Nous le sentions monter depuis quelques temps, notamment la grève qui a eu lieu à la Gare Saint-Lazare après l’agression dont avait été victime un conducteur de TGV en gare de Maisons-Laffitte. Même le «droit de retrait» en cas de situation dangereuse ne leur était plus tolérable. Les agents de la SNCF ou de la RATP peuvent bien se faire casser la gueule – et quand il y aura mort d’homme ? – peu leur chaut à ces fieffés «pôv c…» ! Seul l’ordre – botté ? – leur importe.
Ils entendent éradiquer le droit de grève – liberté quasi constitutionnelle aux termes du Préambule de la Constitution de 1946, lequel fait partie intégrante de ce que l’on a nommé le «bloc de constitutionnalité», notamment l’article 32 : le droit de grève est reconnu à tous dans le cadre des lois qui le réglementent.
Depuis 1946, les lois n’ont pas manqué précisément pour réglementer – et restreindre – le droit de grève. Dernièrement, L’UMP en a rajouté plusieurs couches au sujet du «préavis» notamment dans la fonction publique, visant notamment le personnel des transports en commun. Mais cela ne saurait leur suffire : ils veulent ni plus ni moins que l’éradication totale du droit de grève.
Vieux délire fasciste qui nous vaudra une fois de plus une loi purement «scélérate»… Sans remonter jusqu’aux origines de l’expression - les lois contre les anarchistes dénoncées en raison de leurs excès notamment par Francis de Pressensé et Emile Pouget dans un pamphlet célèbre : “Les lois scélérates de 1893-1894″, publié en 1899 - je rappellerais aux moins de 40 ans que nous utilisâmes cette expression en 1970 au sujet de la loi Marcellin dite «anti-casseur» du 8 juin 1970 qui visait à rendre les organisateurs d’une manifestation respon-sable des violences commises à l’occasion de celle-ci. Elle fut fort heureusement abrogée en 1981.
Les propositions de notre génial législateur - qui n’a visiblement aucune connaissance de quelque sorte en matière juridique – font froid dans le dos !
Qu’entend-il par «ABUS» ? «mettre en toute impunité les usagers dans des situations inacceptables où ils sont bloqués dans des trains», «cela doit pouvoir aller jusqu’à la sanction le plus grave, c’est-à-dire l’interdiction de responsabilités syndicales»… Je n’utilise pas sans raison l’expression de «loi scélérate»… et que cela vise tout particulièrement le syndicat SUD-rail - en pointe dans la contestation- ne me fait point de doute !
D’abord, la grève ne bloque pas les voyageurs dans les trains… Je n’ai jamais entendu parler d’un cheminot qui n’ait mené les voyageurs à destination parce que l’heure de la grève avait sonné ! Ce qui bloque parfois les voyageurs, ce sont des incidents ou des accidents, alliés parfois à la connerie des voyageurs, tels ceux qui sont descendus dernièrement sur les voies à la suite d’un «accident de personnes», bloquant totalement le trafic de la gare Saint-Lazare.
Ce ne sont pas les cheminots qui font péter les caténaires – mais à part des chasseurs maladroits et peut-être des saboteurs ? En tous cas très certainement pas les contestataires de Tarnac ! – c’est surtout l’absence d’entretien, qui doit coûter trop cher ! Aucun syndiqué responsable ne s’attaque à son «outil de travail», bien au contraire ! Les seuls actes de «sabotage» dont j’ai eu connaissance furent le fait de cheminots résistants qui s’attaquaient aux trains transportant des troupes allemandes. Mais il est vrai que la «Résistance» n’est plus guère à l’honneur à l’UMP, au grand dam des derniers gaullistes.
Il n’y va pas avec le dos de la cuillère ! «On peut parfaitement imaginer des sanctions financières contre des syndicalistes qui génèreraient des dégâts pour la sécurité, ou ayant un coût économique pour la collectivité. Et on peut imaginer que soit engagée leur responsabilité personnelle»…
Un coût économique pour la collectivité ?
«La meilleure protection du droit de grève, c’est la lutte contre les abus de ce droit sinon, c’est la population qui se révolte contre les abus», a poursuivi le député des Hauts-de-Seine. Selon lui, «si l’on veut protéger le droit de grève, il faut mettre en place un arsenal juridique qui lutte contre les abus». Protéger le droit de grève ? Mon cul !
