Jeunes maisons

Par Mgallot

A force d'entendre parler de crise de l'édition, je suis toujours épatée de voir de jeunes maisons se lancer courageusement dans l'aventure libriophile.

J'ai ainsi pu découvrir dernièrement l'excellence des albums jeunesse de Hong Fei Cultures, spécialisée dans l'édition d'auteurs chinois en traduction française illustrée. J'ai parlé en particulier sur Sitartmag de deux "minuscules contes" et du magnifique "marée d'amour dans la nuit", qui dénote par rapport au ton habituel des albums jeunesse.

Toujours dans l'édition jeunesse, Balivernes, sise à Francheville, non loin de Lyon, existe depuis 2004 et publie le poilant "Un loup tout nu".

Au rayon adultes, une belle découverte aussi, les éditions des deux terres, spécialisées dans la traduction d'ouvrages d'auteurs anglo-saxons. J'ai déjà parlé du très réussi "A marée basse" de l'Américain Jim Lynch (sans conteste l'un des meilleurs romans que j'ai lus en 2008). La Britannique d'origine ukrainienne Marina Lewycka fait pas mal non plus avec "Une brève histoire du tracteur en Ukraine", une comédie de moeurs qui met en scène un très vieux monsieur épousant une bombasse venue d'Ukraine, naturellement plus intéressée par le compte en banque du monsieur que par ses désirs sexuels très largement au-dessus de ses moyens physiques. Enfin, "Du bon usage des compliments" de l'auteur au kilomètre Alexander MacCall Smith est un cran en-dessous, mais il n'est pas déplaisant non plus de s'immiscer dans la bourgeoisie d'Edimbourg, aux côtés de la trépidante Isabel Dhalousie, en quête d'un mystérieux peintre disparu lors d'un naufrage au large des Hébrides.

Les éditions du chemin de fer publient quant à elles de petits beaux-livres, très chics avec leur rabat à intérieur rouge et leurs illustrations couleurs. Pour lancer la collection, les éditeurs ont fait appel à des écrivains français reconnus, qui ont chacun écrit une nouvelle. Parmi eux, Annie Saumont, Pierre Autin-Grenier, Jean-Noël Blanc. J'ai en particulier apprécié l'impertinent "Une oreille de chien" de Nathalie Quintane et le malicieux "L'os d'aurochs" de Pierrette Fleutiaux. Sans l'avoir lu, j'ai pu feuilleter aussi "Figures Balzac": l'éditeur a demandé à des artistes d'illustrer chacun un portrait balzacien, une idée séduisante quand on sait le nombre de références à la peinture dans les portraits de Balzac.

L'éditeur bourguignon D'un noir si bleu s'est lancé quant à lui sur le marché difficile de l'édition de nouvelles d'auteurs inconnus, la plupart n'ayant jamais publié. C'est le cas de Laurence Barrère, dont les Rescapés ordinaires recueillent les blessures intimes de personnages ordinaires.

Enfin, les éditions de l'épure, créées par la pétulante lyonnaise Sonia Ezgulian, qui tenait feu le restaurant Oxalis, nous mettent en bouche avec de petits livres de cuisine cousus à l'ancienne, qu'il faut soigneusement couper avec un ouvre-lettres. La collection "10 façons de préparer" est tout simplement délicieuse. Chaque ouvrage tourne autour d'un ingrédient, classique (le champagne, le melon, le lait de coco) ou plus inattendu (l'oeuf sur le plat, la cancoillotte, les fleurs, et même... le cigare!)