En 1974, Paul McCartney enregistre Walking in the Park with Eloise, une composition de son père Jim McCartney, avec des musiciens légendaires comme Chet Atkins et Floyd Cramer. Sorti sous le nom The Country Hams, ce morceau country-jazz reste une œuvre intimiste et méconnue, témoignant du lien entre Paul et ses racines familiales. Malgré un succès commercial limité, cette chanson symbolise l’attachement de McCartney à son héritage musical et trouve une nouvelle vie en 2016 avec une réorchestration pour le film Ethel & Ernest.
Lorsqu’on évoque l’œuvre de Paul McCartney, l’ombre des Beatles plane inévitablement sur chaque composition. Toutefois, au-delà des succès planétaires qu’il a connus avec le groupe, l’artiste a toujours entretenu une relation très particulière avec ses racines musicales. Une de ses œuvres les plus intrigantes et moins connues de cette période post-Beatles est le morceau« Walking in the Park with Eloise », une chanson qu’il a enregistrée en 1974 à Nashville, mais qui trouve ses origines dans la plume de son propre père, James McCartney.
Sommaire
- La genèse d’une mélodie paternelle
- Nashville, un terreau fertile pour la création
- Le single et ses conséquences
- Un clin d’œil à l’histoire musicale
- « Walking in the Park with Eloise » : un trésor intime
La genèse d’une mélodie paternelle
En 1974, Paul McCartney se retrouve dans une phase importante de sa carrière, après la sortie de l’albumBand on the Runenregistré au Nigeria. Il entame de nouvelles sessions d’enregistrement à Nashville, où il commence à mettre en place un nouveau line-up pour son groupe Wings. C’est à cette époque qu’il se souvient d’un morceau écrit par son père, Jim McCartney, qu’il avait entendu dans son enfance. Le titre en question,« Walking in the Park with Eloise », était l’unique composition musicale de son père, à la connaissance de Paul. Ce dernier raconte :« Mon père a écrit une chanson – seulement une, à ma connaissance – et, bien des années plus tard, je lui ai dit : ‘Papa, tu te souviens de cette chanson que tu as écrite, ‘Walking in the Park with Eloise’ ?’ Il m’a répondu : ‘Je ne l’ai pas écrite – je l’ai juste inventée.' »Une belle anecdote qui illustre la simplicité et l’humilité de Jim McCartney, père de l’un des plus grands musiciens de l’histoire.
Nashville, un terreau fertile pour la création
C’est à Nashville, centre névralgique de la musique country et du rock américain, que Paul McCartney enregistre cette chanson avec des musiciens locaux. Parmi eux, on retrouve le guitariste légendaire Chet Atkins et le pianiste Floyd Cramer. Le morceau, à l’origine composé de manière spontanée par Jim McCartney, se trouve réinterprété dans une version country, accompagnée d’un ensemble de musiciens de renom, surnomméThe Country Hams.
Linda McCartney, son épouse et photographe de talent, se souvient d’une soirée à Nashville où Chet Atkins et Paul discutaient autour d’un repas. « C’était pendant un dîner avec Chet Atkins, le guitariste. Paul lui avait joué beaucoup de ses morceaux, et Chet lui avait dit : ‘Voici une chanson que mon père a écrite il y a longtemps,’ avant de commencer à la jouer. Chet a alors suggéré qu’ils l’enregistrent, ce qui serait un joli cadeau pour son père. » Ainsi, l’idée d’enregistrer cette chanson familiale s’est concrétisée, et le projet a rapidement pris forme. L’intervention de Chet Atkins et Floyd Cramer a permis de donner à la chanson un cachet authentique de Nashville, bien loin des expérimentations sonores des années précédentes de McCartney.
