La raison et la foi

Par Abdesselam Bougedrawi @abdesselam

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C’est une démarche bien banale que de faire la distinction entre la foi et la raison. Il est ordinaire d’entendre des philosophes affirmer qu’il faudrait écarter la foi pour s’en tenir à la raison.

Au Moyen Âge, avec Thomas d’Aquin, il y eut des efforts pour concilier, justement, cette foi et cette raison. On se rendit compte qu’ils étaient inconciliables. En fait, la volonté même d’associer ces deux éléments aboutit à renforcer, tant leurs différences que leurs contradictions. La difficulté majeure tient dans la représentation imprécise de ces deux notions.

Difficultés de concevoir une raison ou une foi universelle

Il n’existe pas de référence absolue de la raison ou de la foi. Ces deux entités sont floues, fluctuantes, et abstraites. On aborde foi et raison en tant qu’éléments qui se suffisent à eux-eux-mêmes, sans toutefois les définir précisément. Ceci ouvre la voie à des interprétations personnelles et abusives.

Il est important de garder à l’esprit que foi et raison sont le fait d’humains. C’est bien dans l’essence de l’esprit humain qu’elles naissent et s’épanouissent. Ces deux concepts, abstraits, trouvent leurs corps dans les comportements de ceux-là mêmes qui les portent.

Il faut se garder de croire que la foi et la raison dictent leur volonté à ceux qui y croient. En fait, foi et raison sont une création humaine qui, par la force des fantasmes, se transforme en une pensée indépendante à laquelle, ceux qui l’ont engendrée, s’y soumettent.

À première vue ; la raison est supérieure à la foi

On admet la supériorité de la raison sur la foi. La raison serait porteuse de sagesse, inversement, la foi conduit aux excès. On reproche aux religions, abusivement, l’obscurantisme ; par opposition, les lumières sont le fait de la raison.

 Il s’agit d’affirmations discutables. À leur manière, les religions, donc la foi, ont contribué à l’émancipation par rapport aux anciennes superstitions. Les théologies ont eu pour but l’apport d’un système permettant une vie en communauté. La présence d’une force divine transcendante fournit une conscience suprême permettant à l’humain de modérer ses outrances.

La raison ne porte en elle ni spiritualité, ni morale, ni conscience. Elle possède une éthique très fluctuante et soumise à diverses interprétations.

Si, effectivement, l’inquisition a causé 30 000 morts, ce fut en plusieurs siècles. Certainement, cette conscience divine suprême a tempéré les excès.

En comparaison, la raison de Robespierre et de ses amis a causé la mort de centaines de milliers de personnes en quelques mois. La raison, en effet, ne porte, intrinsèquement, aucune conscience qui tempère les ardeurs.

Plus que la foi et la raison, ce sont les humains qui importent

À chaque fois que des personnes croient à une idéologie capable de sauver le monde, ils font preuve des pires barbaries. Lorsqu’ils sont responsables, comme Robespierre et ses amis, de la mort de centaines de milliers de personnes, ils justifient leurs forfaits par la nécessité du bien général.

Pareillement, Staline, pour sauver la Russie, n’a pas hésité à instaurer une dictature meurtrière.

Que ce soient les crimes de la Révolution française ou encore ceux de la Révolution russe, ils puisaient leurs motivations dans l’essence même de la raison.

Il faudrait, certainement, réfléchir à quelque chose qui fournisse à l’humain cette ultime étincelle qui l’empêche de sombrer dans la barbarie. Je ne sais si cela existe ou existera.

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