« 222 » : L’hommage secret de Paul McCartney à sa fille et à son univers musical

Publié le 02 octobre 2025 par John Lenmac @yellowsubnet

« 222 » est une chanson cachée dans l’édition deluxe de l’album Memory Almost Full, composée par Paul McCartney pour sa fille Beatrice. Cette pièce intime se distingue par une approche musicale minimaliste et sophistiquée, mêlant jazz et expérimentations sonores. En dépit de son statut de bonus track, « 222 » a marqué l’univers de McCartney, apparaissant dans des collections rétrospectives et avec un clip signé Marco Sandeman. Un joyau discret mais cher aux fans.


Dans l’immense discographie de Paul McCartney, il existe des morceaux confidentiels, parfois relégués à l’arrière-plan des grandes sorties commerciales. « 222 » fait partie de ces joyaux cachés, une chanson enregistrée durant les sessions deMemory Almost Fullet disponible uniquement sur l’édition deluxe de l’album. Ce titre particulier, à la fois intime et audacieux, se distingue par son approche musicale à la fois minimaliste et sophistiquée.

Un hommage paternelle à Beatrice McCartney

« 222 » n’est pas une chanson comme les autres dans le répertoire de McCartney. Elle trouve son origine dans une inspiration personnelle : l’ex-Beatle l’a composée pour sa fille Beatrice, alors âgée de deux ans. Le titre du morceau pourrait ainsi faire référence à son âge, bien que McCartney n’ait jamais explicitement confirmé cette hypothèse.

Déjà, à l’époque des Beatles, Paul était connu pour sa capacité à transformer des émotions personnelles en compositions intemporelles.Hey Judeétait un message de soutien à Julian Lennon,Little Willowun hommage à la mère d’un ami décédée… Avec « 222 », McCartney poursuit cette tradition de chansons empreintes de tendresse et d’affection filiale.

Un enregistrement atypique et une approche musicale audacieuse

L’enregistrement de « 222 » a débuté en 2006 avant d’être finalisé au début de l’année 2007 aux célèbres RAK Studios. McCartney, toujours prolifique et curieux de nouvelles sonorités, y joue quasiment de tous les instruments : guitare électrique, basse, piano, claviers, orgue, vibraphone, xylophone et même flugelhorn. Ce choix instrumental confère à « 222 » une atmosphère particulière, oscillant entre une ballade jazzy et une expérience sonore plus abstraite.

L’ajout d’une clarinette – dont le musicien reste inconnu – vient enrichir cette palette sonore. Le titre offre ainsi un mélange de textures douces et sophistiquées, qui rappellent certaines compositions plus expérimentales de McCartney, commeMcCartney II(1980) ou des incursions dans le classique et le jazz qu’il a souvent explorées.

Un destin discret mais persistant

Malgré son statut de bonus track, « 222 » n’est pas resté entièrement dans l’ombre. En plus de figurer sur l’édition deluxe deMemory Almost Full, il a été inclus dansThe 7″ Singles Box, un coffret de 80 singles sorti en 2022. « 222 » y apparaît en face B du single inéditNod Your Head, un titre beaucoup plus rock et brut, en contraste saisissant avec la douceur introspective de « 222 ».

La chanson bénéficie également d’un clip réalisé par Marco Sandeman, confirmant l’intérêt de McCartney pour ce morceau. Bien que cette vidéo n’ait pas connu une large diffusion, elle renforce le statut de « 222 » en tant que pépite cachée.

Une chanson dans la lignée des perles méconnues de McCartney

L’histoire de « 222 » s’inscrit dans une longue tradition de morceaux peu exposés mais chéris par les fans de McCartney. On pourrait l’associer à des titres comme « Ode to a Koala Bear » (face B de « Say Say Say » en 1983) ou « Kicked Around No More », une face B de 1993. Ces morceaux, bien que non présents sur les albums principaux, témoignent de la richesse inépuisable de l’inspiration de McCartney.

Un regard rétrospectif sur « Memory Almost Full » et ses bonus tracks

Sorti en 2007,Memory Almost Fullmarque une période charnière dans la carrière de McCartney. Produit par David Kahne, l’album mêle introspection et dynamisme, avec des titres comme « Dance Tonight » ou « Ever Present Past ». « 222 » vient enrichir cette palette sonore en offrant une respiration plus douce et contemplative.

Aujourd’hui, alors que McCartney continue d’explorer de nouvelles voies musicales, « 222 » demeure un témoignage de son inlassable créativité et de sa capacité à composer des mélodies intemporelles, même en marge de ses productions les plus connues.

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« 3 Legs » : l’énigmatique blues de Paul McCartney surRam

Lorsque Paul McCartney sort son albumRamen mai 1971, il est encore en pleine transition entre son passé de Beatle et sa carrière solo. Au milieu de cet album foisonnant, oscillant entre pop champêtre et expérimentation sonore, se trouve « 3 Legs », un morceau intrigant, aux accents bluesy, qui continue d’alimenter les débats parmi les passionnés du quatuor de Liverpool.

Un blues bucolique né dans la liberté retrouvée

Ramest un album singulier dans la discographie de McCartney. Contrairement àMcCartney(1970), enregistré en solitaire et marqué par une certaine mélancolie,Ramest l’œuvre d’un homme prêt à se réinventer. Il le compose principalement en Écosse, dans sa ferme du Mull of Kintyre, où il s’installe avec sa femme Linda et leurs enfants. Cette retraite rurale, loin du tumulte londonien et des tensions avec ses anciens compagnons de route, lui permet de renouer avec une vie simple et une approche musicale plus spontanée.

