Nicolas Sarkozy, la finance et l’incompétence: mais où est passée la com de crise?

Publié le 05 octobre 2008 par Lgb

À mesure que la crise financière s’étend au monde entier, la France se transforme inexorablement: petit à petit, la voilà qui devient un gigantesque laboratoire expérimental, où les grands principes de la communication politique se trouvent mis à l’épreuve.

L’expérience est simple. Elle vise à déterminer si la crise financière est soluble dans la communication, et si le réel peut plier sous les coups répétés du discours et du spinning.

Pour l’instant, les résultats sont peu encourageants. Le réel a le mauvais goût de ne pas céder aux incantations de Notre Extraordinaire Président. Et la crise, mauvaise fille, refuse de disparaître alors même que Notre Guide Suprême a proclamé qu’elle ne toucherait pas notre beau pays.

Ce n’est pourtant pas faute de se démener. Car après avoir gardé un silence pesant sur le sujet (incapacité? indifférence? fatigue extrême comme il le disait lui-même?), Notre Pourfendeur des Marchés a rassuré la France depuis Toulon en nous assénant quelques vérités bien senties.

Vite, une idée!

En gauchiste nouveau genre, il a dénoncé le “capitalisme financier qui avait imposé sa logique à toute l’économie et avait contribué à la pervertir”. Il a eu le courage de s’en prendre aux “responsables de ce naufrage” qui, bien sûr, devront être “sanctionnés”. Enfin, il nous a tous rassurés:

“Je n’accepterai pas qu’un seul déposant perde un seul euro parce qu’un établissement financier se révèlerait dans l’incapacité de faire face à ses engagements”

Promesses bidons, envolées contre des ennemis non identifiés : du grand populisme en somme. Et du populisme qui n’a pas froid aux yeux, puisqu’il contredit directement les propositions du candidat Sarkozy qui, avant la crise, trouvait que le délire hypothécaire avait malgré tout du bon.

La ligne était fixée, les décisions furent prises : on décida de renflouer Dexia, à hauteur de 6,4 milliards d’euros. Alors même qu’on ne trouve pas un fifrelin pour le RSA, qu’on vire autant de profs que possible et que l’on ferme toutes les vannes, soudain, les caisses de l’État sont transformées en cornes d’abondance. Pas question “qu’un seul déposant perde un seul euro”! Alors on a fait mieux que cela! On a permis à ces déposants de ce remplir les poches, comme le remarquait Le Monde:

Le titre Dexia, suspendu mardi à l’ouverture, s’envolait de plus de 10 % à la reprise de sa cotation sur les Bourses de Paris et Bruxelles, après le renflouement du bancassureur par les pouvoirs publics belges, français et luxembourgeois. A 11H10, l’action Dexia grimpait de 13,47 % à 8,17 euros et se hissait en tête des valeurs vedettes. L’action du groupe franco-belge avait fini lundi sur un plongeon de 28,50 % à 7,20 euros, pénalisée par des rumeurs d’augmentation de capital.

Dur, évidemment, de faire avaler la pilule au contribuable. On tenta donc d’expliquer d’où proviendrait l’argent , et la grande cacophonie commença, par une brillante idée de Dame Lagarde:

“Une des possibilités parmi plusieurs” pour financer le plan de renflouement de Dexia serait le recours aux recettes de privatisation d’EDF, a en effet lâché Jean Arthuis, le président de la commission des Finances, à l’issue d’une audition à huis clos avec la ministre de l’Économie Christine Lagarde. L’argent de la cession d’une petite partie des parts de l’État dans EDF doit normalement financer le plan “campus” de rénovation des terrains universitaires. “En situation d’urgence, la décision peut changer”, a également soutenu le sénateur Philippe Marini (UMP).

Ainsi, Dame Lagarde et ses sbires soulignaient, dans un style toujours élégant, que pisser sur l’avenir des étudiants de France, alors même que 75% des Universités sont en train de crever la gueule ouverte faute de moyens, était “une des possibilités parmi plusieurs”. Rappelons que Dame Lagarde a été sacrée, il y a peu, plus nul ministre de l’économie d’Europe. Le titre est amplement mérité.

Deuxième couche : Fillon qui appelle à l’unité nationale:

“le sens de l’intérêt général doit l’emporter sur celui des intérêts particuliers, la volonté d’unir nos forces et nos idées doit supplanter le goût de nos divisions”

Bref, tout cela n’est pas très convaincant…

Prospective charitable

Mais parce que j’ai moi aussi peur pour mes minables économies, et que je ne souhaite pas que la France entière, terrorisée par les reportages alarmistes diffusés par Téléplouc, se rue pour sortir ses économies, j’ai décidé de faire acte de générosité et d’apporter ma contribution communicante pour aider, une fois n’est pas coutume, Nicolas Sarkozy à nous sortir de la brenne.

