La Belgique sinistrée, réaction de Philippe Van Lil

Publié le 28 novembre 2008 par Grichka
Mon très Cher Ami, mon très Cher Gricha,
Ecrire, comme tu le fais, que « la Belgique est dirigée par une bande de crabes irresponsables et prétentieux, le mélange qui tue la démocratie » me semble pour le moins excessif. Je pourrais te citer des dizaines de mesures prises récemment par certains de nos gouvernants qui démontrent à souhait que, contrairement à ce que laisse entendre le ton poujadiste et démagogique de Christophe De Caevel dans L’Echo, les « crabes » en question ne sont ni inertes ni incompétents.
Il convient cependant de faire preuve d’un grand discernement entre, d’une part, le travail réellement effectué qualitativement et quantitativement par nos mandataires politiques, qu’ils soient de l’Exécutif ou du Législatif, et, d’autre part, ce qui est donné en pâture par quelques journalistes en compétition pour de meilleurs tirages et pour une contribution maximale à la destruction de nos arbres et de nos forêts. Des journalistes en mal de scoops. Des journalistes en quête perpétuelle d’images à sensations et de discours simplistes compréhensibles sans trop de difficultés par la masse hébétée des consommateurs de papiers d’épluchures à pommes de terre auxquels ils s’adressent.
La complexité du cadre institutionnel du pays dans lequel nous vivons et les difficultés que nous traversons depuis plus d’un an ne doivent pas éluder le travail accompli par certains de nos responsables politiques, dont la compétence serait sans doute plus visible et plus payante - dans tous les sens du terme - s’il la mettait à la disposition de multinationales vendant des savonnettes ou du chocolat. Je ne prendrai ici que l’exemple des diverses notes de politique générale déposées par nos ministres depuis plusieurs semaines à la Chambre des Représentants. La dernière en date est résumée dans le Plan Emploi de Joëlle Milquet. Celui-ci contient pas moins d’une soixantaine de pages (voir http://milquet.belgium.be/files/081120-Plan%20emploi%202009.pdf), dont je doute fort qu’elles ne contiennent que des sornettes échafaudées par « des crabes irresponsables et prétentieux » dans l’unique but d’aveugler les masses prolétaires et les bourgeois nantis. Il faut cependant se donner la peine de quelque effort supplémentaire pour lire et analyser de tels documents et pour se rendre compte à l’évidence de la créativité et de la pertinence des mesures prises par bon nombre de nos gouvernants.
A lire les termes utilisés par le journaliste de L’Echo - « L’inertie actuelle », « Les politiques veulent-ils relancer la Belgique ? » - et par toi-même - « la Belgique est dirigée par une bande de crabes irresponsables et prétentieux, un mélange qui tue la démocratie », « La Belgique est un pays sinistré et va le rester », ne stigmatise-t-on pas trop vite l’action de nos gouvernants ? A lire de telles assertions, on en viendrait presque à comparer notre pays à une république bananière où le dysfonctionnement serait la règle. Or, que je sache, nos administrations continuent à tourner, nos hôpitaux accueillent toujours les malades, nos autoroutes sont encore éclairées. Quant à la démocratie, la « belle affaire », elle propulse un José Happart à la tête des « des crabes irresponsables et prétentieux » du Sud du pays et un Jean-Marie Dedecker en tête des voix de préférence au Nord du pays. Cette démocratie-là, alimentée par l’action toxique de certains journalistes « bien pensants », contribue à l’hégémonie de tels individus qui occultent l’action positive de nos autres gouvernants. La démocratie, à coup sûr, n’est pas morte mais elle est fortement grippée. Et à qui la faute in fine : à l’homme de la rue, à nos gouvernants, aux journalistes professionnels, aux journalistes bloggeurs… ou un peu à tout le monde ?
Pour conclure je te laisserai, non pas sur une, mais sur quatre citations d’un même auteur, en l’occurrence Charles Maurice, homme d’Etat et diplomate français (1754-1838) qui se distingua lors de la Révolution française et des guerres napoléoniennes et qui joua un rôle déterminant lors du Congrès de Vienne :
- « Ce qui est, presque toujours, est fort peu de choses, toutes les fois que l’on ne pense pas que ce qui est produit ce qui sera. »
- « Le meilleur moyen de renverser un gouvernement, c’est d’en faire partie »
- « Dans les temps de révolutions, on ne trouve d’habileté que dans la hardiesse, et de grandeur que dans l’exagération. »
- « Tout ce qui excessif est insignifiant »
Philippe Van Lil,
Journaliste & compagnon d’une mandataire politique