Vote du 8 février : Hans-Rudolf Merz ment et se meut en propagandiste

Publié le 24 janvier 2009 par Francisrichard @francisrichard
Le président de la Confédération, Hans-Rudolf Merz, s'est mû hier en propagandiste en chef du "oui"  aux deux objets fusionnés sur la libre circulation des personnes (ici). Dans un message télévisé,dont la vidéo est uniquement disponible en allemand, sans doute par égard pour tous ceux de ses concitoyens qu'il ne le parle pas, il a proféré ce mensonge de l'application automatique de la clause guillotine en cas de "non" le 8 février et engagé tous les Suisses, qu'il représente depuis le 1er janvier, à voter "oui".
Pour que nul n'en ignore voici ci-après le texte de ce message. J'ai souligné en gras le passage où le premier parmi les Conseillers fédéraux énonce ce mensonge flagrant  (voir mon article "Non" le 8 février : la clause guillotine ne devra pas s'appliquer ). Un tel mensonge rend totalement insignifiantes les conséquences désastreuses qu'il en tire pour le pays :

Chères concitoyennes, chers concitoyens,


Mesdames, Messieurs,


Pendant plus de 25 ans, j'ai travaillé et parfois vécu à l'étranger. J'ai ainsi séjourné au Moyen-Orient, en Afrique du Sud, en Amérique latine et dans plusieurs Etats des Etats-Unis. J'ai presque toujours été bien accueilli et ai pu nouer de nombreuses relations d'amitié. J'ai toujours fait des rencontres intéressantes et accumulé d'utiles expériences. Cette période de ma vie m'est chère, même si je me sens profondément attaché à mon canton d'Appenzell Rhodes-extérieures. La diversité économique, sociale et culturelle que l'on rencontre à travers le monde m'a marqué et fasciné. Partir à la découverte de mondes étrangers n'a pas toujours été facile. Je suis toutefois heureux et reconnaissant de ne jamais avoir été rejeté, mais au contraire d'avoir été le bienvenu partout.


Le 8 février prochain, nous voterons sur la question de savoir si nous souhaitons continuer ou non d'autoriser les habitants des pays qui nous entourent à vivre et travailler chez nous. Autrement dit, voulons-nous conserver le régime actuel de libre-circulation des personnes en étendant celui-ci aux nouveaux membres de l'UE que sont la Bulgarie et la Roumanie?


La Suisse est un pays ouvert. Choisissons donc d'agir en accord avec nos plus profondes convictions. Une fois encore, ouvrons nos frontières à celles et ceux qui n'ont pas de passeport à croix blanche. Poursuivons notre partenariat avec l'Union européenne. Car l'UE est de loin notre principal partenaire commercial. Un tiers de nos revenus proviennent de nos échanges avec l'UE, un tiers de nos places de travail dépendent de nos relations avec l'UE. Autrement dit, notre prospérité est intimement liée à l'UE. En ces temps d'insécurité économique, préserver la stabilité de nos rapports avec nos partenaires revêt une grande importance. Les accords de libre-échange garantissent cette stabilité pour la Suisse comme pour l'UE. Grâce à ces accords:

  • les Suisses ont le droit de travailler et de s'établir dans tous les pays membres de l'UE;
  • de même, les ressortissants de l'UE sont autorisés à travailler et à s'établir en Suisse. Cette immigration est toutefois contrôlée, une autorisation de séjour n'étant délivrée qu'à des conditions strictes.
  • En outre, certaines restrictions s'appliqueront à l'établissement en Suisse de ressortissants bulgares et roumains durant une période de transition.

Un rejet de la libre-circulation des personnes le 8 février prochain reviendrait à mettre un terme à la voie bilatérale. Etant juridiquement liés entre eux, tous les accords bilatéraux que nous avons conclus jusqu'ici avec l'UE seraient automatiquement annulés.


La votation du 8 février revêt donc une importance fondamentale pour la poursuite de la voie bilatérale. C'est cette voie que la Suisse a décidé d'emprunter dans ses rapports avec l'UE. Opposé à une adhésion, notre pays reconnaît toutefois qu'il ne saurait faire cavalier seul sans se retrouver complètement isolé, ce qu'il ne peut pas se permettre. Car les accords bilatéraux offrent à nos entreprises la possibilité d'accéder plus facilement au marché de l'UE, de recruter le personnel qualifié dont elles ont besoin et de bénéficier des mêmes conditions de concurrence que les entreprises européennes. Ces accords renforcent notre place économique et consolident nos emplois.


Dire oui à la libre-circulation des personnes nous permettra de conforter ces bonnes conditions-cadres et de poursuivre, sur cette base, notre collaboration avec l'UE par la voie bilatérale. Un oui interviendrait après plus de six années d'expériences positives avec la libre-circulation. Les diverses craintes exprimées à ce sujet ne se sont pas réalisées:

  • La peur d'une augmentation de la criminalité n'est pas justifiée. Même les craintes à l'égard des Roms sont sans fondement. En effet, la libre-circulation s'applique déjà depuis 2006 aux Roms provenant de Slovaquie et de Hongrie. Et, depuis 2004, les ressortissants roumains et bulgares n'ont plus besoin d'un visa pour séjourner en Suisse jusqu'à trois mois.
  • Les problèmes d'abus de l'aide sociale n'ont pas non plus augmenté.
  • Enfin, les mesures prises pour lutter contre le dumping salarial et social se sont révélées très efficaces. Or, en cas de rejet de la libre-circulation, ces mesures qui visent à renforcer la protection des employés seraient elles aussi annulées.

J'en suis bien conscient, la libre-circulation des personnes et l'ouverture à l'Europe engendrent de nombreux changements et défis. Elles suscitent, chez certains, un sentiment d'insécurité face à des perspectives économiques moroses. Oui, le chômage va augmenter. Toutefois, ce ne sera pas à cause de la libre-circulation des personnes, mais du ralentissement de l'économie mondiale. Un oui à la libre-circulation n'empêchera pas la crise économique de déployer ses effets. Mais il nous permettra de consolider des conditions-cadres vitales pour nos entreprises, aidant ainsi notre pays à sortir au plus vite du marasme. Le repli sur soi n'est pas envisageable pour une économie exportatrice comme la nôtre. Acceptons donc de partager notre diversité économique, sociale et culturelle en votant oui le 8 février.

Et pour que les amateurs de la langue de Goethe ne soient pas en reste voici la vidéo de ce message historique :



Il est regrettable - et le mot est faible - que le président de la Confédération se prête à une telle palinodie. Pourquoi palinodie ? Parce qu'initialement le Conseil fédéral était hostile à la fusion des deux objets. Ce chantage mensonger au chaos est inadmissible.

Francis Richard