New York: le prêt-à-porter printemps-été 2009

Publié le 16 octobre 2008 par Jérémy Dumont

Défilé Michael Kors pap été 09 à New York (USA)

© AFP. Stan Honda

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Source : france 2

Plus de 80 stylistes ont profité de la "semaine de la mode" pour défiler du 5 au 12 septembre 2008

Premier des quatre grands rendez-vous bi-annuels du prêt-à-porter (New York, Londres, Milan et Paris), la "semaine de la mode" américaine a défilé sous les tentes de Bryant Park à New York ou dans différentes galeries ou musées de la ville. Des plus confirmés aux étoiles montantes et aux nouvelles têtes, ils étaient tous sur les podiums.

Les défilés se sont succédé au rythme d'une dizaine par jour mais en dépit de quelques belles collections, l'atmosphère a été dominée par l'incertitude. Les experts avaient prédit une "Fashion Week" difficile à l'heure où la consommation est en baisse et où l'Amérique vit au rythme d'une campagne électorale historique qui voit s'affronter deux candidats aux antipodes, de génération et de race différentes. L'impact de la prochaine "First Lady", qui sera soit la héritière blanche Cindy McCain, soit l'avocate noire issue des faubourgs de Chicago Michelle Obama, sera important dans le choix de la garde-robe du printemps prochain, expliquent les spécialistes.

Des difficultés économiques
Alors que les chiffres d'affaires de la distribution continuent de dégringoler, deux créatrices, Anna Sui et Nanette Lepore, ont rappelé aux journalistes, célébrités et acheteuses du monde entier que tout un quartier de New York, le "district du vêtement" au sud-ouest de Manhattan, est menacé de disparition sous la poussée de la spéculation immobilière et de la délocalisation.
"Sauvez le quartier du vêtement", proclamait ainsi le T-shirt qu'Anna Sui avait choisi d'offrir lors de la présentation de sa collection, un T-shirt noir que Nanette Lepore portait lorsqu'elle a salué le public à l'issue de son défilé.
Plusieurs dizaines de milliers d'emplois sont menacés en cas de fermeture de ces ateliers, déjà réservés au "haut-de-gamme" en raison de la hausse vertigineuse des loyers à Manhattan ces dernières années.
"Il y a trop de vêtements", écrivait cette semaine le quotidien gratuit AM New York, résumant une impression générale, tandis que le New York Times titrait "une superbe façade, mais pas d'éblouissement". Juste avant la Fashion, les magazines féminins préfèraient proposer à leurs lectrices de ressembler aux icônes indétrônables plutôt que d'imposer des tendances qui risquent de s'inverser: "que feraient Greta Garbo, Jane Birkin, Bianca Jagger ou Charlotte Rampling?" se demande la rédaction de style.com (vitrine internet de Vogue et W) dans son "guide shopping d'automne". Les brèves du quotidien Women's Wear Daily (WWD) en disent long sur l'état de l'industrie: en août, les résultats trimestriels de grands magasins comme Saks ou Macy's ont poursuivi la chute observée depuis janvier.
Seul le luxe prospère, les riches étant toujours plus riches et dans un nombre croissant de pays. Le joaillier américain Tiffany a doublé ses bénéfices à 80 millions de dollars contre 40,5 millions en 2007, selon WWD qui souligne que les ventes en Asie et notamment en Chine ont progressé.
"Cette Fashion week est sans doute la plus difficile que nous ayons vécue depuis longtemps", estime dans une interview à l'AFP John Mincarelli, professeur de marketing et gestion à l'Institut de la mode (Fashion Institute of Technology, FIT). Face à la hausse du prix du carburant, à l'inflation, aux remboursements difficiles de prêts immobiliers et au chômage menaçant des pans entiers de l'économie, les ménages américains font toujours plus le choix de ne pas renouveler leur garde-robe. D'autant que le réchauffement climatique et sa cohorte de conséquences ont fait de la chasse au gaspillage et du recyclage les deux mots d'ordre du nouvel "American way of life".
Certaines chaînes de détail ont déjà tiré des conséquences de la crise, comme l'américaine Ann Taylor, spécialisée dans un prêt-à-porter classique, qui a annoncé la fermeture de 117 boutiques aux Etats-Unis dans les trois prochaines années. "On ne peut pas à la fois faire le plein d'essence et remplir des armoires déjà saturées", souligne John Mincarelli. "La tendance est morte, et tout coexiste, le long, le mi-long, le court, les ballerines et les talons de 12 centimètres", conclut-il.