C’est dans cet état d’esprit que naît « 3 Legs », morceau construit sur une structure blues, agrémenté de paroles énigmatiques et d’une production épurée. Comme McCartney l’expliquera plus tard, cette chanson est issue d’une session libre où il expérimente avec sa guitare acoustique dans la cuisine de sa ferme. « Mon chien a trois pattes, mais il peut courir », chante-t-il, évoquant un esprit de résilience face à l’imperfection. Loin de la sophistication des arrangements de l’ère Beatles, le titre se distingue par sa fraîcheur et son immédiateté.

Un message codé pour ses anciens partenaires ?

Dès sa sortie,Ramest analysé sous le prisme de la séparation des Beatles. Contrairement à John Lennon, qui n’hésite pas à régler ses comptes frontalement dans des morceaux comme « How Do You Sleep? », Paul McCartney préfère l’ambiguïté et la métaphore. Ainsi, « 3 Legs » est souvent interprété comme une allusion déguisée à ses anciens camarades.

La phrase « Quand je pensais que tu étais mon ami, mais tu m’as laissé tomber » semble évoquer la douleur de la rupture et la trahison ressentie par McCartney à l’égard de Lennon et Harrison, qui l’avaient mis en minorité lors des dernières décisions du groupe. L’image du chien à trois pattes, qui peine à courir, pourrait symboliser un Beatles amputé de son unité originelle, désormais bancal et incapable d’avancer. McCartney, en se détachant de cette dynamique, retrouve paradoxalement une forme de liberté.

L’interprétation n’a jamais été confirmée par l’intéressé, qui se contente de décrire le morceau comme une improvisation sans arrière-pensée. Toutefois, connaissant la sensibilité de McCartney au double sens et aux jeux de mots, il est difficile d’imaginer qu’il n’ait pas envisagé la portée de ses paroles.

Une production soignée et une équipe renouvelée

L’enregistrement de « 3 Legs » débute le 16 octobre 1970 aux Columbia Studios de New York, en parallèle du titre « Eat at Home ». La session réunit David Spinozza à la guitare, Denny Seiwell à la batterie et McCartney à la basse, à la guitare électrique et aux parties vocales. Spinozza, bien que talentueux, ne restera que peu de temps dans l’équipe avant d’être remplacé par Hugh McCracken, plus en phase avec les attentes de Paul.

Le titre connaîtra plusieurs phases d’enregistrement et d’ajouts successifs. En janvier 1971, Paul et Linda enregistrent des chœurs en réponse à la voix principale, ajoutant une texture chaleureuse à l’ensemble. Plus tard, en mars, McCartney peaufine les arrangements en ajoutant du tambourin et en réenregistrant certaines pistes vocales.

L’approche de McCartney surRamest à la fois méthodique et intuitive. Il prend le temps de peaufiner ses morceaux, tout en conservant une spontanéité dans l’exécution. « 3 Legs » en est l’illustration parfaite : une base blues simple, enrichie par des arrangements subtils et une interprétation énergique.

Une réception mitigée mais un soutien inattendu

À sa sortie,Ramdivise la critique. Certains y voient un album mineur, voire chaotique, tandis que d’autres louent sa fraîcheur et son audace. « 3 Legs », en particulier, intrigue par son ton apparemment léger mais potentiellement acide.

John Lennon, pourtant très critique envers McCartney à cette époque, admettra apprécier certains passages de l’album, mentionnant « My Dog’s Got Three Legs » parmi les moments qui lui plaisent. Ce rare compliment de la part de Lennon envers un disque post-Beatles de Paul McCartney témoigne de la force du morceau, malgré son apparente simplicité.

Un clip pastoral et une diffusion télévisée

Pour accompagner la promotion deRam, McCartney réalise deux films pour les chansons « 3 Legs » et « Heart of the Country ». Ces séquences, montées par Ray Benson, montrent Paul et Linda à cheval dans les paysages verdoyants du Mull of Kintyre. Elles traduisent visuellement l’atmosphère de liberté et d’évasion qui caractérise l’album.

Le clip de « 3 Legs » est diffusé sur la BBC dans l’émissionTop of the Popsle 24 juin 1971. Ces images, bien que simples, contribuent à ancrer le morceau dans l’univers pastoral et bohème que McCartney chérit à cette époque.

L’héritage de « 3 Legs »

Si « 3 Legs » n’est pas le titre le plus emblématique de McCartney, il occupe une place particulière dans sa discographie. Il incarne à la fois son goût pour l’improvisation et sa capacité à glisser des sous-entendus dans des textes apparemment anodins. Aujourd’hui, il reste un morceau apprécié des amateurs deRam, un album qui a fini par être réhabilité avec le temps.

En 1977, l’album instrumentalThrillington, une relecture orchestrale deRam, revisite « 3 Legs » sous un nouvel angle. Cette version confirme l’intérêt de McCartney pour l’expérimentation et prouve que même les titres les plus spontanés peuvent se prêter à des réinterprétations ambitieuses.

Plus de cinquante ans après sa sortie, « 3 Legs » continue de fasciner par son ambiguïté et sa fraîcheur. À mi-chemin entre le blues rural et la confession déguisée, il témoigne d’une période charnière dans la carrière de McCartney, où il apprend à marcher seul, parfois sur trois jambes, mais toujours avec une détermination intacte.