Le single et ses conséquences
« Walking in the Park with Eloise »sort finalement en 1974 sous le nom deThe Country Hamset est accompagné de l’instrumental« Bridge Over the River Suite », une autre composition de McCartney. Bien que ce single ne connaisse aucun succès commercial et n’entre dans aucun classement, la satisfaction personnelle de Paul McCartney est évidente : il avait réussi à faire enregistrer et publier l’une des créations de son père, un exploit qui n’était pas sans émouvoir ce dernier. « Il adorait avoir un disque sorti, mais il était très timide… il n’aimait pas toute cette publicité. Je me souviens qu’il était très ému lorsque je lui ai fait écouter pour la première fois. Il m’a dit que je n’aurais pas dû me donner tout ce mal, mais je sais qu’il l’a apprécié, » confie McCartney avec tendresse.
La chanson, bien que peu remarquée à sa sortie, bénéficie d’une seconde vie grâce à sa réédition en 1982, pour accompagner la diffusion de l’émission de la BBCDesert Island Discs, où Paul McCartney choisit cette chanson parmi ses disques préférés. Malheureusement, cette nouvelle édition ne modifie guère l’accueil du public, et« Walking in the Park with Eloise »reste un objet de collection pour les passionnés, vendant peu d’exemplaires mais bénéficiant d’une aura de rareté. Le morceau est aujourd’hui davantage reconnu comme un témoignage touchant de la relation père-fils, dans une version qui reflète la simplicité et la tendresse d’une époque révolue.
Un clin d’œil à l’histoire musicale
La réédition du single par EMI en 1982, pour accompagner l’émissionDesert Island Discs, n’a pas permis à la chanson de connaître un renouveau commercial. Pourtant,« Walking in the Park with Eloise »représente bien plus qu’un simple morceau de musique. Il est l’exemple parfait de la capacité de McCartney à puiser dans ses souvenirs familiaux et personnels pour nourrir sa créativité, tout en rendant hommage à l’influence de son père. McCartney ne s’est pas contenté d’enregistrer un morceau anecdotique, mais a su l’inscrire dans un univers musical qu’il chérit particulièrement, celui de Nashville, avec ses sonorités douces et chaleureuses, et ses musiciens exceptionnels.
Les années suivantes ont vu Paul McCartney se concentrer sur de nouveaux projets, tant avec Wings que dans sa carrière solo, mais« Walking in the Park with Eloise »reste un épisode emblématique de cette période d’exploration musicale. En 2016, la chanson a été réarrangée pour la bande-son du film d’animationEthel & Ernest, où elle prend une nouvelle dimension orchestrale sous la direction de Carl Davis, le compositeur de la musique du film. Cette réinterprétation moderne démontre que l’œuvre de McCartney, qu’elle soit issue de ses racines familiales ou de ses recherches musicales personnelles, reste intemporelle et capable de s’adapter à de nouveaux contextes.
« Walking in the Park with Eloise » : un trésor intime
“Walking in the Park with Eloise”n’a jamais eu la reconnaissance commerciale qu’il méritait, mais son histoire reste un témoignage poignant de la complicité familiale entre Paul McCartney et son père. Une chanson écrite dans l’ombre de la célébrité, mais qui, à travers sa simplicité et son honnêteté, a su toucher ceux qui ont pris le temps de l’écouter. McCartney, en la réenregistrant et en la rendant publique, a non seulement honoré la mémoire de son père, mais a également prouvé que même dans un monde où les succès sont mesurés à l’aune des ventes et des classements, l’essence de la musique réside parfois dans les gestes les plus personnels et les plus discrets.
Ainsi,« Walking in the Park with Eloise »restera à jamais un fragment d’histoire musicale, un lien entre les générations, une empreinte de l’amour filial et un hommage sincère à l’héritage d’un père modeste et discret, mais qui, par son unique composition, a laissé une marque indélébile dans le monde de la musique. Paul McCartney, à travers cette chanson, a su partager ce moment d’intimité avec le monde entier, nous rappelant que derrière chaque chanson, il y a une histoire, souvent bien plus profonde que ce que l’on peut imaginer.