Paul McCartney, figure emblématique des Beatles, dévoile dans « Waterfalls » une introspection musicale alliant conseils parentaux et quête d’authenticité. Né lors d’une période expérimentale, ce morceau minimaliste, porté par piano électrique et synthétiseurs, reflète l’évolution créative de l’artiste. Initialement mis de côté, il trouve sa place dans l’album « McCartney II », transformant une production brute en une œuvre sincère et émouvante, véritable reflet de son univers intime.
Paul McCartney, une figure incontournable de la musique populaire, a su se réinventer sans cesse tout au long de sa carrière, tant au sein des Beatles qu’en solo. Son deuxième album solo,McCartney II, sorti en 1980, représente une période expérimentale et introspective de l’artiste, un tournant créatif. Parmi les titres notables de cet album se trouveWaterfalls, une chanson énigmatique, pleine de douceur et de mélancolie, dont les paroles résonnent comme un conseil parental, une réflexion sur la vie, la sécurité et l’amour. Cette chanson, comme tant d’autres de McCartney, nous transporte dans son univers intime, à la fois simple et profond.
Sommaire
- Une chanson née de l’introspection
- Une musique simple, mais poignante
- Une chanson imparfaite mais authentique
- Le rejet initial et la transformation en single
- Une vidéo et une campagne promotionnelle mémorables
- Un reflet de l’époque et de l’artiste
Une chanson née de l’introspection
L’histoire deWaterfallsest d’abord marquée par la relation de Paul McCartney avec ses enfants. Selon lui, la chanson a été écrite à une époque où lui et Linda, sa femme, prodiguaient à leurs enfants des conseils parentaux classiques, comme ceux que beaucoup de parents donnent à leurs enfants. Dans ses mots :“Ne montez pas dans la voiture de n’importe qui. Ne parlez pas à des inconnus.”McCartney confiait qu’à l’époque, il passait beaucoup de temps à donner ce genre de conseils à ses enfants, notamment Heather, Mary, Stella et James. Chaque chanson a sa propre genèse, etWaterfallsn’échappe pas à cette règle. Même si elle évoque une parentalité protectrice, McCartney ajoute que comme souvent dans ses compositions, le morceau a pris une tournure plus personnelle et sentimentale.“Comme beaucoup de mes chansons, cela a évolué en quelque chose de plus amoureux”explique-t-il.
En fait, la chanson a été écrite à une période où la famille McCartney vivait dans une maison au nom évocateur :Waterfalls, un cottage acheté par Paul en 1974 dans le Sussex, près de Rye. Cette demeure, d’un charme bucolique, avec ses 160 acres de terre, ses chevaux, ses moutons et autres animaux, n’a pas seulement marqué le paysage de McCartney, mais a aussi été une source d’inspiration pour plusieurs de ses œuvres. C’est dans cet environnement que le motwaterfallsest resté gravé dans l’esprit de Paul, et c’est sous cette forme que la chanson a vu le jour.
Une musique simple, mais poignante
Si les paroles deWaterfallssont frappantes par leur simplicité et leur franchise, la composition musicale l’est tout autant. La chanson s’ouvre sur un arrangement minimaliste, où l’on entend la voix de McCartney accompagnée d’un piano électrique et de quelques touches de synthétiseur. C’est une mélodie calme, presque méditative, qui colle parfaitement au ton de la chanson. McCartney a souvent exprimé que cette simplicité était voulue :“Je l’ai réduite à son minimum. J’ai voulu quelque chose de simple et direct”.
Cependant, malgré cette simplicité apparente, McCartney a confié plus tard qu’il considérait que la production de la chanson était quelque peu insuffisante.“Je pensais que Waterfalls n’avait pas reçu l’arrangement qu’elle méritait. À l’époque, on pensait que les synthétiseurs étaient la solution à tout, mais ce n’était pas toujours le cas.”Pourtant, malgré ce qu’il jugeait comme une production inachevée,Waterfallsest devenue l’une de ses chansons préférées, une œuvre qu’il apprécie particulièrement pour sa sincérité brute et son côté organique.
