Mais oukison les netocrates ?

Publié le 15 septembre 2008 par Peggoche

Depuis que j'ai traduit le livre d'Alexander Bard et de Jan Söderqvist, j'ai mis le bout du pied dans un monde que je connaissais auparavant relativement peu : celui des entrepreneurs en NTIC et autres post-yuppies cools. Comme je l'avais déjà remarqué lors de mon passage en Suède à un salon pro du secteur, les vrais netocrates, tels que les décrivaient Alexander et Jan – le premier était d'ailleurs décidé à ne plus y remettre les pieds (jusqu'à preuve du contraire, il a tenu parole), quand le second s'enfonçait encore un peu plus dans son cynisme lunaire –, n'étaient pas légion.

De retour en France et au moment de la sortie du livre, je me suis un peu occupée de sa promotion et j'ai été amenée à rencontrer ceux qui était censés le plus s'approcher du concept, en particulier au sein de cette fameuse blogosphère influente dont on entendra certainement parler d'ici peu, et pas qu'en bien (ceci est du teasing).

Ce que j'en retire, pour l'instant : rien. Ou si : que le premier netocrate n'a pas encore vu le jour dans notre si beau pays qui se demande encore si fermer les accès wifi pourrait-être une bonne chose pour protéger les royalties de Michel Sardou – à quelques exception près. Celui qui était censé nous sortir du capitalisme, de la politique verticale, de l'Etat-Nation, de l'humano-humanisme, nous montrer l'ère nouvelle où l'argent n'aurait pas la valeur de l'information (l'information de qualité, talentueuse, précisent maintenant les deux Suédois alors qu'une masse de signaux plus merdiques les uns que les autres nous arrivent sur le coin de la gueule) est toujours aujourd'hui lettre morte dans un milieu où une plateforme permettant de « converser » en vidéo est vue comme le nec plus ultra de l'innovation (please, kill me) et où les blogueurs influents se lèchent les uns les autres entre consanguins, afin de nous montrer comment, trop drôle, avoir son avatar en manga ou sa tronche avec une coupe de cheveux 50's a vraiment un-sens-tu-vois au niveau de ce-que-tu-es.

Cette élite supposée ne fait rien d'autre qu'appliquer les mêmes schémas que ceux qui ont fait crever son ancêtre à col bleu avant elle. Comme toujours, j'assisterai aux funérailles avec mon air moqueur.

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Travaux pratiques :

Comme tous les jours ou presque, je me rends sur le blog d'Mry que je considère, du haut de ma petite personne, comme le parangon du blog pourri (d'un genre grave) et je tombe là-dessus.

J'écoute, je m'avale 12 Deroxat et si je résume bien la chose, ça donne que :

> c'est pas juste, les blogs de fille (entendez : carnet plus ou moins intime d'une pétasse au QI à deux chiffres, se croyant souvent super drôle pour les plus vieilles d'entre elles > car il faut bien contrebalancer la perte de souplesse vaginale) soient sous-représentés dans les palmarès et autres classements de blogs

parce que :

> un blog de fille c'est tout aussi influent parce que ça reçoit des invitations à des événements et des cadeaux (plein, même)
> un blog de fille, ça parle pas peut-être de politique (ça n'en parle JAMAIS d'ailleurs, selon l'experte) mais c'est mieux écrit que les blogs de garçons (qui parlent TOUJOURS d'iphone) qui font plein de fautes (mais qui ont la décence, au moins, de ne rien surligner en rose)

je passerai sur le côté misogyne de l'effet de la chose, au fond, je ne suis misogyne que contre les femmes qui sont à elles-mêmes leurs propres stéréotypes -je n'y peux rien, mes restes de féminisme me disent que c'est une honte d'être conne, superficielle et fière de l'être (d'avoir un blog, par exemple, pour le crier à la face du monde, en le surlignant en rose)

Qu'en retenir ? Qu'un blog influent se définit par sa soumission,et sa servitude volontaires :

> soumission à l'audience : comme pour TF1, le bien est le visité, plus t'es visité plus t'es bien, aucune notion de qualité de contenu (le talent-generated content de Bard), ce qui compte, c'est la vieille rengaine verticale du parler au peuple (parce que le peuple en a besoin)
> soumission au capitalisme marchand et à son pouvoir symbolique : c'est
trop classe d'être invité chez L'Oréal pour recevoir la dernière crème décolorante pour duvet de moustache, c'est trop classe d'être invité chez Danone pour voir Zidane faire le gentil qui aime les enfants gentils qui mange du yahourt (gentil)

En bref, pendons le dernier blogueur influent avec les cheveux de la dernière blogueuse-de-blog-de-fille et Internet aura peut-être encore de belles années devant lui.