Pneumonies bactériennes : Faut-il les prendre en compte dans la préparation à une pandémie grippale ?

Publié le 21 octobre 2008 par Ryback
Dans une étude publiée en août 2008 dans la revue Emerging Infectious Diseases (références en bas de page) deux chercheurs, américain et australien, ont analysé les caractéristiques épidémiologiques et cliniques de la pandémie grippale de 1918-1919.

Ils ont émis l’hypothèse d’une infection séquentielle : la souche virale pandémique, responsable d’une grippe rarement fatale mais très affaiblissante, aurait entraîné de sévères modifications de la réponse immune au niveau des voies respiratoires avec une forte réaction inflammatoire et des lésions tissulaires ; ceci aurait alors favorisé la colonisation des voies respiratoires par des souches bactériennes responsables de pneumonies graves et souvent mortelles.

Question posée: La préparation à la prochaine pandémie grippale devrait donc prendre en compte cette hypothèse et ne pas se limiter au seul traitement de l’infection virale. En l’absence d’un vaccin spécifique de la souche responsable et d’antiviraux efficaces, les autorités sanitaires devraient envisager une vaccination antibactérienne (à Streptococcus pneumoniae par exemple), des traitements antibactériens et l’isolement des patients, véritables réservoirs infectieux.

Par ailleurs, les recherches associées à la pandémie devraient se concentrer sur les pneumonies bactériennes survenant secondairement afin de trouver des médicaments et des vaccins efficaces en particulier pour les patients à risque (âgés, immunodéprimés) ou les pays en développement pour qui les inhibiteurs de neuraminidase et les vaccins antiviraux ne seront pas forcément disponibles ni même abordables...

Une étude américaine publiée dans The Journal of Infectious Diseases semble venir confirmer cette hypothèse. Des chercheurs du NIAID ont voulu identifier les causes des décès si nombreux pendant la pandémie de grippe de 1918-1919 (appelée aussi grippe espagnole et provoquée par le virus influenza H1N1). Pour cela, ils ont examiné des coupes de tissus pulmonaires provenant de victimes et ils ont analysé, d’un point de vue microbiologique, histologique et également épidémiologique, un grand nombre d’articles rapportant les résultats d’autopsies postmortem.

Ils ont pu mettre en évidence que la mortalité résultait directement de pneumonies bactériennes secondaires sévères. Le virus influenza, se répandant rapidement dans l’arbre respiratoire, altérerait les mécanismes de défense pulmonaire, favorisant alors le développement de pneumonies bactériennes dans les voies respiratoires supérieures, l’incidence des cas mortels dus à une pneumonie virale restant très faible.

Outre la prévention et les traitements de l’infection virale, les résultats de ces deux études confirment l’importance de la prévention, du diagnostic et des traitements des pneumonies bactériennes associées au cours d’une pandémie grippale. Parmi les mesures à prendre prioritairement pour la préparation à une pandémie grippale, devraient donc figurer le stockage d’antibiotiques et de vaccins antibactériens, en plus des vaccins et des antiviraux déjà stockés.

[1] Brundage, JF, Shanks, GD. « Deaths from bacterial pneumonia during 1918-19 influenza pandemic ». Emerging Infectious Diseases. 14, 1193-1199 (2008)

[2] Morens, David, Taubenberger, Jeffery, Fauci, Anthony. « Predominant Role of Bacterial Pneumonia as a Cause of Death in Pandemic Influenza : Implications for Pandemic Influenza Preparedness ». The Journal of Infectious Diseases. 198, 962-970 (2008)


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