Jack Lang : l’anti-Darcos

Publié le 12 septembre 2008 par Hmoreigne

Il tient sa revanche. Méprisé par les siens, suspectés de délit de lèse-Sarkozysme, Jack Lang s’est engagé dans un beau combat : la défense de l’école. Conscient que dans une société qui se délite il faut revenir aux fondamentaux, aux creusets de la République l’ancien ministre mène une véritable croisade contre Xavier Darcos, un ministre de l’éducation des plus politique de ces dernières années. Après avoir publié « L’école oubliée, Lettre à Xavier Darcos » Jack Lang dénonce désormais les mensonges du ministre de l’Education.

« C’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure soupe ». Jack Lang semble donner raison au proverbe. Dans le désert idéologique d’un PS absorbé à se choisir un roi, le vieil éléphant a choisi de faire entendre son barrissement. Les propos de l’ancien mitterrandolâtre sont d’autant plus intéressants que le combat semble désintéressé et que celui qui les tient connaît parfaitement son sujet.  

Ah l’école… Des décennies d’affrontement entre la gauche et la droite, entre catholiques et laïcards et un terreau qui a longtemps fourni le gros des troupes du parti socialiste. Le réformisme revendiqué de Nicolas Sarkozy ne pouvait épargner un secteur aussi sensible. Dans un casting irréprochable le président de la république a confié la mission à la fois de dégraisser le mammouth et de le faire courir à Xavier Darcos.

Darcos, un vrai politique qui connaît parfaitement son sujet pour avoir été directeur de cabinet d’un certain François Bayrou, insipide ministre de l’éducation nationale sous le gouvernement Juppé, avant de devenir lui-même ministre délégué à l’enseignement scolaire de Jean-Pierre Raffarin. Fini l’immobilisme apeuré des années Chirac. Nicolas Sarkozy a donné carte blanche à son ministre de l’Education et celui-ci ne s’en prive pas : organisation du temps scolaire, effectifs, contenu des programmes, réforme des IUFM … on n’arrête plus Xavier Darcos.

Enfin pas tout à fait. Après la blessure personnelle d’un échec aux municipales de Périgueux, Xavier Darcos se voit contraint de débattre avec Jack Lang. Abandonnés par le PS, les forces de gauche de l’éducation nationale, et au-delà, sont heureuses de s’être trouvé un champion, même franc-tireur, pour défendre leurs couleurs.

Dans son livre aux allures de pamphlet sorti le 20 août, Jack Lang ne décrit pas un ministre réformateur mais destructeur et ne voit dans les actions de son lointain successeur qu’une logique comptable qui conduit inéluctablement à une paupérisation générale. Un appauvrissement qui touche également selon lui les contenus et les programmes. Face à ce qui ressemble à une résignation du corps enseignant qui ne semble pas prêt à se lancer dans des mouvements sociaux, le député du Pas-de-Calais multiplie les attaques sur les médias.

Sur France Info le 2 septembre, Jack Lang dénonçait l’absence de concertation dans la réduction des horaires et la concentration de l’enseignement sur quatre jours en primaire malgré toutes les études, mais aussi l’absence d’instructions sur l’apprentissage de la lecture et de l’écriture et enfin, « la poursuite de l’hécatombe des postes ». Contrairement aux affirmations de Xavier Darcos, engagé dans la suppression de 11 000 postes, selon lesquelles les effectifs d’élèves sont en baisse, Jack Lang rétorque que c’est faux, que du fait d’une démographie en ascension, ils ont grimpés.

La polémique a pris un tour nouveau quand l’ancien ministre socialiste Invité des forums de nouvelobs.com, a qualifié de “mensonge” l’argument du ministre de l’Education  selon lequel les suppressions de postes se justifient par une baisse de la démographie. “Malheureusement les télévisions officielles répandent la parole gouvernementale, sans que l´opposition puisse répondre. La vérité est la suivante : la démographie à l´école primaire a augmenté très sensiblement ces dernières années”, a-t-il déclaré. Et d’ajouter : “Pour la première fois en 6e, le nombre d´enfants augmentera. Hélas le gouvernement continuera à détruire les postes. Son argumentation sur la démographie est donc malhonnête.” Très en verve, l’ancien ministre a dénoncé “la méthode gouvernementale actuelle”, fondée selon lui “sur le secret, l´absence de dialogue, l´improvisation et le cynisme”.

Un cynisme qui, il est vrai, va jusqu’à allouer d’alléchantes primes (5OO € pour les heures supplémentaires, 1500 € pour les nouveaux professeurs),  aux enseignants, pour mieux les diviser. Jack Lang se trouve bien seul. Il l’avoue et le regrette. « L’école, c’est un trésor de la république et j’appelle mes camarades à se battre ». La question est désormais de savoir s’il sera entendu.