On ne saura sans doute pas avant quelques décennies ce qui s’est vraiment passé ce 18 août à proximité du col d’Uzbin, dans le district de Saroubi. Les versions les plus divergents circulent dont certaines véhiculées par Le Canard enchaîné qui publie également des extraits d’un rapport critique sur la formation et la préparation des soldats français envoyés en Afghanistan.
Lors de leur audition devant les députés des commissions des affaires étrangères et de la défense de l’Assemblée nationale Hervé Morin et Bernard Kouchner ont tenté de brosser un tableau qualifié de « vision presque idyllique », par Nicolas Dupont-Aignan. « Cela rappelle certains airs entendus par le passé », a confirmé François Bayrou.
Cette fuite de la réalité permet certes de s’exonérer de certaines responsabilités mais ne permet pas de s’interroger de façon objective sur les leçons à tirer d’un tel drame et au-delà à se poser les bonnes questions sur l’engagement français en Afghanistan. Comme le faisait remarquer Guy Teissier, président de la commission de la défense de l’Assemblée Nationale, «les carences en matière d’aéromobilité et de renseignements, relevées depuis longtemps, peuvent avoir des conséquences cruelles».
Peu enclin à tenir un discours vérité, Hervé Morin a tout juste concédé l’envoi prochain de nouveaux matériels et de forces spéciales. La responsabilité d’un ministre de la défense n’est pourtant pas de minimiser les faits mais de donner aux hommes au front les moyens de remplir la mission qui leur a été confiée.
La cacophonie est totale au ministère de la défense entre un ministre qui rejette le terme de guerre et un général d’Etat-major qui décrit minute par minute l’embuscade meurtrière comme la plus dure bataille livrée par la coalition en Afghanistan depuis la chute du régime des talibans, en 2001 avec neuf heures de combat, 500 soldats occidentaux et afghans impliqué contre une centaine de talibans. Sans un soutien aérien américain très conséquent, et sans la décision de battre en retraite sous la mitraille prise par le chef du groupe de tête, les pertes auraient pu être «beaucoup plus lourdes», admettait pourtant mercredi, sous forme d’aveu, Hervé Morin.
Au-delà de ce constat partagé sur la violence de l’affrontement, les propos du général Puga prennent une tournure caricaturale et contre-productive lorsqu’il évoque « une sacrée raclée » à l’égard des Talibans. Entre rendre hommage aux soldats engagés et bomber le torse, il y avait une limite, celle de la décence, que le haut gradé en ancien de la Légion étrangère n’aura pas hésité à franchir.