Cliente

Par Rob Gordon
« La vie c’est pas du tiramisu ». Citation extraite de l’un des morceaux d’un rappeur dont on ne veut surtout pas retenir le nom, et qui a écrit (c’est comme ça que ça s’appelle) une partie de la bande originale du nouveau Balasko. Non, c’est vrai, la vie c’est pas du tiramisu, pas plus que Cliente n’est un bon film. Certes, le postulat était courageux, mais le développement a de quoi donner de l’urticaire de par sa tiédeur et sa fréquente grossièreté. On se demande bien ce qui, là-dedans, a longtemps effrayé les producteurs, qui refusèrent tout net de financer un tel projet, contraignant Balasko à en faire un bouquin (à succès) avant de pouvoir en faire un film. Le film a beau parler d’une femme qui se paye des hommes (et surtout un, en l’occurrence), il ne brise aucun tabou, n’apporte aucune information intéressante, n’offre aucune peinture de ce milieu méconnu. Le rapport gigolo - cliente n’est en fait utilisé que pour huiler les ressorts d’un mélodrame pleurnichard et souvent hystérique, qui ne fait pas de mal à une mouche mais peut rapidement exaspérer.
Dès la mise en place du sujet, on sent que ça cloche. N’assumant visiblement pas le sérieux des thèmes abordés, elle dispense çà et là des gags et répliques tagada tsouin-tsouin, qui décrédibilisent aussitôt l’ensemble. Exemple le plus édifiant, ce couple de pédés façon Cage aux folles, qui envisage de regarder Brokeback mountain. Qu’est-ce que ça fait là ? On n’en sait rien. Qu’est-ce que ça provoque ? Un désintérêt total. Mais parce qu’il reste une heure à tenir, on décide de s’accrocher tant bien que mal. Tout ça pour se taper une heure d’atermoiements d’Isabelle Carré, d’allers-retours d’Eric Caravaca (y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, mais à ce point…), et d’apparitions désespérantes des Balasko mère et fille, dans des seconds rôles ni faits ni à faire, aussi inutiles que schématiques.
Heureusement, il y a Nathalie Baye, la classe incarnée, qui s’acquitte plutôt bien du rôle le moins mal taillé du lot. Elle ne parviendra cependant pas à faire oublier la vacuité totale de ce pétard mouillé que sa fin moralisatrice au possible assure d’être diffusé en prime-time sur TF1 d’ici un an et demi. « La vie c’est pas du tiramisu » : on ne sait pas bien ce que ça veut dire, mais ça semble tout à coup plus poétique que le long téléfilm estampillé qualité France que l’on vient de subir pendant pas loin de deux heures.
3/10