Enregistrée en 1966 et parue sur l’album Revolver, Yellow Submarine demeure l’une des chansons les plus clivantes des Beatles. Pour certains, elle incarne l’esprit ludique et accessible du groupe, tandis que pour d’autres, elle ne serait qu’une bluette enfantine, indigne d’un album aussi novateur. Pourtant, derrière sa mélodie simple et ses paroles faussement innocentes, Yellow Submarine s’inscrit pleinement dans la révolution musicale des Fab Four.
Sommaire
- Une composition bicéphale
- Une mélodie accessible et un enregistrement en studio surréaliste
- Une réception contrastée et un succès mondial
- Yellow Submarine : de la chanson à l’écran
- Un héritage durable
Une composition bicéphale
Comme souvent chez les Beatles, la genèse de la chanson se trouve dans une collaboration entre Paul McCartney et John Lennon. Lennon avait composé une mélodie initiale, tandis que McCartney trouva l’idée du refrain en un instant fugace avant de s’endormir. « Je me souviens avoir été au lit, juste avant de m’endormir, et d’avoir pensé à ‘Yellow Submarine’. » expliqua McCartney. Inspiré par l’imaginaire enfantin et la voix chaleureuse de Ringo Starr, il en fit une chanson taillée sur mesure pour le batteur.
Dans la version démo de Lennon, dévoilée en 2022, les paroles présentent un ton bien plus sombre et introspectif :
In the place where I was born / No one cared, no one cared.
Ce qui laisse entrevoir une origine plus nostalgique, peut-être inspirée par l’enfance de Lennon à Liverpool.
Une mélodie accessible et un enregistrement en studio surréaliste
En mai 1966, les Beatles entamèrent l’enregistrement de la chanson aux studios Abbey Road. Si la base instrumentale fut captée en quelques prises, l’atmosphère sonore de Yellow Submarine fut enrichie par une profusion d’effets spéciaux, transformant le studio en un terrain de jeu sonore.
Les Beatles et leurs proches furent mis à contribution : Brian Jones des Rolling Stones entrechoqua des verres, John Lennon souffla des bulles dans un seau d’eau et Mal Evans, assistant du groupe, arpenta la pièce avec une grosse caisse attachée au torse. « Nous avons pratiquement donné vie au morceau en studio, mais tout partait de l’inspiration de Paul », confia John Lennon.
Donovan, figure emblématique de la scène folk britannique, participa indirectement en suggérant un couplet resté célèbre : « Sky of blue and sea of green / In our yellow submarine ».
Une réception contrastée et un succès mondial
Sortie le 5 août 1966 en face A d’un single partagé avec Eleanor Rigby, Yellow Submarine connut un succès fulgurant au Royaume-Uni, où elle se hissa à la première place des charts. Aux États-Unis, en revanche, la chanson n’atteignit que la seconde place, en partie à cause de la controverse autour de la célèbre « Butcher Cover » de Yesterday and Today et des propos polémiques de John Lennon sur la religion. Toutefois, en seulement quatre semaines, plus d’1,2 million d’exemplaires furent vendus.
La chanson reçut un Ivor Novello Award pour avoir atteint les plus grosses ventes de single au Royaume-Uni en 1966.
Yellow Submarine : de la chanson à l’écran
Deux ans après sa sortie, Yellow Submarine devint le fil conducteur du film d’animation du même nom, réalisé par George Dunning. Ce projet permit aux Beatles de se détacher de leurs obligations contractuelles avec United Artists, sans pour autant y apparaître physiquement. Mêlant psychédélisme et satire sociale, le film dépasse largement son statut d’œuvre pour enfants et devient une expérience immersive unique.
Sa bande-son, publiée en 1969, contient des compositions originales et des instrumentaux signés George Martin, mais aussi des titres moins emblématiques du groupe, issus d’autres sessions.
Un héritage durable
Si Yellow Submarine n’est pas la chanson la plus complexe des Beatles, elle incarne une facette essentielle du groupe : leur capacité à créer des morceaux universels, accessibles à toutes les générations. Pour Ringo Starr, elle représente un moment unique dans son parcours avec les Beatles, étant la première chanson qu’il enregistra en tant que chanteur soliste sur un single officiel.
Décriée par certains fans pour son apparente simplicité, adorée par d’autres pour son pouvoir d’évocation joyeuse, Yellow Submarine continue de naviguer dans l’imaginaire collectif, prouvant que même la plus simple des chansons peut devenir un hymne intemporel.