Le processus créatif de McCartney pourWaterfallsest également intéressant dans la mesure où il a décidé de réutiliser une ancienne chanson, non terminée, datant de la période de Wings, le groupe qu’il avait formé après la dissolution des Beatles. Selon McCartney, le morceauWaterfallsaurait pu à l’origine s’intitulerI Need Lovemais le titre lui semblait trop banal. Ainsi, il choisit de garder le thème des chutes d’eau, qui selon lui, était en lien avec des affiches vues dans des stations touristiques américaines. Ce choix semble avoir été intuitif et parfaitement adapté à l’atmosphère de la chanson.
Une chanson imparfaite mais authentique
Il est fascinant de constater que Paul McCartney a ressenti le besoin de revenir sur les paroles deWaterfalls, qu’il jugeait initialement comme étant « brutes » et « non-polies ». Ces paroles étaient « jetées » sans beaucoup de réflexion préalable, et il pensait qu’elles n’étaient pas suffisamment sérieuses. Pourtant, après quelques hésitations, il est revenu sur ses impressions et a fini par accepter ces paroles telles qu’elles étaient, affirmant que“plus je les écoutais, plus je les aimais”. Ce processus de réappropriation des paroles brutes et non filtrées montre l’authenticité qui est au cœur de son travail.
De plus, McCartney a enrichiWaterfallsd’un jeu de piano électrique et de sons de synthétiseur imitant une sorte d’orchestre fou et distant sur une montagne, un effet qui, selon lui, fonctionnait étonnamment bien. Ce choix de sonorités s’inscrit dans un contexte particulier de l’époque, où les synthétiseurs étaient en pleine ascension. Mais au-delà de l’aspect technique, il est surtout question de la mise en scène émotionnelle que McCartney cherche à transmettre à travers ce morceau.
Le rejet initial et la transformation en single
Comme beaucoup d’œuvres de McCartney,Waterfallsn’a pas immédiatement trouvé sa place dans le paysage musical. Le morceau n’a pas été inclus dans l’album de Wings,Back to the Egg, car McCartney n’était pas satisfait de ses paroles. Cependant, il a eu un second souffle dans l’albumMcCartney II, où il a été réarrangé et retravaillé. C’est à ce moment-là que McCartney a véritablement senti que la chanson méritait d’être écoutée par un plus large public.“J’ai fini par l’apprécier et j’ai décidé de la garder telle qu’elle était. Elle est devenue l’une de mes chansons préférées de l’album”.
Cependant, malgré l’enthousiasme de McCartney,Waterfallsn’a pas rencontré un grand succès aux États-Unis, bien qu’il ait atteint la septième place des charts britanniques. En réalité, cette chanson est restée relativement discrète dans l’histoire de McCartney, mais elle reste un témoignage précieux de son approche créative, marquée par l’expérimentation et la recherche constante de simplicité et d’authenticité.
Une vidéo et une campagne promotionnelle mémorables
Pour accompagner la sortie deWaterfalls, McCartney a réalisé un clip vidéo particulier, filmé en juin 1980. Ce clip présente un ours polaire nommé Olaf, provenant du cirque Chipperfields, et tourné dans un hangar d’avion décoré de polystyrène pour simuler la neige. Si l’on peut se demander en quoi un ours polaire et des montagnes de polystyrène sont en lien avec une chanson commeWaterfalls, l’absurdité et l’imaginaire qui s’en dégagent renforcent l’aspect onirique et décalé du morceau. La chanson elle-même, avec ses sonorités douces et ses paroles un peu décalées, correspond bien à cette esthétique.
Un reflet de l’époque et de l’artiste
En définitive,Waterfallsest un morceau fascinant qui incarne à la fois l’expérimentation et la simplicité chère à Paul McCartney. C’est une chanson qui parle de la protection parentale, de l’amour et des préoccupations humaines les plus profondes, tout en explorant des territoires musicaux audacieux pour l’époque. Alors que beaucoup de ses contemporains se lançaient dans des projets grandiloquents et complexes, McCartney, lui, a choisi de revenir à l’essentiel : une chanson douce, intimiste et émotive.
À traversWaterfalls, McCartney nous livre une œuvre sans fioritures mais d’une grande beauté, tout en nous montrant l’artiste qu’il est : un créateur capable d’accepter ses imperfections et de transformer la spontanéité en art.