Ce post Instagram d’une psychologue et d’une psychiatre, il est tellement révélateur de la façon dont les soignants en psychiatrie, en plus généralement en médecine, nous (dé)considérent
Disons le tout de suite: non, tous les soignants ne sont pas comme ça, oui il existe des alliés, mais là je parle d’un système maltraitant, celui sur lequel les soignants alliés se cassent aussi les dents d’ailleurs, même si c’est à un autre niveau.
Mais cette façon de nous déshumaniser, de nous pathologiser, de nous classer, de nous réduire, elle est bien trop souvent présente, y compris derrière des discours pseudo bienveillants
Une de mes psychiatres m’avaient dit que dans la relation de soin, elle était en position haute et j’étais en position basse. Au moins, les choses étaient claires. Mais ceux qui ne le disent pas de façon aussi directe le pensent aussi. Ils ne sont pas dans la collaboration, ils sont là pour nous imposer ce qu’ils ont décidé qui étaient bon pour nous. Et si nous ne nous y plions pas, on se le verra reprocher à coup de C’est pour votre bien, Vous ne voulez pas être aidé, Vous ne faites pas d’efforts pour vous en sortir.
De l’aide, j’en ai beaucoup demandé. Mais elle n’a pas souvent été adaptée à mes besoins. Elle a même aggravé ma situation dans la plupart des cas. Et donc, non, je ne veux plus tout accepter. Je ne veux pas être aidée à n’importe quel prix.
Je repère assez vite les discours creux, tout faits, les éléments de langage pseudo bienveillants appliqués à tout le monde. Et je ne les supporte plus du tout
Une des phrases que je trouve assez insupportable, c’est « Qu’est-ce ce que je peux faire pour vous ? » Je n’en sais rien moi, je ne suis pas médecin / assistante sociale / kiné, etc. Je peux exposer mon problème et c’est au professionnel de me dire ce qu’il peut me proposer, ce qui relève de ses compétences ou pas, si je dois plutôt aller voir quelqu’un d’autre, etc. Et quand en plus je suis déjà en pleurs, totalement à bout
Un autre élément de langage qui me rend dingue : Il faut nous aider à vous aider. J’y ai eu droit quand je suis arrivée à l’hôpital. J’étais passée par les urgences, et ma colocataire m’accompagnait dans le service. L’infirmière m’a demandé pourquoi j’étais là. J’ai dit que j’avais déjà tout raconté au psychiatre aux urgences, et elle m’a répondu « On peut t’aider, mais il va falloir que tu nous aides aussi ». Certes, mais si elle avait eu un minimum de jugeote, elle aurait compris que je n’avais peut-être pas envie de raconter les détails de ma crise psychique devant ma colocataire. Cela dit, ça va avec le manque total d’intimité de l’hôpital, on peut mettre cette demande de raconter des choses intimes en public (on était dans le couloir du service) sur le même plan que le fait de devoir me déshabiller devant quatre personnes (mon amie, une autre patiente et deux infirmières) pour mettre leur uniforme. Tu es hospitalisée, ton corps et ton esprit, ça devient open bar.
Et les injonctions « motivante » du type « Il faut passer à l’action » à une personne en burn out sévère qui n’a plus les ressources disponibles, ça donne juste envie de fuir. C’est culpabilisant et ça montre que le professionnel n’a rien compris à notre situation. Je ne suis pas là pour de la pensée positive, sinon j’ouvrirais un manuel de développement personnel. Ce type de remarque, ça m’isole encore plus, ça me montre à quel point je suis seule face à ma situation. Ça coupe le dialogue, puisque s’y opposer ferait de moi une patiente de mauvaise volonté et une personne molle et fade qui n’a pas de volonté.
Une des choses que les psychiatres adorent aussi, c’est la comparaison avec le diabète. On doit bien prendre nos médicaments
J’avais dit à un ami qu’en psychiatrie, ils ne veulent pas nous soigner, ils veulent nous domestiquer. Et c’est vraiment ça. Qu’on utilise des neuroleptiques en cas de délire et d’hallucinations, ça peut se comprendre, mais pour éliminer les comportements problématiques (selon leurs normes), éteindre nos émotions, nous faire taire en somme
Et dès que nos émotions sont un peu trop intenses, on nous parle d’hospitalisation, parce que forcément quand on vit une crise dans notre vie, c’est l’HP qui nous aidera. En réalité, qui nous contiendra, qui nous anesthésiera, qui nous fera taire, car c’est l’endroit au monde où on a le moins le droit d’exprimer nos émotions et notre douleur, si on tient à notre intégrité physique et mentale
Les personnes qui débordent un peu dans ce monde
Je ne veux plus être réduite à une maladie ou un trouble, devenir un cas, une patiente à gérer et contrôler. Ça ne veut évidemment pas dire que je ne veux plus être soignée, mais seulement par des gens qui respectent la personne que je suis. Mon kiné m’a demandé un jour si je me répétais des mantras. Ce n’est absolument pas mon genre, je ne suis pas une adepte de la méthode Coué, je sais très bien que la pensée magique ne fait que rassurer sur l’instant mais n’apporte rien de concret. Pour moi, ça n’a vraiment aucun intérêt. Mais finalement, j’ai peut-être trouvé mes propres mantras, quoiqu’à la réflexion ce sont sans doute plutôt des principes de vie, mais en tout cas j’ai deux phrases qui me guident pour le moment pour survivre: On se lève et on se casse (du cabinet du soignant maltraitant, ou au moins on n’y retourne pas, merci Virginie Despentes
J’ai été déconsidérée pendant des décennies et aujourd’hui j’ai décidé de me reconsidérer. Avec le soutien de mes pairs autistes