Coucher de soleil... Sion... Charles Guérin

Par Laporteplume
Contemple tous les soirs le soleil qui se couche :
Rien n’agrandit les yeux et l’âme, rien n’est beau
Comme cette heure ardente, héroïque et farouche,
Où le jour dans la mer renverse son flambeau.
(…)
Tourne vers l’horizon ton front mouillé, ta bouche
Ouverte, et que tes yeux desséchés par le vent
Aillent du lieu tragique où le soleil se couche
Aux nocturnes brouillards violets du levant.
Pèse en les mesurant les hautes destinées
Dont la lumière accrue aveuglait au zénith,
Et qui montaient encore et se sont inclinées
Lourdement vers l’obscur sépulcre où tout finit.
L’humanité sans foi vieillit dans l’amertume ;
Songe aux dieux que son jeune espoir crut immortels :
Leurs encensoirs rouillés exhalent de la brume,
Et l’araignée argente et brode leurs autels.
(…)
Loin des vents querelleurs et de la mer qui tonne,
Remporte, en gravissant d’un pas triste et cassé
Des chemins sans échos au bâton qui tâtonne,
Le silence d’un cœur où l’amour a passé.

Charles GUÉRIN Le Semeur de Cendres XXI 1911 éd. Mercure de France PARIS image Sion coucher de soleil 15 10 2008 photo GL