3611 code sursis pour le service emblématique du Minitel

Publié le 08 mars 2009 par Olivier Roumieux

L'information est tombée il y a quelques jours dans l'indifférence générale (et quelque part c'est heureux) : l'annuaire électronique sur Minitel ne fermera pas au printemps 2009, comme le groupe PagesJaunes l'avait annoncé (encore une fois dans l'indifférence générale) en juillet 2008.

« En 2008, le 3611 a encore enregistré plus de 19 millions de connexions .. Si nous arrêtons ce service brutalement en mars comme nous l'avions prévu, il est probable qu'on soit encore sur un rythme supérieur à 1 million de connexions par mois » a expliqué Michel Datchary, PDG des PagesJaunes.
Les utilisateurs du minitel, plus âgés que la moyenne, "ne se mettent pas à internet et ne vont peut-être jamais s'y mettre. C'est une population assez fidèle", a-t-il ajouté. Le chiffre d'affaire n'en demeure pas moins fortement en baisse, puisque PagesJaunes en a retiré en 2007 25,3 millions d'euros, contre 40 millions en 2006 et "la descente a continué en 2008", selon son PDG.
A l'heure où France Télécom lui-même ne sait plus trop combien de terminaux sont en circulation, c'est une nouvelle assez réjouissante sur la persistance des usages et la résistance des usagers. Avec du recul, cela permet d'ailleurs de mesurer rétrospectivement tout le génie de cette innovation.
L'annuaire électronique, c'est la Madeleine de Proost.com, le premier contact de beaucoup de Français avec les banques de données, l'interactivité, le conversationnel, les 40 colonnes, un clavier, les déconnexions intempestives et le stress de l'argent perdu en ligne.
Les trois premières minutes gratuites (abolies en septembre 2007, paraît-il), c'était le bonus à la dextérité : on fait sa recherche, on se déconnecte, on recommence...
Je me souviens qu'à l'époque, même son système de recherche en langage naturel était exemplaire, puisqu'il était l'œuvre d'Erli (Etude et recherche en linguistique et en informatique), un des fleurons de l'industrie linguistique française (devenu aujourd'hui Lingway, toujours dirigé par Bernard Normier). Ce fut une réalisation emblématique pour un secteur que je connais bien, celui des professionnels de l'information. A savoir d'ailleurs si aujourd'hui les bases de données sont les mêmes sur Internet et sur le 36 11.
Difficile de se remettre dans le contexte de l'époque, mais il faut se souvenir que l'annuaire électronique est venu remplacer des mètres linéaires d'annuaires papier, un ou plusieurs par département, que l'on pouvait consulter dans chacune des Postes émaillant le territoire. Le slogan "l'information au bout des doigts" n'existait pas encore, pourtant la réalité qu'il vantait commençait tout juste de se construire. Une petite boîte en plastique laissait entrevoir un univers considérable d'informations en devenir. Certes, l'enthousiasme était alors grandement tempéré par les prix prohibitifs que pratiquaient certains serveurs de banques de données. Mais l'Internet allait remettre les pendules à l'heure, dans un peu moins de dix petites années...

Pour retrouver la présentation de l'annuaire sur Legrenier : http://legrenier.roumieux.com/post/2007/03/25/un-Minitel-pour-tous-les-Francais
Capture d'écran : http://www.atomixer.fr