Greenpeace, le glacier, la foule et le photographe : La massification des individus mise à nue

Publié le 18 août 2007 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com

La chronique (pas coquine du tout) de CLIO pour RELATIO :

« Cela ne vous a pas gênée de poser nue ?

-   Non. Mais le plateau était chauffé

-   Vous n’avez vraiment rien mis ?

-   Si, la radio… »

Ce dialogue entre Marilyn Monroe est un journaliste peu inspiré m’a toujours fait sourire. Avec une pointe d’envie. Vous pensez ? Marilyn ! J’ai l’air de quoi, moi, à coté ?... Même aujourd’hui, où sur le net certains sites font recette avec des créatures qui nous feraient oublier que « la femme est le chef d’œuvre de Dieu, surtout quand elle a le diable au corps », j’hésite à paraître nue devant des yeux étrangers.

le baiser de RODIN

J’aime bien, pourtant, parfois…Enfin, cela dépend des yeux. Alors, je pense, comme Miguel de Cervantès que « Nue, je suis venue au monde et nue, je le quitterai, ce monde »…Mais non, je n’ai jamais pensé à Cervantès quand j’étais à poils devant ces yeux là! Je dis cela par pudeur, sans doute,  pour habiller mon âme…Citation pour citation, je penserais plutôt à John Owen dans ces cas là : « Plus l’amour est nu, moins il a froid »…Mais quand c’est vraiment bien, je ne pense à rien. Et vous ?

Où en étais-je ? Ah ! Oui. A ceux et à celles qui posent nu (e) s devant des photographes. Et, surtout, en masse, en foule, en nombre...

 Ce n’est pas du nudisme. J’ai des copines qui en font : c’est une philosophie le nudisme, pas de l’exhibitionnisme. Je les comprends les nudistes, même si je n’ai jamais accepté leurs invitations…Je n’en ai jamais parlé à mon psy, tiens. Il faut que j’y pense. Vivre à poils, c’est au poil, sans doute. Qui disait, déjà, « La nudité est l’éloquence de la chair » ? Ou « Nu ! Il n’y a de bonheur que pour les corps libérés de leurs vêtements » ? D’ailleurs, même Mahomet l’a dit (paraît-il) : « Etre nu n’est pas inconvenant ». Bas les voiles, donc ! Qui disait (encore !)  qu’une femme nue ne cache jamais son visage ? Moi, cela m’est arrivé : pour cacher des larmes…Mais çà, c’est encore une histoire pour mon psy, pas pour une chronique « européenne ».

Européenne ? Mondiale, même… Vous pensez : le réchauffement de la planète, le climat détraqué, la fonte des glaces et des glaciers ! J’ai vu une photo (ci-dessus) d’Angéla Merkel au Groenland : elle était bien couverte, engoncée dans des vêtement chauds. Logique. Quand il fait froid, on  se couvre. Encore que…l’amour chez les Esquimaux ? Hors sujet.

Heureusement, on peut se montrer sans être nue. Elle est allée au pôle nord pour juger « sur pièces » de la fonte de la banquise, la Chancelière. Si elle cherchait à faire  un « coup de com’ », (comme dirait Sarkozy), c’est raté : le « SOS planète » dont on parle partout en ces jours d’août (où l’on ne sent guère le réchauffement de la planète) vient des Alpes suisses, du Valais. Un SOS lancé sans cor des Alpes, mais avec des corps comme l’étatsunien Spencer Tunick  , champion toutes catégories des « performances » plus sportives qu’artistiques, adore les saisir. Photos de groupes avec croupes à l’air ! 

Le glacier

A poils sur les glaciers, les militants et les figurants de Greenpeace ! Chauffe, Marcel : C’est pour le bien de l’humanité. Qui va prendre une sacrée dégelée si cela continue ainsi… Pensez donc : le glacier d’Aletsch, protégé par l’Unesco, donc classé dans son « patrimoine de l’Humanité » a reculé de 115 mètres en un an. A poils, la caillasse ! Plus d’habit de glace !

