Ecole ou “garderie” ?

Publié le 25 janvier 2009 par Jlhuss

Lod réagissait à la note “Absences ” et à certains commentaires concernant cette note.

Qu’est-ce qui provoque l’ennui ? C’est très variable, cela dépend du caractère, des goûts de chacun. L’école est-elle là pour distraire les élèves ? Ou pour leur apprendre à tous quelque chose d’utile, même si l’apprentissage est fastidieux ?

Et fastidieux selon qui ? Des adultes qui, eux-mêmes ont bénéficié des bonnes vieilles méthodes “à l’ancienne”, qui les recherchent pour leurs propres enfants mais les refusent à la masse ? J’en ai rencontré plus d’un, des profs bien heureux que leur progéniture soit tombée sur un “instit’ comme autrefois”, qui fait faire de la grammaire, apprendre les tables de multiplications par coeur, des récitations en veux-tu en voilà, et qui en classe jouent à fond la carte du ludique, n’imposent pas d’exercices ni d’apprentissage de leçons systématiques, et s’efforcent de distraire leurs élèves.

Pour être capable de s’exprimer à l’écrit ou à l’oral, de développer une pensée cohérente ou de comprendre un raisonnement de plus de deux lignes, il faut maîtriser les règles de grammaire, c’est (peut-être) chiant, mais ça marche. Ce sont les fondations, sans lesquelles on ne peut rien construire de solide.

Permettre à tous les élèves de construire sur des fondations solides, voilà quelle devrait être la mission de l’école. Les méthodes variées et ludiques qui ont vu le jour l’une après l’autre ces dernières décennies ont contribué à creuser les inégalités entre les élèves : ceux dont les parents ont un bon niveau d’études, et qui sont suivis chez eux, ou les élèves qui comprennent vite, les plus intelligents au sens étymologique du terme, ceux-là s’accomodent de n’importe quelle méthode.

Ceux qui payent le prix fort, ce sont les élèves qui n’ont personne pour les aider à la maison, qui comptent vraiment sur l’école, le temps passé en classe, pour s’en sortir, (et pour qui, théoriquement, ces méthodes ont été mises au point, ce qui est assez ironique ! Mais l’enfer est pavé de bonnes intentions, c’est bien connu.)

Quand je repense à mes années d’école et de collège, je me dis que ce qui fait l’ennui ou le plaisir d’apprendre, c’est peut-être moins la méthode choisie que le professeur, au fond, son talent pour transmettre les connaissances et donner le goût de l’effort.

Makhno :

Sincèrement Lod, je ne suis pas “pédagogiste” (et ne l’ai jamais été), certaines formules “précieuses et ridicules” du style : “référent rebondissant aléatoire” (ballon de rugby) et autres foutaises proférées par les tenants d’une improbable “science de l’éducation”, me laissent parfois rêveur (c’est une litote).

Cependant. Recourir ainsi que vous le faites à la caricature grossière : c’est pas juste et surtout, c’est pas utile. Trouvez moi un seul écrit de Meirieu affirmant que l’école doit devenir absolument un “espace” de distraction, où l’on n’apprend plus rien (même entre les lignes). Chiche ? Et puis non tiens ! Vous “cassez” pas Lod. Vous n’en trouverez pas.

En vérité, je suis un peu comme Arion (même si c’est pour des raisons diamétralement opposées) : “je m’en fiche”, “la messe est dite “.[…]

Lod : Makhno, je ne pensais pas avoir fait dans la caricature grossière, simplement assez court pour ne pas ennuyer tout le monde avec nos histoires de profs.

Je dis seulement que les méthodes qu’on peut qualifier de « ludiques avant tout » se fourvoient bien souvent en partant du principe que l’apprentissage est lourd et indigeste, que par conséquent elles tranchent largement dans ce qu’elles supposent dur et plein de nerfs, qu’elles découpent en petits morceaux prémâchés et donnent finalement à manger une bouillie sans saveur.Et, ce qui est plus grave, elles accentuent les inégalités : les parents qui ouvrent un peu les manuels et les cahiers, qui s’étonnent de ce qu’ils y trouvent (ou n’y trouvent plus) se tournent pour beaucoup vers les cours particuliers, Acadomia et compagnie, ou l’école privée (enfin, ceux qui en ont les moyens : si ça c’est pas accentuer les inégalités.)

Pour faire concret, un exemple de ce que les parents pourraient s’étonner de ne plus trouver dans les cahiers : pas un élève de ma classe de 3è ne sait faire une division du genre 3572 : 27 à l’aide d’un crayon et d’un papier. Véridique, et c’est une classe de « bons latinistes » ! A l’époque où je suis devenue prof, l’IUFM s’efforçait de nous faire entrer dans le crâne que les cours de grammaire ou les dictées étaient hors-la-loi, que le rap avait sa place en cours de poésie (aujourd’hui, c’est le slam), et que le tout était que les élèves lisent, peu importe quoi : BD, collection Arlequin, le journal TV, il fallait va-lo-ri-ser l’acte de lecture. Là encore, je n’exagère pas du tout, mais c’est que je n’ai pas dû avoir de chance, je suis tombée pile sur les seuls formateurs idiots du moment.

Quand j’entre en classe, mon but n’est pas d’ennuyer les élèves avec de la grammaire bien chiante (niark niark). En revanche, je m’efforce toujours d’être pour ces enfants, qui ne font que passer devant moi, le genre de professeur que je pourrais souhaiter pour mes enfants à moi.

Et le jour où moi aussi je m’en foutrai, après tout, qui arrivera peut-être plus tôt que prévu au train où vont les choses, je changerai de métier (s’il est possible à un prof de se reconvertir…)

Lod

ééé

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