Faut-il annuler son vote ?

Publié le 19 novembre 2008 par Magazinenagg

Dans son texte, Vincent Marissal décrit tout le ridicule des promesses électorales des trois chefs de parti.

Le comportement irresponsable des chefs de parti nourri le cynisme des électeurs qui sont de plus en plus nombreux à s'abstenir de voter. À quoi bon se déplacer pour voter pour des " clowns " qui nous prennent pour des imbéciles.

L'abstention met en péril la démocratie qui, malgré ses défauts et ses limites, demeure le meilleur système. Alors, comment peut-on protester et faire comprendre aux politiciens qu'on en a par-dessus la tête de leurs conneries?

Je propose d'annuler mon vote. Ainsi, je participe au processus démocratique, mais je refuse de cautionner les choix qui me sont offerts.

Qu'arriverait-il si 10, 15 ou même 25 % des électeurs annulaient leur vote en guise de protestation?

Il est permis de rêver.
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Publié le 18 novembre 2008 à 06h17 Mis à jour à 06h18

Solutions miracle et pensée magique
Vincent Marissal, La Presse

Puisque que ces élections devaient, nous a-t-on répété, porter sur l'économie en temps de bourrasques financières, nous étions en droit de nous attendre à une campagne sobre dans son ton et dans ses chiffres.

Eh bien non. Les bourrasques ont d'abord emporté les bons principes pour faire place aux vieilles habitudes: des promesses, des solutions miracle, des millions et de la pensée magique.
Au cours des derniers jours, nous avons même eu droit au Festival de la promesse, les trois principaux partis rivalisant pour remporter, sinon votre vote, au moins le concours de la plus grosse baloune électorale.

On s'étonne, après, que les électeurs ne croient plus les politiciens et haussent les épaules de dépit chaque fois qu'un parti leur promet LA solution au système de santé, des garderies pour tous tout de suite, la fin de l'échec scolaire et, tant qu'à y être, le ciel à la fin de vos jours. Cette dernière a au moins le mérite de ne rien coûter.

La fin de semaine a été particulièrement riche en promesses dans les domaines de la Santé et de l'Éducation, ce qui ne garantit pas, tant s'en faut, que les partis aient bien fait leurs devoirs et que leurs chiffres tiennent la route.

Commençons par ce spectaculaire engagement de Pauline Marois: un médecin de famille pour tous les Québécois d'ici cinq ans.

"Je voudrais bien que ce soit possible, mais j'en doute un peu. Si c'était si simple, nous l'aurions probablement déjà fait", lance le président du Collège des médecins, Yves Lamontagne, heureux de voir les partis revenir à la Santé, mais dubitatif devant toutes ces promesses.

L'engagement de la chef du PQ part d'une bonne intention, mais il se heurte rapidement à la dure réalité des mathématiques.

Même si les universités ont doublé, à 800, les admissions dans leur faculté de médecine, il faut huit ans pour former un omnipraticien, ce qui fait que l'on commencera à peine à voir leur nombre augmenter à partir de 2010.

Et encore, il ne faut pas s'attendre à des miracles puisque seulement 30% de ces étudiants optent pour la médecine familiale. Ce n'est pas avec 240 nouveaux médecins de famille par année, dans quelques années seulement, que l'on arrivera à trouver un médecin de famille pour chaque Québécois d'ici 2014.

De toute façon, avant même de débattre de chiffres, le fondement même de cette promesse purement électoraliste n'est pas justifié, dit-on dans le milieu médical.

"Tous les Québécois n'ont pas absolument besoin d'un médecin de famille, dit le Dr Lamontagne. La médecine prescrit des examens annuels à partir de 50 ans, mais un jeune de 19 ans qui fait du sport et qui est en pleine forme n'a pas nécessairement besoin d'un médecin de famille."

Le même sensationnalisme électoral enrobe cette autre promesse de Mme Marois d'ouvrir 38 000 nouvelles places en garderie à 7$ par jour dans la première année d'un mandat péquiste.

"Impossible!" tranche le milieu. Dans les meilleures années, le réseau a réussi à créer 18 000 places.

Avant d'offrir des nouvelles places, il faut trouver les locaux, les faire approuver et construire (décontaminer le sol dans bien des cas), trouver le personnel et respecter, dans un délai de deux ans, le quota exigé de deux éducatrices diplômées sur trois, explique Jean Robitaille, du Regroupement des CPE.

En plus, ajoute M. Robitaille, un tel rythme aurait pour effet de faire grimper le prix des terrains disponibles en ville et créerait un embouteillage de soumissions.

"Si on lance en même temps, disons, 200 projets de CPE, cela veut dire que chaque projet doit obtenir trois soumissions d'architecture et trois soumissions d'ingénierie, donc 600 soumissions en même temps", dit M. Robitaille pour illustrer la masse de paperasse à traiter en même temps.

Conclusion du milieu: on peut arriver à créer les 38 000 places en question si cela devient une priorité absolue. Mais pas en un an. Trois ans, au mieux.

De la Santé à l'Éducation, sur les ailes de cette flamboyante promesse de Mario Dumont de diminuer de moitié le décrochage scolaire en un mandat (de 25 a 12% pour l'ensemble des élèves et plus spécifiquement de 31 à 15% chez les garçons).

Réaction du milieu: impossible. Renverser un phénomène aussi lourd en seulement quatre ans est parfaitement irréaliste.

Un groupe de travail présidé par Jacques Ménard, président de BMO Groupe financier au Québec, travaille sur un plan d'action beaucoup plus conservateur et déjà très ambitieux: obtenir un taux d'obtention de diplôme de 80% chez les moins de 20 ans sur une période de 10 ans.

Donc, le banquier bien connu et son groupe visent une réduction du décrochage d'environ 5% sur une décennie en élargissant la fourchette jusqu'à 20 ans.

Le Québec y parviendrait que ce serait déjà un exploit de taille. Promettre plus et plus vite tient davantage de l'électoralisme que de la réalité.

Et Jean Charest dans cette surenchère de promesses?

Peut-être est-ce parce qu'il s'est brûlé les doigts avec sa promesse de 2003 d'éliminer les listes d'attente en santé, mais le chef libéral est moins porté que ses adversaires sur l'enflure électorale.

Reste que ses "100 000 emplois" dans un mandat sont plutôt racoleurs.

De nombreux économistes et le milieu des affaires doutent que le Québec soit capable de générer autant de nouveaux emplois en si peu de temps sur fond de récession.

Et si la chose devenait effectivement possible, les ministres économiques de Jean Charest s'inquiètent plutôt que la pénurie de main-d'oeuvre ne s'aggrave au Québec.

L'enfer, c'est bien connu, est pavé de bonnes intentions.

Pour joindre notre chroniqueur: vincent.marissal@lapresse.ca