Le réel dans le quotidien

Publié le 09 mars 2024 par Eric Acouphene

 Q : Que veut dire être dans la vie quotidienne et être dans le réel, dans l'instant ?


Nathalie Delay : C'est la même chose ! La vie quotidienne, c'est le réel. Mais ce qui est important est : Comment j'aborde, comment je vis ce quotidien ? Est-ce que je le vis directement ou est-ce que je le pense ? À savoir, est-ce que je suis tout le temps en train de le commenter, est-ce que je le juge ? Est-ce que mon mental réagit à ce quotidien en pensant qu'il est trop comme ça ou pas assez comme ça ?

Est-ce que je fais aussi une distinction entre le quotidien et des moments à part qui seraient plus extraordinaires ? Est-ce que je crée des catégories : d'un côté l'ordinaire, le quotidien, et de l'autre côté l'extraordinaire ? 

Que veut dire pour vous le quotidien ? 

Quand je parle du réel, ça serait dommage d'ancrer encore quelque chose qui serait "à part" et qu'il faudrait atteindre, comme quelque chose de supérieur. Le réel, la réalité, c'est ce moment, là, maintenant, qu'on est en train de partager : il y a les mots, l'écran, cette image, la pièce, bref tous les aspects extérieurs caractéristiques de ce moment. Mais il y a aussi quelque chose d'essentiel qu'on ne peut pas caractériser. 

Et c'est cela le Grand Réel : c'est cet aspect externe que l'on voit tous et c'est aussi en même temps cet aspect interne, que l'on connaît tous aussi. Mais si l'on est trop attaché à l'extérieur, et que notre regard s'arrête à l'aspect extérieur, et bien on ne goûte pas, on ne reconnaît pas cet essentiel qui est là et que l'on peut ressentir mais qu'on ne sait pas comment nommer. On peut vraiment vivre cette présence, là, maintenant ; et cette présence, on ne peut pas dire "c'est la mienne", on ne peut pas l'enfermer. Quand on la goûte, on sent bien que cette présence est partout, elle est vous, elle est moi. 

Et donc vous voyez, là, en ce moment, c'est un moment complètement ordinaire, c'est un moment du quotidien on peut dire, et en même temps, c'est l'absolu aussi, c'est la totalité. Et ça c'est possible tout le temps, quand on fait la vaisselle, quand on va chercher les enfants à l'école, quand on répond au téléphone... Il n'y a pas de raison de quitter cette pleine présence. Alors bien-sûr, il faut déjà l'avoir goûtée, l'avoir connue. Donc, le chemin spirituel c'est d'arriver dans chaque moment de votre vie, le plus ordinaire comme le plus extraordinaire, et de pouvoir reconnaître cet arrière plan de pure présence, de pure conscience. 

Mais la moindre résistance ou la moindre réaction m'empêche de rester déposée, de me fondre dans cette pleine présence. Et c'est cela qu'il faut découvrir par soi-même. De voir que quand je résiste, quand je refuse le réel finalement, je me coupe de la présence. Et le quotidien de chacun, c'est le terrain d'exploration pour voir là où je vais refuser, là où je vais réagir, là où je vais juger et dire "Ah non, ça c'est négatif, je ne veux pas". Pour voir tous ces mouvements où on ne va pas pouvoir plonger plus profondément en contact avec ce qui est là, parce que ce n'est pas comme on veut. 

Et ce n'est pas de se débarrasser de sa résistance, car ce n'est pas possible, mais c'est de la voir clairement, de voir de plus en plus clairement le phénomène de la résistance, du refus, qui fait que ça me coupe. Il n'y a que cela qui peut libérer en fait. 

~ Nathalie Delay 

(extrait d'une vidéo)

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