Madoff aurait-il plumé les épargnants français via les OPCVM ?

Publié le 18 décembre 2008 par Kamizole

Qui osera encore dire que nous vivrions dans un «monde fini» dont tous les territoires auraient été explorés ? Géographiquement, certes. Mais la «Planète finance» à l’ère de la globalisation dérégulée recèle encore moult «terra incognita»… Effets de l’accélération du temps et de l’Histoire, depuis le 11 septembre 2008 chaque jour ou presque nous en fait découvrir quelque obscur recoin.

C’est d’ailleurs vrai de tous les scandales : au départ, les observateurs – forcément éclairés – affirmaient sans barguigner que la crise des subprimes, liée à celle de l’éclatement de la bulle immobilière n’affecterait que les Etats-Unis : elle a dévasté la planète en une année… De même, le scandale du lait chinois enrichi à la mélamine qui a touché force produits (y compris du soja !) et s’est étendu comme traînée de poudre à tous les continents… Plus récemment, le porc irlandais nourri avec des aliments frelatés (dioxine) eut le fort mauvais goût de ne pas rester confiné dans les frontières de la Verte Erin et même de frapper les bovins.

Deux images s’imposent à mon esprit : un écheveau sans fin dont on ne cesse de tirer le fil ou des poupées russes emboîtées les unes dans les autres.

Toujours est-il qu’au début de la semaine, tout en faisant l’inventaire des établissements bancaires français et européens frappés par le dernier scandale financier dû à autant à l’ingéniosité de Bernie l’Arsouille – Bernard L.Madoff, ci-devant financier de très haut «vol » (!) mais escroc si bien masqué que certains le considéraient comme la «légende» de Wall Street ! – les observateurs nous assuraient, de façon tout à fait invraisemblable, en raison précisément de l’interpénétration des établissements bancaires et des produits financiers – notamment la «titrisation» qui y dissémine les risques – que les pertes, parfois colossales ! subies par la majorité des établissements bancaires français n’auraient aucun impact pour les épargnants français.

Las ! Nous sommes jeudi et depuis hier nous savons qu’ils risquent tout au contraire d’être gravement affectés. En effet, l’AMF (Autorité des marchés financiers) a estimé que «les épargnants français qui ont investi dans des titres gérés collectivement par des institutions financières (OPCVM) pourraient perdre «plusieurs centaines de millions d’euros» à cause de la fraude Madoff »…

L’AMF n’a toutefois pas précisé quel type d’épargnants -ménages, particuliers fortunés, entreprises…- étaient concernés. Se contentant d’assurer que - pour le moment ! – elle n’aurait identifié aucun OPCVM qui aurait délégué la gestion de leurs titres à des «entités liées à l’affaire Madoff» : leur portefeuille n’aurait plus aucune valeur !

Toutefois, un nombre significatif d’OPCVM français auraient été investis dans des «parts de fonds d’investissement» étrangers – notamment “deux fonds coordonnés de droit respectivement luxembourgeois et irlandais”… selon Reuters, il pourrait s’agir du fonds Lux Alpha, géré par la banque – suisse - UBS, et le fonds irlandais Thema Fund International - qui sont «susceptibles» d’être affectés par la fraude Madoff… Que les épargnants français soient touchés directement ou indirectement par les retombées de la fraude Madoff, je ne vois guère de différences quant à la «volatilisation» de leurs avoirs.

Je me contente de remarquer que c’est encore dans les «paradis fiscaux» européens : Luxembourg, Irlande, Suisse… que prospèrent ces fonds. Qu’apprendrons-nous demain du Liechtenstein, de Monaco, des Iles anglo-normandes, etc… ? Les paradis fiscaux ne sont pas tous sous le soleil d’îles tropicales. C’est beau comme l’Europe !

Que recouvre le terme d’OPCVM ? «Organismes de Placement Collectif en Valeurs Mobilières» ? Ce sont des sociétés ou des quasi-sociétés dont l’activité consiste à investir collectivement sur les marchés l’épargne collectée auprès de leurs porteurs de parts…

Les produits financiers qu’ils proposent à leur clientèle regroupent à la lois des SICAV et des FCP (Fonds Collectifs de Placement) la différence entre les deux types de produits résidant essentiellement dans le fait que les FPC n’ont pas de personnalité juridique.

L’attrait pour ce type de placement tient surtout au substantiel avantage fiscal qui y est attaché puisque les arbitrages – effectués par le gestionnaire du fonds collectif : achats et ventes d’actions ou autres produits financiers – ne sont pas pris en compte pour le calcul du seuil de cession des valeurs mobilières qui entraîne leur imposition.

Je ne suis pas certaine qu’aujourd’hui les souscripteurs de parts de SICAV et autres FPC soient si contents d’avoir délégué la gestion de leurs placements à des professionnels dont les «arbitrages» se révèlent au moins aussi risqués que les opérations du trader de la SocGé, Jérôme Kerviel !

Si je me contrefous absolument des pertes que les nantis – millionnaires ou milliardaires - ont pu enregistrer, il n’en reste pas moins que sur les 172,3 milliards détenus en parts d’OPCVM par les ménages (chiffres de juin 2007) un certain nombre de particuliers, pas forcément friqués, risquent de voir toutes leurs économies s’envoler.

C’est souvent l’épargne de toute une vie, destinée à améliorer la retraite ou aider leurs enfants pour leurs études ou l’acquisition d’un logement. Et croyez bien que leur sort aujourd’hui incertain ne me donne nulle envie de rigoler.

Enfin, il me surprendrait nullement d’apprendre demain que les «assurances vie», également investies dans de tels «supports» boursiers n’enregistrent des pertes tout aussi faramineuses… Une nouvelle «tuile» pour les épargnants français !