Garde à vue : mode d'emploi

Publié le 13 février 2009 par Cahri Cahri

Garde à vue : mode d’emploi

Les gardes à vue se multiplient en France et à la Réunion, avec parfois des dérapages, comme ce particulier gardé 24h en slip à Saint-Gilles. La procédure fait pourtant l’objet de règles très strictes.

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Quarante huit heures en slip ! La semaine passée, un avocat s’insurgeait contre des conditions de garde à vue humiliantes. Son client avait été laissé en sous-vêtements durant toute la procédure au sein de la brigade territoriale de Saint- Gilles-les-bains. « C’est certainement pour prévenir les pendaisons avec le pantalon ou les chaussettes  », tente d’expliquer Dominique Auter, magistrat au Parquet de Saint-Denis. Loin des clichés des films américains dans lesquels les suspects subissent des violences physiques, Jean-Jacques Morel, avocat pénaliste, temporise : « Il y a encore quelques claques données, mais la page est en train d’être tournée ». « Les pressions sont plutôt d’ordre psychologique, c’est beaucoup plus fin », ajoute-t-il.

Stéphane*, 29 ans en sait quelque chose ; il y a cinq ans, le jeune homme a connu la garde à vue durant 24 heures : « Les policiers ont refusé de me donner à manger et se sont comportés de façon brutale  ». Choqué par cet événement, il ne souhaite pas donner les motifs de sa mise en garde à vue. L’affaire sera classée sans suite.

Il ne faut pas confondre interpellation, garde à vue et incarcération.

Dans le troisième cas, il faut une décision de justice. C’est sur l’initiative des forces de l’ordre qu’une personne interpellée est emmenée au poste ; elle reste néanmoins «  libre ».

On ne compte plus le nombre de fois où Didier Debals, syndicaliste de l’Education nationale, a été interpellé, son casque à cornes sur la tête, après des manifestations. Interpellé, mais pas placé en garde à vue. Même sort pour Eric Soret, autre leader syndical. « On m’a mis les menottes et emmené au poste, mais j’ai été très vite libéré », se souvientil, guère loquace sur une expérience qui reste toujours déplaisante.

« Une chose très grave »

L’article 63 du code de procédure pénale délimite les motifs d’une telle mesure : «  Une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner que ces personnes aient commis ou tenté de commettre une infraction ». « C’est une chose très grave, puisqu’il y a suspicion de délit ou de crime », met en garde Dominique Auter. Les officiers de police judiciaire doivent impérativement prévenir le Parquet de Saint-Denis ou de Saint-Pierre, avant tout placement en garde à vue.

A Saint-Denis, trois des substituts du procureur de la République reçoivent les demandes en journée. La nuit, les magistrats se succèdent pour assurer la permanence.

Peu importe l’âge du suspect, les policiers et gendarmes ont l’obligation de respecter certaines règles.

« Vous êtes en garde à vue. Vous pouvez appeler un membre de votre famille et demander à voir un avocat  ». L’officier de police judiciaire se doit d’informer le gardé à vue de ses droits. Ce dernier peut faire appel à un avocat mais aussi demander la visite d’un médecin. Une consultation médicale qui devient obligatoire après 48h de garde à vue consécutives ou pour un mineur de moins de 15 ans.

Les « gardés à vue », dans les trois premières heures de leur rétention, peuvent demander à prévenir un membre de leur famille. Tout refus (pour les nécessités de l’enquête) doit être autorisé par le procureur. « Pour pouvoir appeler ma copine, j’ai dû dire que je ferai des aveux après l’appel, alors que je n’avais rien fait », dénonce Stéphane.

En cas de non-respect des règles, les avocats peuvent demander la nullité de la procédure. « J’ai déjà fait annuler une garde à vue, les policiers avaient oublié ou notifié leurs droits trop tard à mes clients », confirme Jean-Jacques Morel. Dans ce cas, même des aveux n’ont plus aucune valeur juridique.

« À la Réunion, 99 % des policiers et des gendarmes font bien leur travail  » estime l’avocat. Aux magistrats du Parquet de s’en assurer : des visites impromptues, ou des contrôles pour les cas sensibles… Quant aux conditions de la rétention, Jean- Jacques Morel les décrits comme étant «  très rudes » et les locaux «  très rustiques ». Impossible de s’en rendre compte, au commissariat de Malartic, « l’accès est strictement interdit ».

Linda SACI
Etudiante en journalisme à Info-Com

* Prenom d’emprunt