➼ Le pré-show, avant le spectacle, avec un dîner (mais ça peut être un déjeuner) ponctué d'interventions artistiques et musicales, ➼ Le spectacle équestre, aérien, musical et saltimbanque,➼ L’after-show qui est une occasion complémentaire de rencontrer les artistes et d'échanger avec eux.
Il faut que je mentionne aussi l'arrivée depuis le Carrefour des Cascades parce que les photos que Yann Arthus-Bertrand a faites des chevaux sont d'une beauté à couper le souffle. Les températures hivernales ne nous retiennent pas de les admirer.
Et je peux vous dire que j'ai été très impressionnée par l'arrivée sur le tapis bleu du hall de Sirius, un Frison considérablement plus grand que moi (le haut de ma tête pouvait passer sous la sienne sans la frôler). L'animal semble d'une solidité à toute épreuve. Il était pourtant arrivé très malade, craintif et maladroit mais il a été soigné six mois avec détermination et amour. Il est aujourd'hui le leader du groupe. Les chevaux de cette race portent toujours une robe noire, leur valant le surnom de "perle noire". Pour ceux qui connaissent, Zingaro, l'étalon fétiche de Bartabas est un Frison. La famille Gruss en compte six. Ce sont les plus polyvalents.
Les plus petits sont les chevaux arabes, de race Barbe, à la robe alezan, très agiles en saut. Arrivèrent alors les chevaux ibériques, 22 pur-sangs espagnols ou portugais qui sont d'habitude utilisés en tauromachie et qui salueront dressés sur leurs pattes arrière. Ensuite les chevaux de trait, qui sont les plus belles races françaises, Cob normand ou Comtois. Sans oublier les petits poneys britanniques originaires des îles Shetlands, au nord de l’Écosse.
C'est Maud Gruss qui dirige désormais la cavalerie et l'émotion sera à son comble à la fin du show quand elle recevra la médaille d'argent de l’Ordre du Mérite agricole des mains de la Colonel Marie-Audrey Leheup, commandant du régiment de cavalerie de la Garde républicaine. Cette décoration salue un parcours et une vie dédiée au travail, à des valeurs tant défendues par le fondateur de la compagnie.
Pour avoir eu la chance de le voir diriger ses chevaux dans le superbe spectacle Quintessence, j'ai encore en mémoire l'apparente facilité avec laquelle il obtenait tout ce qu'il voulait … mais aussi qu'il ne faut relâcher la vigilance à aucun moment. Nul doute que son art inspirera encore de nombreuses générations.
Pour résumer son immense parcours il convient de rappeler qu'il est né en 1944 dans la caravane de sa grand-mère et qu'il a fait ses débuts devant le public à l'âge de 7 ans dans un numéro de voltige équestre, sur la piste du Radio-Circus. Il a connu en 1955, avec sa sœur Bella, son premier beau succès avec un pas de deux équestre. Il n'avait que 11 ans !
Il épouse Gipsy Bouglione en 1970. Nous la verrons tout à l'heure dans un moment musical. Ce fut le plus jeune directeur de cirque français à 27 ans. Il serait fastidieux de dresser la liste de ses médailles. Je ne citerai que le Grand Prix National du Cirque en 81, Chevalier de l'Ordre des Arts et des Lettres en 84, évidemment Chevalier de l'ordre du Mérite agricole, mais aussi Chevalier de la Légion d'honneur en 98 …
Il avait créé le Cirque à l'Ancienne qui s'est produit à partir de 1974 dans la cour de l'hôtel Salé à Paris et qui a fait l'inauguration du Centre Beaubourg en 1977. Il se produira à Berlin, Venise et même dans le cadre du Festival d'Avignon en 1989. Il fut l'organisateur de la première biennale des arts du cirque à Lyon en février 1995.
C'est encore la famille Gruss que l'on voit à l'oeuvre dans le film de Claude Lelouch, Itinéraire d'un enfant gâté (1987). Hélas le coeur de ce travailleur "infatigable" a lâché le 6 avril 2024.
Sur la piste, acrobates, musiciens, écuyers, équilibristes, jongleurs, chanteurs et comédiens vont se succéder en incarnant leur propre rôle : celui d’artistes en pleine création qui cherchent, tentent, inventent et finissent par donner vie à un spectacle magnifique.
Stephan Gruss en a écrit chaque réplique. Il a supervisé la composition de chaque mélodie, de chaque chanson, imaginé chaque tableau. Après l'ouverture sur un carrousel époustouflant par les 50 chevaux nous allons assister à une conversation vivante entre les générations où chaque scène révèle un pan du patrimoine familial. Bien entendu chaque chanson est interprétée en direct, nouvelle chanteuse Margot Soria, sur des musiques composées spécialement pour la saison et exécutée en live par l'orchestre.
Acrobates, musiciens, écuyers, équilibristes, jongleurs, chanteurs et acteurs se succèderont et nous toucheront en plein coeur.Le numéro d'échelle existe depuis une quarantaine d'années mais cette fois il est encore plus spectaculaire en duo, s'achève en apothéose, avec une note d'humour à laquelle nos n'étions (pas encore) habitués. Plus tard le numéro des deux clowns sera agréablement divertissant. Le tir à l'arc combiné avec des flammes nous a grandement impressionnés. L'agilité des jongleurs (on reconnait l'esprit de Gipsy dans leur travail) est remarquable. Les acrobaties des deux frères Gruss, dignes fils d'Alexis, sur un frison et un arabe sont époustouflantes. Alexander Malachikhin nous a sidéré dans son numéro de sangles comportant un grand écart à une vingtaine de mètres au-dessus du sol.Voir à la corde lisse et à la corde volante la sixième génération était émouvant. Jeanne Gruss, la fille de Firmin, a présenté un numéro très original et Pauline Mikolaczyk que j'avais également admirée dans le pré-show est une artiste incroyable. J'ai aussi beaucoup aimé les femmes en jockey. Et mention spéciale encore à une femme, Svetlana Lobova Gruss, ancienne nageuse artistique de l'équipe nationale russe, épouse de Firmin et acrobate émérite, capable aussi de nous faire sourire avec son humour. Il faudrait aussi citer Gloria, Célestine ou Venecia …Personne ne doutera qu'ils ont tous intégré le mot d'ordre du patriarche : répéter, répéter, répéter ! Et sac formule : Sers-toi de ta tête, pas de tes muscles, sinon tu vas perdre …
Maud semble ne pas diriger les 6 frisons qui reculent devant l'immense cheval blanc dressé sur ses pattes. Ce numéro, emblématique du travail de son père, est présenté à la perfection. Personne n'en aurait d'ailleurs douté.
J'ai également apprécié un moment musical évoquant les Tambours du Bronx en apportant une touche de modernité. Et le final est égal à mon souvenir. Magique.
Remontons dans le temps pour vous faire revivre ce moment si particulier du "pré-show" qui a commencé par l'installation dans un chapiteau dédié, à une table ronde pouvant accueillir 2 à 4 personnes, recouverte d'une vraie nappe en tissu, impeccablement repassée. Le service est digne d'un restaurant alors que les conditions d'exercice sont difficiles. L'espace est immense. La cuisine "campe" sous une toile. J'aurai à coeur de saluer le chef à la fin. Bravo à lui et à son équipe.