Quand George Harrison a quitté les Beatles : le jour où tout a failli basculer

Publié le 01 octobre 2025 par John Lenmac @yellowsubnet

En janvier 1969, en pleine session du projet « Get Back », George Harrison quitte brusquement les Beatles, épuisé par les tensions, notamment avec Paul McCartney. Son départ symbolise la fracture grandissante au sein du groupe. Malgré son retour quelques jours plus tard, les conflits internes annoncent la fin inévitable des Fab Four.


En janvier 1969, alors que les tensions au sein des Beatles atteignaient des sommets, George Harrison prit une décision radicale : quitter le groupe. Cet épisode, survenu en pleine session d’enregistrement du projet « Get Back », illustre à quel point les relations entre les membres du groupe s’étaient détériorées, notamment entre Harrison et Paul McCartney. Retour sur un moment clé de l’histoire des Fab Four.

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Une fracture grandissante

Dès la fin des années 1960, l’équilibre au sein des Beatles était mis à rude épreuve. Après l’arrêt des tournées en 1966, le groupe s’était concentré sur l’expérimentation en studio, mais l’euphorie créative des premiers jours laissa progressivement place aux conflits d’ego et aux divergences artistiques. George Harrison, longtemps cantonné au rôle du « petit frère » des génies Lennon et McCartney, voyait son importance croissante dans le groupe freinée par ces derniers.

L’albumThe Beatles(surnomméThe White Album) en 1968 fut le théâtre de tensions particulièrement vives. Ringo Starr quitta brièvement le groupe lors des sessions d’enregistrement deBack in the USSR, fatigué par l’ambiance délétère. « Il y avait beaucoup de friction sur cet album », reconnaîtra plus tard Paul McCartney. « On était sur le point d’exploser, et ça se sentait. »

C’est pourtant lors du projet suivant,Get Back, que la situation devint véritablement intenable, notamment entre George Harrison et Paul McCartney.

Une tension palpable aux studios Twickenham

L’idée deGet Backvenait de Paul McCartney. Il souhaitait un retour aux sources, loin des productions ultra-sophistiquées et fragmentées qui avaient caractérisé les derniers albums des Beatles. Son ambition : enregistrer des chansons dans une atmosphère live et capturer l’essence brute du groupe. Mais cette vision se heurta très vite à l’épuisement et aux frustrations accumulées des autres membres.

Les répétitions commencèrent en janvier 1969 aux studios Twickenham, dans un froid glacial et sous l’œil constant des caméras du réalisateur Michael Lindsay-Hogg, qui filmait le groupe pour un documentaire. La pression était immense, et les tensions s’exacerbèrent rapidement.

DansThe Beatles Diary, Barry Miles décrit cette période comme un désastre : « Paul donnait des ordres à George ; George était boudeur et plein de ressentiment. John ne se séparait jamais de Yoko. La tension était palpable, et tout cela était filmé. »

Le point de rupture survint le 10 janvier 1969. George Harrison, à bout, interrompit une session et quitta la pièce sans prévenir. Quelques instants plus tard, il fit une brève apparition à la cantine où les Beatles déjeunaient et lâcha simplement : « À plus tard dans les clubs. » Ce fut son adieu, sans éclats ni cris, mais d’une violence symbolique inouïe.

« Appelons Eric Clapton ! »

Le départ de George ne suscita pas l’émoi immédiat que l’on aurait pu imaginer. John Lennon, connu pour ses réactions à chaud, balança avec un brin de provocation : « Prenons Eric [Clapton], il est aussi bon et il est moins prise de tête ! » Une déclaration qui illustre l’état d’esprit détaché et cynique qui régnait à ce moment-là.

De leur côté, Paul et Ringo tentèrent d’absorber le choc, mais la tension était palpable. Ils se lancèrent dans une improvisation frénétique, où colère et frustration s’exprimaient par la musique. Pendant ce temps, Yoko Ono, désormais omniprésente, s’assit sur un coussin et se mit à hurler dans le micro laissé vacant par George.

Le retour de George sous conditions

Si George Harrison revint dans le groupe quelques jours plus tard, ce ne fut pas sans poser ses conditions. Il refusa catégoriquement de poursuivre les sessions aux studios Twickenham, préférant le confort du studio Apple. Plus important encore, il mit un terme à l’idée d’un concert de retour en public, qui était pourtant au cœur du concept deGet Back.

Dans une interview ultérieure, George expliqua son geste avec lucidité : « Ils nous filmaient en train de nous disputer. On n’en est jamais venus aux mains, mais je me suis dit : ‘Quel est l’intérêt ?’ Je pouvais être heureux ailleurs, alors que là, j’étais malheureux. Alors je suis parti. »

Il précisa également que son départ n’était pas un cas isolé : « Tout le monde est passé par là. Ringo était parti à un moment donné. Je sais que John voulait en finir aussi. C’était une période difficile, stressante. »

La fin inévitable des Beatles

Finalement, les Beatles poursuivirent leur travail surGet Back, qui deviendra plus tardLet It Be, leur dernier album. Le 30 janvier 1969, ils offrirent une ultime prestation live sur le toit du bâtiment Apple à Londres, un événement désormais légendaire.

Malgré cet ultime sursaut, le groupe était condamné. En septembre 1969, John Lennon annonça son départ, qualifiant cela de « divorce ». L’annonce officielle de la séparation des Beatles interviendra en avril 1970, scellée par la sortie deLet It Been mai.

Avec le recul, les tensions entre George Harrison et Paul McCartney symbolisaient un problème plus profond : celui d’un groupe qui, après tant d’années passées ensemble, peinait à concilier ses ambitions individuelles. George, qui s’était longtemps senti éclipsé par le duo Lennon-McCartney, trouva finalement sa propre voix en solo avec l’albumAll Things Must Passen 1970, prouvant à tous qu’il était bien plus qu’un simple « troisième Beatle ».

Quant à Paul, il poursuivit une carrière couronnée de succès, mais non sans regretter, des années plus tard, la manière dont les choses s’étaient déroulées : « On était jeunes, on ne savait pas gérer tout ça. Si on avait pu se poser et discuter comme des adultes, qui sait ce qui aurait pu arriver ? »

La querelle entre George Harrison et Paul McCartney n’était donc qu’un symptôme des conflits internes qui allaient précipiter la fin des Beatles. Mais elle reste aussi un témoignage poignant des défis d’un groupe devenu plus grand que la somme de ses parties.