et à ne pas faire pour utiliser et répondre aux technologies critiques et émergentes revêt une importance supplémentaire. Dans un effort apparent pour jouer les cartes en sa faveur, la Chine a augmenté son influence sur la normalisation technologique internationale par le biais de tactiques de lobbying et d’investissements stratégiques. Il est donc essentiel que des partenaires des secteurs public et privé partageant les mêmes idées collaborent à l’établissement de normes alliées, voire mondiales, pour un avenir quantique.
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