Le Saint des Seins

Publié le 23 septembre 2008 par Francisbf

Le sein était d'une forme parfaite : en poire, comme Owen en rêvait depuis longtemps, pas trop gros ni trop petit, légèrement bronzé, avec une aréole rose sombre et un petit téton adorable fièrement dressé.

-Il est beau, hein ?

-Oui...

Il passa le dos de son index sur le dessous du sein, à la recherche d'une imperfection cachée. Il n'y en avait pas. La peau était souple et d'une douceur étonnante qui le fit frissonner.

-Je... Je peux le prendre ?

-Bien sûr, n'hésitez pas !

D'une main hésitante, il saisit le sein par en dessous. Il se nichait dans sa paume comme si c'était du sur mesure. La main d'Owen devint moite sous l'effet de la douce chaleur qu'il irradiait. Il la retira, un peu gêné, et l'essuya sur son pantalon.

-Ça ne risque rien si je le... si je le presse ?

-Pensez donc, c'est fait pour ça !

Il tâta la chair du bout du doigt, expérimentalement.

-Vous pouvez y allez à pleine main, hein, c'est solide !

Obéissant, Owen s'exécuta. La sensation était... indescriptible. C'était à la fois ferme et malléable, résistant et élastique. Enhardi, il se mit à le pétrir en s'émerveillant de la réaction de détente et de soulagement que cela engendrait en lui. C'était fantastique.

-Vous pouvez goûter, si vous voulez.

-Goûter ?

-Oui, avec la bouche. Beaucoup de gens aiment ça. Mais sans mordre, hein ! Vous ne voudriez pas le percer, hahaha !

Indifférent à la mauvaise plaisanterie, Owen prit le sein à deux mains et le porta à sa bouche. Un instant, il s'enivra du parfum propre et sucré qui s'en dégageait, puis il tira la langue et lécha maladroitement le bout du téton. Un goût d'une amertume huileuse envahit ses papilles. C'était dégueulasse !

En crachant et jurant, il lâcha le sein qui tomba par terre avec un petit " schlopf " sourd et liquide.

-Mon dieu, je suis désolé !

Le vendeur se précipita vers son bureau d'où il revint instantanément avec une bouteille d'eau, qu'il tendit à Owen, un vaporisateur et une peau de chamois.

-Je suis confus, bafouilla-t-il tout en aspergeant et essuyant le sein qu'il avait ramassé, je suis vraiment confus, c'est de ma faute... Certains clients aiment utiliser le sein comme coussin ou oreiller, et on a même quelques détraqués qui se servent volontairement du téton pour se curer les oreilles... J'ai dû mal surveiller, je suis vraiment désolé !

Owen tenta de faire passer le goût répugnant du cerumen avec une gorgée d'eau, sans grand succès.

-Ce n'est pas grave... Il me paraît très bien. Je le trouve magnifique, et d'un confort !

-C'est également un de mes favoris. Mais je ne vous ai pas encore présenté nos modèles maternels, au potentiel déstressant encore supérieur ! Venez, ils sont au fond du magasin !

Il entraîna Owen dans une deuxième salle, un peu moins vaste que la précédente, mais aux murs également tapissés d'étagères et de présentoirs couverts de velours accueillant des seins classés par couleur, taille, dimensions des aréoles. D'un geste, le vendeur désigna l'étagère du fond, où étaient disposés des seins plus volumineux que la moyenne (mis à part les exemplaires de démonstration en vitrine), et annonça fièrement :

-Ces petits bijoux sont le nec plus ultra de la bioingéniérie mamellaire : ils sont aussi fermes et confortables que tous nos modèles classiques, mais disposent en plus d'un réservoir, que vous remplissez du liquide de votre convenance. La capacité atteint une tétée d'une bonne demi-heure ! Il faut juste s'assurer de bien nettoyer le réservoir après chaque utilisation, pour éviter les risques de contamination par des bactéries si vous utilisez du lait. Nous vendons d'ailleurs des packs de lait en poudre et des kits de rinçage du réservoir, et on vous en offre un de chaque en cadeau pour tout achat !

-Merci, mais je crois que je vais tout de même en rester à mon choix initial. Ce sein était parfait.

-Très bien, monsieur. Je vous rappelle notre promotion du moment, pour un sein acheté, le deuxième à moitié prix !

-C'est intéressant, mais je dois me contenter de celui-ci. La sécu ne rembourse toujours pas plus d'un sein, et je suis étudiant...

-Très bien, monsieur.

Owen sortit du magasin son sac sous le bras, longea la vitrine du magasin et son exposition de reproductions de seins de célébrités de l'Ancien Temps, et prit le bus pour rentrer.

Assis seul au fond du véhicule, il se mit à rêvasser les yeux ouverts à ce que serait le monde si le Conseil des Nations Unies n'avait pas décidé en 2050 de supprimer le sexe féminin de la surface de la planète, une fois acquise la technologie de l'utérus artificiel permettant la gestation d'enfants en laboratoire. Selon toutes probabilités, si on avait laissé faire la nature humaine comme elle faisait depuis des millénaires, l'espèce courait à sa perte. Les hommes, pour impressionner les femmes en vue de copuler, auraient continué à rivaliser d'arrivisme, car à quoi rimaient les inégalités extrêmes aujourd'hui disparues, si ce n'est aux dérives d'un monde régi par la sélection naturelle, poussant les hommes à s'écraser les uns les autres afin de séduire un maximum de femelles ? Et ces femmes assoiffées de sexe et au désir de maternité insatiable auraient sans doute continué de surpeupler la planète, et jamais il n'aurait été possible de stabiliser à trois milliards, la population actuelle, suffisamment faible pour ne pas surexploiter les ressources de la planète.

La destruction des femmes était sans doute ce qui avait permis de sauver l'espèce humaine, et c'était tant mieux.

Ceci dit, il faut reconnaître qu'elles avaient quand même quelques avantages dont la perte avait eu sur le moral masculin un impact difficile à imaginer à l'époque. Heureusement que les progrès de la technologie y avaient remédié.

Plus rien ne pouvait entraver l'avancée inexorable de l'Homme vers le bonheur.