Solution n°1 : annoncer que Carlita est enceinte! Voilà qui changerait la face de la France (sinon du monde), et rendrait aux Français toute leur confiance. Pour fêter ça, ils iraient au restaurant, s’achèteraient quelques bières et, pourquoi pas, un slip neuf. Bref, ils penseraient à autre chose et feraient repartir notre belle économie. Et quelle joie que d’avoir un Dauphin! Tous les coeurs bondiraient, du grand patron au clodo sur sa bouche d’égoût. Soyez bénévole, monsieur le Président, donnez du bonheur dans les chaumières pour que nos sardines en boîte aient à nouveau le goût de l’allégresse!

Solution n°2 : faire enfin connaître au petit peuple, avide de savoir qui copule avec qui en haut de l’Olympe politique, l’identité du père de l’enfant de Rachida Dati, notre incompétente préférée. Un bel accouchement en prime, et la France entière halèterait au rythme des efforts expulsifs de notre multi-diplômée! Oubliée la bourse, en avant la consommation!

Solution n°3 : s’inspirer de Sarah Palin, qui a décidé de jouer à fond la carte de la démagogie pure. Miss Palin explique ainsi qu’elle vient de l’Amérique d’en bas et qu’elle représentera comme il faut “Joe Six-Pack“:

“It’s time that normal Joe Six-pack American is finally represented in the position of vice presidency,” the Republican vice presidential candidate told radio talk show host Hugh Hewitt.

Nicolas Sarkozy pourrait lui aussi aller plus loin, et traduire directement la chose en langage politicien français. Cela donnerait quelque chose du genre:

Il est temps que quelqu’un représente et défende vraiment le français moyen, Dédé la Vinasse, qui, je vous le promets, ne perdra pas un sou dans cette crise et pourra continuer à s’acheter sa Villageoise en Tetrapak!

Solution n°4 : trouver un bouc émissaire, et appeler à le punir. Car bien sûr, le bordel fiancier ambiant n’est pas dû au système lui-même, non non non, mais à des patrons voyous et à des bandits qui l’ont dévoyé! Jérôme Kerviel ferait une victime toute trouvée! Haro sur le banquier!

Solution n°5 : profiter de l’aubaine pour virer des tombereaux d’indésirables. Cela ne règlerait rien, mais au moins, ça serait fait. Maintenant qu’on a flanqué la CIMADE hors des centres de rétention et que la presse regarde ailleurs, ne devrait-on pas organiser en douce quelques charters proprets? Hortefeux, réveille-toi, qu’attends-tu mon garçon?

Solution n°6 : multiplier les blogs gouvernementaux, sur le modèle de celui que Rachida Dati a ouvert. On y verrait ainsi François Fillon donner l’exemple, en expliquant qu’il ne prendra plus le Falcon du gouvernement (cf. le Canard de cette semaine) pour emmener, aux frais de la princesse (soit 6000€ l’heure de vol), toute sa petite famille en week-end dans sa maison d’Angers… Voilà qui rassurerait les Français et leur ferait croire que l’argent public n’est pas dilapidé pour satisfaire les menus plaisirs des puissants.

Solution n°7 : faire volte-face et chanter les louanges d’une économie nationalisée. Pardon, c’est déjà fait. Au moins pour la nationalisation des pertes.

Solution n°8 : produire, aux frais du contribuable, un nouveau Vive la Crise! On pourrait utiliser des images digitales d’Yves Montand par exemple ou, à défaut, recruter Pinault qui causerait au milieu d’un décor monté par Jeff Koons…


Montand Vive la crise 1
par boudzi

Autour de lui, des français qui ont réussi expliqueraient au bas peuple comment faire. On nous apprendrait ainsi comment profiter du bouclier fiscal en gérant au plus juste nos petites économies et, surtout, à ne pas nous plaindre! Car, dans l’affaire, ce sont quand même les riches qui risquent de perdre le plus, car ce sont eux qui ont le plus à perdre, il faut en avoir conscience! Ainsi, on nous instillerait l’espoir de faire un jour du pognon, tout en excitant en nous la joie de ne pas avoir encore les soucis des riches!

Ou, comme on dirait chez Huxley, Ah, comme je suis content d’être de classe Gamma! Au moins, je n’ai pas tous les soucis des Alpha!