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Charles Bukowski – La tragédie des feuilles

Par Stéphane Chabrières @schabrieres

je me suis réveillé au milieu de la sécheresse et les fougères étaient mortes,
les plantes en pot jaunes comme du maïs ;
ma femme était partie
et les bouteilles vides pareilles à des cadavres exsangues
m’entouraient du poids de leur inutilité ;
le soleil était encore agréable, pourtant,
et la note de ma propriétaire d’un joli jaune fané
et discret ; ce qu’il fallait maintenant
c’était un bon comique, à l’ancienne mode, un bouffon
avec des plaisanteries sur la douleur absurde ; la douleur est absurde
parce qu’elle existe, c’est tout ;
j’ai rasé soigneusement avec un vieux rasoir
l’homme qui fut naguère jeune et
passait pour avoir du génie ; mais
c’est la tragédie des feuilles, des plantes mortes ;
et je suis sorti dans un couloir sombre
où se tenait la propriétaire
haineuse et intraitable,
me maudissant
agitant ses bras adipeux luisant de sueur
et hurlant
hurlant pour son loyer
parce que le monde nous avait tous deux trahis.

*

The Tragedy of the Leaves

I awakened to dryness and the ferns were dead,
the potted plants yellow as corn;
my woman was gone
and the empty bottles like bled corpses
surrounded me with their uselessness;
the sun was still good, though,
and my landlady’s note cracked in fine and
undemanding yellowness; what was needed now
was a good comedian, ancient style, a jester
with jokes upon absurd pain; pain is absurd
because it exists, nothing more;
I shaved carefully with an old razor
the man who had once been young and
said to have genius; but
that’s the tragedy of the leaves,
the dead ferns, the dead plants;
and I walked into a dark hall
where the landlady stood
execrating and final,
sending me to hell,
waving her fat, sweaty arms
and screaming
screaming for rent
because the world has failed us
both.

***

Charles Bukowski (1920-1994) – Traduit par ?


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