« La fonte des glaciers est un signe indubitable des changements climatiques planétaires », écrit Greenpeace. «  Si le réchauffement du climat de notre planète continue ainsi, en 2080, de la pierraille aura remplacé la plupart des glaciers. Durant les 150 dernières années, les glaciers alpins ont perdu près du tiers de leur surface et près de la moitié de leurs masses ». 150 ans ? Mon scooter n’est donc pas responsable de tout. Pardon : ce n’est pas un sujet de plaisanterie. Surtout que j’ai (mais oui !) un coté « écolo » qui épate mes copines…

A Mexico

Mon problème, c’est le lien entre le climat qui se réchauffe et ces corps en masse qui se gèlent (ce que vous voudrez). Je sais qu’il existe un Centre pro-natura réputé à proximité. Mais cela n’explique rien…  Le contraste entre l’individu démuni et l’ampleur du défi à relever ? La faiblesse d’individus sans protection face à l’une de coulées les plus impressionnantes d’Europe ? La vulnérabilité du corps humain face à notre environnement ?   De cela aussi je devrais parler à mon psy…

Greenpeace expliquait avant l’opération (le prise de nus) : « L’installation symbolise la vulnérabilité des glaciers et la fragilité du corps humain. Les photos de cette installation doivent émouvoir la population et la motiver à agir maintenant contre les changements climatiques. Mettez-vous à nu pour protéger le climat! »

Greenpeace ajoutait : « Spencer Tunick est connu pour ses installations de personnes nues. Il qualifie ses oeuvres de «sculptures vivantes» ou de «paysages corporels». En collaborant avec Greenpeace, Spencer Tunick aimerait  témoigner de la beauté et de la fragilité de notre planète. Et nous rappeler que nous devons aller de l’avant et agir en prenant des décisions courageuses! » Ah !bon…En quoi le fait d’être en masse à poils nous fait « aller de l’avant » ? En quoi, participer, numéro parmi d’autres numéros,  à une opération publicitaire est un « acte courageux » ? La contestation à poils est à la mode, je sais. Et ces manifestations ne sont pas toujours ni belles ni drôles, surtout quand leur « message » se veut politique. « L’exploitation de l’homme (et de la femme) par l’homme » commence souvent par des mises à nu humiliantes…

Il faut dire que, personnellement, j’ai un problème de fond avec certaines des  photos de Spencer. Devrais-je aussi en parler à mon psy ?... Ces foules de gens à poils me font irrésistiblement penser aux photos noir et blanc de la tragédie des tragédies, à ces photos de l’indicible, à ces clichés des camps d’extermination.

Curieux constat dans une chronique qui se veut coquine et légère. Mais que voulez-vous ? « La peau c’est la profondeur », disait Paul Valéry, l’un des auteurs préférés de Daniel Riot.  Celui-ci ajouterait sans doute, dans ce contexte,  le mot d’un auteur dont j’ai oublié le nom : « l’individualisme de masse que nous connaissons conduit à une massification de l’individu »…

Je suis certaine que les grands communicants de Greenpeace n’ont pas songé à ces effets pervers de leur expédition dans le Valais. Au moins dans ma tête… Mais je suis sûre de ne pas être la seule à réagir ainsi.

Le nu, oui. L’art en a vécu, en vit et en vivra longtemps. Même si tous les nus ne sont pas à porter aux nues… Mais les images sont souvent prisonnières d’autres images. Glaçantes, au bout du compte,  ces images d’une foule nue sur le  glacier. Comme d’autres  prises par Spencer Tunick en d’autres lieux, y compris dans du chocolat (blanc) à Bruges (ci-dessous)…L'individu marchandisé, bestialisé, chosisé.Négation de la personne. De l'art? Certains le disent...

Ce qui contrarie la légèreté de l’esprit,  c’est la glaciation des âmes dont l’humain est capable. J’étais pourtant partie pour écrire une chronique pleine de sourires. Mille excuses. Pour cette fois, j’ai dû rhabiller mes coquineries

Clio

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