On peut faire confiance à la droite pour instrumentaliser les usagers mécontents. Il n’empèche : 69 % de la population serait d’accord avec la grève du 29 janvier… C’est dire l’importance du mécontentement des Français ! Certains feront sans doute «grève par procuration» comme l’on a dit pour 1995 de ceux qui ne peuvent se permettre de faire grève sous peine de perdre leur boulot.
Et puisque Frédéric Lefebvre est d’une stupidité en acier trempé, je vais me permettre de lui donner une courte leçon de science politique : une grève qui ne gêne pas est une grève inutile…
C’est l’essence même de ce que l’on appelle le «rapport de forces», lequel a été trop longtemps oublié par des syndicats englués dans la «politique contractuelle», qui ne marche que tant qu’il y a possibilité d’obtenir des concessions et avantages assez substantiels pour apaiser le climat social… C’était le fondement du «fordisme» et de feu l’Etat-providence qui est «parti en couilles» sous les coups de butoir de l’ultralibéralisme déchaîné.
Que l’on ne me dise surtout pas que la «lutte des classes» c’est du passé ! Je rétorquerais immédia-tement que bien au contraire, elle est pratiquée avec une férocité extrême par le Medef. Qui entend exploiter au maximum la misère et le travail. Toutes les lois récentes qui détricotent la protection sociale et les prétentions qu’il a d’aller toujours plus loin dans ce domaine en témoignent à l’envi.
Je constate que – comme toujours – Frédéric Lefebvre fonctionne dans l’excès. Sans que je puisse déterminer s’il exprime sa seule opinion où celle de l’UMP qui serait toutefois contrebalancée par des «réserves» : ne pas dévoiler ses batteries… ça grogne suffisament comme ça dans l’opinion publique pour ne pas risquer de mettre le feu aux poudres !
Quant à une éventuelle et supplémentaire ! réforme du «service minimum», il botte en touche, rappelant que le gouvernement s’était engagé à proposer «dans un délai d’un mois» - toujours l’urgence ! - les «ajustements utiles» à la loi après une concertation avec les partenaires sociaux et les élus. Aura-t-il une conception plus souple que Xavier Bertrand de la concertation sociale ? Pas si c’est Nicolas Sarkozy qui lui siffle l’air de sa “feuille de route” !
Il manquait une «raffarinade» !
Il est vrai qu’il a tellement ignoré les attentes de la «France d’en bas» quand il était premier ministre qu’aujourd’hui, une telle cécité n’a rien de bien étonnant… Quel malaise social ?
«Plus forts qu’on y est entrés» ?
Resucée de ses vœux de la Saint-Sylvestre… entendre que cette crise est une formidable aubaine pour détricoter davantage le droit social et mettre les salariés en situation de quasi-esclavage. De la même façon, à grands coups de nouvelles «restructurations» dispa-raîtront grand nombre d’entreprises qui n’auront pas la «taille critique» pour affronter les enjeux de la mondialisation.
«Droit dans ses bottes» lui-aussi ? «mais je dois voir ça avec sang froid, avec calme, réfléchir, ne pas décider en fonction de qui est écrit dans le journal ou de ce que dit celui qui crie le plus fort»…
Mëme s’ils sont plusieurs millions dans la rue le 29 janvier 2009 à crier leur exaspération et leurs inquiétudes ? C’est une vraie réclame pour les boules Quies, ce mec-là !
SOURCES
Face aux inquiétudes, Sarkozy réaffirme sa volonté de poursuivre les réformesLEMONDE.FR | 27.01.09 © Le pouvoir politique redoute un grand mouvement social
LE MONDE | 26.01.09 ©
20 minutes
A deux jours de la grève, Nicolas Sarkozy ne fléchit pas
Le Figaro
La grève soutenue par 69% des Français
Je vous le donne en mille : il s’agit d’un sondage du Figaro… dont les résultats sont diamétralement opposés à ceux de l’enquête nationale :
Oui 74.34%
Non 25.66%
Les lecteurs du Figaro sont bien marqués idéologiquement !
Libération
L’UMP préconise des «sanctions financières» face à «l’abus du droit de grève»
69% des Français soutiennent la grève de jeudi prochain
Libé-Orléans
Nicolas Sarkozy aux grévistes: «je ne peux pas arrêter le mouvement des réformes»