Oh, Canada de Paul Schrader

Par Mespetitesvues

Synopsis : Alors qu'il se sent partir en raison d'un cancer en phase terminale, Leonard Fife, cinéaste américano-canadien de renom, accepte d'accorder une dernière entrevue à d'anciens étudiants. Sans ambages, il livre ses souvenirs et révèle quelques secrets de sa vie mouvementée, notamment sur sa jeunesse, alors qu'il avait déserté pour éviter d'aller faire la guerre au Vietnam. Stupéfaite, sa femme, la troisième, découvre un homme qu'elle ne connaissait pas sous ce jour.

Sortie en salle au Québec : 13 décembre 2024 (Kino Lorber)

Tourné en seulement 17 jours à New York au cours de l'automne 2023, est le plus récent long métrage de Paul Schrader, auteur des illustres American Gigolo (1980), Hardcore (1979), Mishima (1985) ou encore First Reformed (2017). Adaptation du roman " Foregone " de Russell Banks, avec qui Schrader avait déjà collaboré pour Affliction en 1997, est un drame psychologique qui manque un peu d'intensité, mais qui explore quelques-uns des thèmes de prédilection de Schrader, tels que la morale, la culpabilité et la quête de rédemption.

Oh, Canada s'interroge sur la manière dont les individus cherchent à donner un sens à leur vie en confrontant des vérités longtemps refoulées. La confession, élément central de l'intrigue, révèle un protagoniste torturé, hanté par ses choix de vie. En cherchant à obtenir le pardon et à se réconcilier avec lui-même, au risque de décevoir ses proches, le film met bien en lumière le conflit intérieur opposant la recherche d'authenticité et les conséquences de choix discutables.

Les faux-semblants occupent également une place centrale dans cette étude sur l'identité et la construction d'une vie fondée sur des illusions et des mensonges. Schrader utilise des retours en arrière pour illustrer des moments clés de la vie de son protagoniste, notamment sa rencontre manquée avec un fils qu'il n'a jamais reconnu. L'illustration d'une paternité troublée ainsi que l'évocation de l'art comme moyen d'échapper à la réalité ajoutent une couche à cette exploration introspective. La réplique " Je ne peux parler que lorsque la caméra est allumée ", résume d'ailleurs très bien l'essence cet élément du récit qui aurait à mon sens mérité un peu plus d'approfondissement.

Présenté en avant-première au 77ᵉ Festival de Cannes en mai 2024, est sorti assez rapidement en salles à la fin de l'année, sans rencontrer un large public (moins de 200 000 dollars de recettes aux États-Unis!). Cependant, le film constitue un bel exemple de la capacité de Schrader à explorer des thèmes psychologiques profonds et complexes. Richard Gere et Uma Thurman livrent des performances impeccables, tandis que la trame musicale mélancolique composée par Phosphorescent (Matthew Houck) et les paysages bucoliques apportent une dimension introspective supplémentaire.

Bien que Oh, Canada ne soit pas une œuvre essentielle dans la carrière fascinante du cinéaste de 78 ans, il offre une évocation douce-amère et somme toute assez prenante de la vie d'un homme confronté à ses échecs et au jugement de ses proches.