                                                                                                                                                         

Sur les podiums

                                 

Un des premiers à montrer sa collection, l'Américain d'origine
franco-tunisienne Max Azria a opté pour un florilège de péplums en crêpe de soie aux teintes unies, du beige au taupe ou gris, de longs pyjamas en satin rehaussés d'éclats d'émeraude ou de turquoise et de petites combinaisons-shorts, toujours drapées, à porter sur des sandales à plateforme ou de vertigineux talons bicolores.
L'Américaine Erin Fetherston, qui s'est installée à New York  il y a deux ans après avoir étudié la mode et débuté à Paris, a fait défiler des mannequins éthérés qui portent du pastel transparent que des bustiers ornés de sequins rendent nacré. Fascinée par le ciel et les lumières différentes de Paris et New York, la styliste a voulu évoquer les reflets des nuages dans la Seine puis dans l'Hudson, dans des tenues rappelant Peau d'âne et sa robe couleur de lune dans le conte de Charles Perrault.
Présente dans la salle et omniprésente aux fêtes, Peaches Geldof, 19 ans, fille du musicien organisateur de concerts de charité Bob Geldof, incarne une génération de jeunes riches et oisifs qui vivent de l'argent de papa ou maman. Leur actuel triomphe, interprété à l'écran par les héros du feuilleton "Gossip Girl", qui met en scène des "gosses de riches" de l'Upper East Side à New York, inspire de plus en plus les créateurs. La marque française Lacoste a présenté une collection dont la deuxième partie visait à séduire la jeunesse des quartiers huppés. Cette collection ne cachait pas que le crocodile veut devenir "plus agressif" et conquérir les enfants gâtés de 18-25 ans. Si la première partie était très romantique et classique, avec des beautés longilignes portant des jupes longues beiges fendues sur des shorts, la deuxième partie a vu le podium envahi par une jeunesse arrogante vêtue de rouge, orange, jaune et vert pomme, dans de courtes combinaisons short à capuche en éponge, ou des mini-robes trapèze très "Courrège". Les mannequins semblaient avoir reçu la consigne de sourire et modèles hommes et femmes portaient panoplies de golfeurs ou raquettes de tennis, les pieds chaussés d'espadrilles orange ou de spartiates rouges. "Nous pensons qu'il est temps pour Lacoste de s'adresser à un consommateur plus jeune, et tout en restant fidèle à la marque du crocodile, d'avoir des modèles plus adaptés" aux 18-25 ans, a déclaré dans une interview au quotidien Women's Wear Daily le directeur créatif de Lacoste, Christophe Lemaire.
Hervé Léger, le chouchou du moment de Hollywood et des starlettes de la télévision, est resté fidèle à ses mini-robes en élasthanne, faites de bandelettes qui ne cachent aucun détail de la physionomie, réservées aux femmes de 25 ans qui aiment les deuxièmes peaux et n'ont pas l'intention de s'asseoir.
Pour le défilé de Diane von Furstenberg, présidente de l'association des créateurs américains, un florilège de robes en chiffon du plus court au plus long a été présenté par des mannequins aux coiffures agrémentées de lacets, rubans et fleurs.
Fidèle à sa réputation, l'"enfant terrible" de la mode américaine, Marc Jacobs, est apparu à la dernière minute sur le calendrier où il a choisi de faire scintiller une Mary Poppins à la fois chic et ludique dans une collection impeccable, bariolée, chatoyante et accessoirisée. Du galurin aplati en paille brillante, porté sur des lunettes d'institutrice des années 50, à la sandale en perles rubis ou la large ceinture drapée remontant sous la poitrine, chacun des 54 modèles a apporté un foisonnement de détails et de mélanges de tissus et d'imprimés élégants et jamais dissonants. Si les autres stylistes ont présenté des collections où toutes les longueurs sont présentes, du short à la robe longue, et où les genres sont mêlés, chez le créateur américain les jupes étaient au genou ou à mi-mollet et étroites, et on n'a vu aucun short. Mêlant créativité et humour dans ce défilé présenté à l'ancienne armurerie de New York, le styliste, qui outre sa propre maison de mode est également directeur artistique de la marque de luxe française Louis Vuitton, a résumé aux journalistes son objectif: "L'Amérique, Broadway, la naïveté, la féminité".
La Française Catherine Malandrino, installée depuis dix ans à New York, a remporté les faveurs du public au Chelsea Museum avec une collection respectant ses credos. Coiffées de petits chignons portés comme des couvre-chefs, les mannequins portaient des mousselines transparentes sur fourreaux de satin ivoire, des robes-bustier couleur menthe à l'eau, des tenues de cocktail en crochet blanc ajouré, des boléros en cuir beige surpiqués ou des petites vestes en ottoman marron glacé. La créatrice a repris le motif patriotique qui avait fait son succès il y a quelques années, et présenté deux tenues dont l'imprimé représentait la tête de la statue de la Liberté.
La Canadienne Tia Cibani, styliste de Ports 1961, une marque qui a le vent en poupe, a présenté une collection très inspirée par sa ville de Vancouver où des "squaws" portant des colliers ethniques étaient vêtues de vestes à franges et lamelles de cuir, et défilaient sous les accents "country" d'un groupe canadien présent sur le podium, les "cowboy junkies".
Ralph Lauren a décidé de fuir dans le désert: sur fond de moucharabieh, une musique arabe accompagnait 47 modèles partant en safari ou à la recherche de l'arche perdue. Des hétaïres diaphanes accompagnaient leurs tenues de harem de parures d'émeraudes, des touaregs coiffés de turbans sable étaient en sarouals bronze et or, et des casques coloniaux évitaient les coups de soleil à des beautés en sahariennes à col officier, la gourde à la ceinture. Jusqu'au clou du défilé, une femme gazelle tout d'or vêtue, bandeau en lurex assorti.
Pure, originale et inattendue sont les mots qui définissent le style G-Star qui consiste à exploiter le caractère brut du denim, depuis les débuts de la marque en 1989. 64 silhouettes, homme et femme, ont introduits une collection fluide, légère et empreinte d’un style classique où le blanc prédominé les denims plus bruts. On note des tissus d'été légers (Soil Denim ultra léger de 7 onces), un denim trois dimensions l'Arc Pant (taille basse et ample ; les jambes du pantalon s'enroulent autour de la jambe grâce à des coutures latérales et d'entrejambe retorses), des jeans Raw Listing en trois délavages et présentant des lisières rouges ou blanches... Au nombre des incontournables, on peut noter l'édition spéciale NY Raw (avec des associations inattendues marient des denims bruts à d'élégants textiles comme des laines d'alpaga et des soies délicates) et la Correct Line, une nouvelle gamme qui comprend pantalons, blazers, trenchs et chemises de soirée, ainsi que des manteaux, vestes en cuir, robes, jupes classiques et tops ultra-féminins. Tous les produits et toutes les étiquettes sont estampillés d’un saule. 

