La semaine de la mode parisienne, qui a débuté hier, célèbre la naissance du " créateur " en 1974, un personnage émergent, hybride entre le couturier et le styliste. " C'est la matérialisation sémantique de la naissance d'un prêt-à-porter tourné vers la création ", raconte Pascal Morand, président exécutif de la Fédération de la haute couture et de la mode. Jusque-là, habiller le monde était l'apanage d'une aristocratie avec la haute couture d'un côté et un prolétariat en remorque avec l'industrie du prêt-à-porter de l'autre. La France révolutionnaire, qui a coupé des têtes monarchiques, garde toujours une inclination vers une élite qui éclaire le futur par une effervescence intellectuelle et créative : dans les années 70, une génération d'hommes et de femmes de mode a envie de tisser de nouvelles esthétiques, libres et affabulées, provocantes et stimulantes. Ces esthétiques ne se préoccupent pas du pragmatisme des marchés, mais promeuvent des créations individuelles et sensibles qui font voler en éclats le protocole et les normes d'une industrie en manque d'audace. La mode devient un fait culturel avec des artisans et des artistes qui défient les lois économiques : on ne vend pas des vêtements pour habiller, mais pour manifester son appartenance à la modernité ou à une avant-garde.