Après la crise, les salaires devront augmenter !

Publié le 27 novembre 2008 par Bernard Carlier

Extraits d’article de l’interview de l’économiste Michel Aglietta sur LCI.fr(…)

LCI.fr : Selon vous, une des causes plus profondes de la crise est le problème de la répartition inégale des fruits de la croissance, au profit du monde de la finance. Le mode des rémunérations des traders, excessif, est d’ailleurs lui-même responsable de leurs dérapages….

M. A. : Dans leur mode de rémunération, si quelqu’un prend une position à risque qui marche très bien pendant un mois, des bonus sont donnés, et, si cette même position se détériore, il n’y a pas de malus. C’est tout le problème : on ne prend pas en compte la totalité de vie du contrat : il faut donc élargir les horizons sur lesquels on détermine ces bonus.

LCI.fr : Même chose pour les stock-options. Vous considérez qu’aujourd’hui les grands patrons n’ont pas intérêt à bien gérer leur entreprise mais seulement à développer les profits à court terme…

M. A. : Pour faire monter la Bourse ! Et de façon à ce que leurs stocks-options rapportent la plus grosse plus-value…. Quant aux parachutes dorés, ils témoignent d’une rente et du pouvoir considérable qu’a pris une élite financière : grands dirigeants de banques et d’entreprises, cabinets-conseils,managers de hedge funds, cabinets juridiques…

LCI.fr : La rémunération excessive de ces acteurs s’est-elle faite au détriment des salariés?

M. A. : C’est clair, et les données de la comptabilité nationale montrent qu’il y a une augmentation très forte des inégalités. Dans le produit interieur brut, la part des profits a augmenté depuis une vingtaine d’années alors que celle des salaires a diminué. Le salaire médian n’a pas progressé depuis 1990 alors qu’il y a eu des gains considérables de productivité ! C’est encore plus vrai dans les pays anglo-saxons où il y a moins de redistribution qu’en France. C’est un des gros problèmes aujourd’hui. Si la croissance a développé tant d’endettement chez les ménages, c’est que le revenu ne progressait pas assez et que pour obtenir une croissance aussi forte, la consommation des ménages a du se déconnecter des revenus, grâce au crédit.