La volonté, ou le désir ?

Par Marc Traverson

Quand on veut, on peut, dit la sagesse populaire. Est-ce à dire que si nous échouons c'est que nous n'avons pas voulu assez les choses ? Et, dans ce cas, est-ce qu'il suffirait de faire acte de volonté pour se remettre sur les bons rails et obtenir ce qui nous tient à coeur?

Certains clients viennent me voir parce qu'ils ne sont pas sûrs de savoir ce qu'ils veulent. C'est même là leur principale difficulté. Ils ne sont pas certains de la direction dans laquelle ils veulent aller, parce que rien ne s'impose à eux. C'est comme de se retrouver à une croisée des chemins, sans raison particulière de choisir une route plutôt qu'une autre. Ils ont conscience de l'importance de se mettre en mouvement, mais les objectifs qui se présentent à eux ne les mobilisent pas. Comment faire ? Que choisir ?

D'autres ont un sentiment inverse, ils font beaucoup d'efforts pour parvenir à leur but, mais les vents sont contraires, au point que la ligne d'arrivée semble toujours plus lointaine. Ils sont volontaires, c'est-à-dire qu'ils agissent conformément à leur objectif, ils se projettent vers ce but, et y consacrent beacoup d'énergie. Ils veulent, mais ne peuvent pas... Et le doute, là encore, s'installe. Est-ce que le volontarisme ne suffirait pas ?

« Ce qui m'a frappé dans le travail que nous avons fait ensemble, m'a dit une cliente, c'est que je croyais vouloir un coaching pour renouer la communication avec ma supérieure hiérarchique, et j'ai découvert que ma motivation profonde était tout à fait différente, que j'avais surtout besoin de retrouver du plaisir dans ma vie personnelle, de me remettre à chanter et à faire du sport. Ce qui m'a permis d'aborder le travail avec une autre attitude, et de régler ce que je croyais être ma difficulté. »

Contrairement à ce que laisse entendre la sagesse populaire, la volonté ne peut pas tout. Et même, elle ne peut pas grand chose si elle ne correspond pas à notre motivation profonde, notre désir. Et les deux ne coïncident pas toujours !

C'est ce qu'exprime le philosophe Spinoza, lorsqu'il nous invite à ne pas nous leurrer sur notre libre arbitre. « Nous ne pouvons qu'agir comme nous agissons, nous n'avons pas d'autre choix, car notre action n'est que l'expression de ce que nous sommes. Agir autrement signifierait être quelqu'un d'autre. (...) Que penserions-nous d'un olivier voulant donner des pommes ? » (Balthasar Thomass, Etre heureux avec Spinoza, Eyrolles) Sur le plan du développement personnel, cela signifie que nous devons avant tout identifier notre nécessité intérieure, nos motivations profondes – parce qu'elles ne relèvent pas d'un choix, mais sont une part de notre nature. « La question importante n'est donc pas de savoir comment changer soi-même, mais comment changer son environnement afin que notre nature puisse s'y exprimer. Il peut s'agir de trouver un envionnement qui convient à cette nature, comme il peut s'agir de transformer un environnement déjà existant. »

Ce n'est pas qu'une subtilité philosophique. Puisque c'est à partir de cette compréhension de nous-même – lorsque nous savons quel nord indique notre boussole – que nous pouvons prendre des mesures volontaires pour faire avancer les choses, pour permettre à nos potentialités de s'épanouir. Et c'est bien l'un des objectifs du coaching que de nous donner un espace dans lequel nous pourrons travailler à faire émerger ces nécessités intérieures sans lesquelles notre volontarisme ne serait qu'une dépense d'énergie inutile et vaine, faute d'être au service de notre véritable désir.

Image : peinture de Zao-Wou-Ki via blog MyArts