A quoi sert un blog ? - Question 3 : à engager des conversations ?

Publié le 08 août 2007 par Frédéric-Michel Chevalier

Dès 1999, les auteurs du Clue Train Manifesto écrivaient : « Les marchés sont des conversations ». Aujourd’hui les blogs sont devenus incontestablement leurs outils.

Il n’y a pas de demande pour les messages publicitaires. Ce qui ne signifie pas qu’un message publicitaire pour une voiture ne puisse pas séduire le consommateur. Mais le conseil d’un ami, d’un collègue, d’une relation ou d’un membre de la famille jouera à coup sûr un rôle bien plus important dans la décision d’achat.

Le postulat du Clue Train manifesto trouve ses racines dans les origines du commerce où le marché était un lieu d’échange où les gens venaient vendre et acheter, mais surtout discuter. Tous ceux qui se sont rendus au Maghreb, au Moyen Orient ou en Afrique, ont fait l’expérience de ces négociations à perte de vue où la discussion et l’échange sont en réalité plus importants que l’enjeu du marchandage.

Avec les trente glorieuses et la société de consommation, on s’était éloignés de ce modèle pour privilégier une forme de consommation de masse, assez standardisée. Posséder un produit donné, était un phénomène de reconnaissance, de socialisation, d’appartenance à un groupe.

Au début du XXIème siècle, au contraire, la personnalisation prévaut à nouveau. Le consommateur a déjà pris l’ascendant par rapport au prix. Pour optimiser son pouvoir d’achat et satisfaire ses besoins, il achète « malin » (comparatifs de prix, low cost, hard discount, achat en ligne, ventes privées, etc.). Mais ses exigences vont bien au-delà. Il veut une offre personnalisée et recherche les facteurs de différenciation.

Dans le même temps, les blogs et le web 2.0 en général, nous ont rendu notre capacité à nous exprimer. Chacun est à la fois récepteurs de messages et potentiellement émetteur d’informations. Et avec les moteurs de recherche, les flux RSS, les communautés et les réseaux sociaux, nous ne sommes qu’à quelques clics de l’information recherchée. Il est alors très facile d’engager la conversation pour en vérifier la fiabilité, la véracité.

Bien avant l’arrivée des blogs, les consommateurs avaient déjà trouvé le moyen de s’exprimer sur le web par le courrier électronique, les forums ou les pages personnelles. Mais, par leur simplicité et leur convivialité, les blogs ont démocratisé la prise de parole sur internet.

Les marques s’y mettent peu à peu. Converser ne coûte rien, mais le silence est fatal. Il ne s'agit plus de réunir de temps en temps des focus groups de consommateurs, mais de s'impliquer personnellement dans la conversation continue et protéiforme qui se déroule sur l'internet et même, de la susciter. Quand Amazon récompense ses clients qui commentent les produits qu'elle vend, quand Microsoft encourage ses salariés à bloguer  (nous reviendrons sur cet exemple dans un prochain billet) et plus encore, à intervenir dans les forums où l'on discute de ses produits, quand France Télécom se met à l'écoute de "l'innovation ascendante", on est loin du marketing classique. Il en va de même quand Exalead, Groupama ou Job meeters utilisent feedback 2.0, une plateforme d'écoute-client dérivée d'un blog pour collecter auprès de leurs clients des remarques, suggestions et propositions d'amélioration de leur produits et services.

Cela n’est pas sans danger. Le risque est de ne plus percevoir les marchés que par les yeux d'un petit nombre de consommateurs hyperactifs. Les blogueurs ne représentent en effet encore qu’une infime partie de la population connectée. Et l’influence des uns et des autres se construit dans une sorte de microcosme avec ses codes et ses règles, basées essentiellement sur la cooptation. L’internaute lambda utilise encore peu les outils 2.0 à sa disposition, pour que l’influence qui en découle soit représentative. La multiplicité de ces outils ne facilite d’ailleurs pas les choses. De retour des rencontres Agoravox en mars dernier, je m’interrogeais justement dans un des premiers billets de ce blog sur la représentativité et la légitimité de ceux qui, au sein de la blogosphère, revendiquent le statut de « cinquième pouvoir ».

Cela ne poserait pas de problème dans un monde parfait où les conversations fleuriraient ça et là et où chaque post déclencherait des avalanches de commentaires représentatifs de toutes les couches de la société. Or ce n’est que trop rarement le cas. Et nombre de commentaires n’enrichissent pas vraiment le débat. Nombre de blogs dits « influents » se contentent de faire de l’audience, à l’instar des médias traditionnels.

Il reste encore quelques pas à franchir avant de parvenir à la maturité, à moins que le phénomène ne s’essouffle de lui-même, comme l’envisage cette video-fiction qui a fait le tour du net, annonçant la fin des blogs pour 2010.


La fin des blogs...
envoyé par MicrofilmDansTaChambre

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