Sarkozy découvre qu'il ne peut y avoir d'aide publique sans contrepartie

Publié le 23 janvier 2009 par Juan
Lundi 19 décembre, Nicolas Sarkozy présentait ses vœux aux partenaires sociaux, cette fois-ci à l'Elysée. Après les provocations de la semaine passée, il a joué l'apaisement. Il a notamment rappelé qu'il n'y aurait désormais en France plus d'aides publiques aux entreprises sans contreparties : "il faut que les usines restent en France".
Petits arrangements...
Ce soudain intérêt pour la bonne utilisation "sociale" de l'argent public, et notamment des subventions, est récent. Coup sur coup, Sarkozy avait prévenu les entreprises automobiles qu'il était prêt à les aider si elles s'engageaient à maintenir leur emploi en France (une mesure protectioniste par excellence); puis il avait exigé des banquiers, jeudi dernier, qu'ils suspendent leurs bonus et dividendes si l'Etat leur prêtait une nouvelle tranche de 10 milliards d'euros.
Après s'être fait tancer par le président mardi dernier, les patrons de banque ont accepté d'abandonner leur bonus pour 2008, "en contrepartie" du nouveau prêt de l'Etat de 10,5 milliards d'euros: "les dirigeants des différents établissements ont renoncé à leur rémunération variable au titre de 2008, traduisant ainsi l'écoute qui est la leur des sentiments des uns et des autres", a indiqué le président de la FBF.
Mais Sarkozy a fait une concession discrète. Les dividendes sont épargnés. Le communiqué officiel de la Présidence, mardi soir, le confirme : plus un mot sur les dividendes, pas même une allusion: "Enfin, les dirigeants des banques ont unanimement décidé de renoncer, dans le cadre des règles de gouvernance de leurs groupes, à la part variable de leur rémunération au titre de 2008."  Une particularité bancaire est également discrètement oubliée : les dirigeants ne sont pas ceux qui touchent les plus gros bonus. Ils sont loin derrière leurs tradeurs !
... et gros mensonges
Mardi, François Fillon a promis "5 ou 6 milliards d'euros" à Renault et PSA, sous forme . Les détails du plan seront dévoilés en février. Fillon a prévenu que l'Etat exigerait des engagements "exemplaires tant sur les volumes de production en France qu'en termes de relations vis-à-vis de la chaîne de sous-traitance" mais aussi la suppression des bonus et dividendes aux actionnaires. A été signé mardi une aide de 300 millions d'euros d'investissement. C'était déjà une promesse de campagne : "Je veux que [les entreprises] qui délocalisent alors qu’elles ont profité de subventions, remboursent les subventions qu’elles ont obtenues ". 
Lors des Etats Généraux de l'Automobile, les constructeurs ont répliqué avec l'argument choc: la compétitivité de la France sera fragilisé par le poids des taxes et des contraintes. C'est là que le bas blesse ! Nicolas Sarkozy et son gouvernement sont pris dans une contradiction existentielle et idéologique majeure : en temps de récession, certains redécouvrent avec bonheur que la France souffrira moins que que ses voisins grâce au poids des retraites (par répartition) et des fonctionnaires. Un adulte sur deux serait retraité ou fonctionnaire, donc à l'abri du chômage et d'une baisse brutale de revenus consécutive à la récession. Mettez vous à la place de Sarkozy : comment positiver ces "contraintes publiques", si protectrices par rapport à nos voisins plus libéraux, alors que son discours sur la rupture depuis des lustres visent à les réduire ? On comprend mieux pourquoi le Monarque préfère des coups de gueule symboliques. 
On rétorquera également que les contre-parties exigées par le gouvernement Sarkozy restent floues ou limitées : pas un mot sur les stock options. Il est vrai que Nicolas Sarkozy a de tous temps rechigné à en limiter le bénéfice. Au contraire, en pleine crise financière, Xavier Bertrand avait même proposé d'en étende le bénéfice à tous les salariés. Pas un mot non plus sur les salaires fixes des dirigeants...
Enfin (et surtout), Nicolas Sarkozy est victime de son impréparation : au Royaume Uni ou en Allemagne, l'Etat est devenu actionnaire et a obtenu des contreparties dès le début :  suspension des dividendes et des bonus, nomination d’administrateurs en Angleterre; suppression des dividendes et la limitation des salaires des managers à 500 000 euros en Allemagne. En France, Sarkozy a annoncé des garanties aussi faramineuses qu'ailleurs. Mais il fait semblant de découvrir aujourd'hui qu'il (lui) faut des contreparties ... sous peine de perdre la face.
Marché de dupes ?
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