                   

                                                                                                                               

2 anniversaires pour 2 symboles du lifestyle

                                 

Donna Karan a rendu hommage à la ville pour les 20 ans de "DKNY" et Calvin Klein a organisé une fête pour les 40 ans de "CK".
Donna Karan a projeté une vidéo à la gloire de New York , où taxis jaunes, Empire State Building et rames de métro n'empêchaient pas de voir le gigantesque panneau publicitaire "DKNY" sur un immeuble de Houston Street. Sa collection était sans doute la plus accessible de ces derniers jours, avec des sarouels gris portés avec des bustiers en chiffon jaune et gris, d'amples T-shirts rayés sur mini-jupes à pois, et des petits anoraks en nylon à mettre sur son maillot en cas de pluie subite. Le tout baskets aux pieds, ce qui permet d'éviter aux mannequins et aux acheteuses d'inclure la souffrance au programme de la fashionista.

Calvin Klein avait organisé une soirée d'un coût de 3 millions de dollars selon le New York Daily News, sur un tronçon de la voie ferrée aérienne désaffectée située sur la 10ème avenue, entre les quartiers de Chelsea et du Meatpacking District. Construite au début des années 30, la "Ligne Haute" ("High Line") a desservi les usines et entrepôts de ces anciens quartiers industriels jusqu'en 1980, et est abandonnée depuis. Selon le Daily News, une partie des 3 millions de dollars ont été offerts aux "Amis de la Ligne Haute", une association qui milite pour la transformation de ces 2 kilomètres de chemin de fer en parc, sur le modèle de la "coulée verte" entre la Bastille et le Bois de Vincennes à Paris, et dont une première partie financée par la ville de New York  doit être inaugurée en décembre 08. Calvin Klein a eu recours à l'architecte John Pawson pour créer un espace temporaire destiné à la soirée avant d'être démantelé, et les structures doivent être offertes à des organisations à but non lucratif de la ville.

Le styliste américain estime que le milieu de la mode a énormément changé depuis ses débuts, dans une interview à l'AFPTV. L'industrie de la mode est désormais "basée sur la recherche de marchés, une structure d'entreprise. Il ne s'agit plus seulement de jeunes créateurs surgissant de nulle part avec des idées. C'est un changement énorme", a-t-il déclaré en marge d'une conférence qu'il a donnée, en 2008, devant les étudiants de l'Université américaine de Paris.
"Quand j'ai commencé, Wall Street ne prenait pas la mode très au sérieux. Ils pensaient que ce n'était qu'une affaire d'intuitions, de caprices, de changements d'une saison à l'autre". Selon lui, "maintenant, on ne peut pas faire sérieusement de la mode" sans appartenir à une société cotée en Bourse.
Cependant, il reconnaît qu'il y a "toujours de la place pour quelqu'un qui débute". "C'est ce qui est formidable dans la mode. Je pourrais débuter aujourd'hui avec la même quantité d'argent que lorsque j'ai commencé en 1968. Je sais que je pourrais", a-t-il ajouté. Selon lui, un créateur qui veut se lancer n'a "pas besoin de beaucoup de financement. Vous n'avez pas besoin de tout ce dont vous avez besoin quand vous devenez gros et vous vous développez", a-t-il expliqué. "Faire simplement quelques beaux vêtements est assez difficile, mais le monde saura reconnaître si
vous avez du talent ou pas", estime-t-il. Travailler dans la mode  est "rude" et requiert" un engagement entier", souligne Calvin klein. "Il n'y a pas de manière facile de le faire". "Il faut avoir confiance. Il faut que les gens croient en vous, vous devez être un leader", estime-t-il.   


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